La déesse Aurore:
Chez les anciens Indo-Européens existait
une déesse de l'aube appelée "Ausos".
Son nom était conservé dans la mythologie des
divers peuples indo-européens issus du tronc commun :
Elle s'appelait Aurora en latin, Eos en grec, Aud en germanique,
Ushah en irano-aryen, Ushas en indo-aryen, Aushriné
/ Aushra / Auseklis en balte et Astlik / Astghik / Asdghig
en arménien.
La déesse Aurore chez les Romains
:
La déesse Aurora, chez les Romains,
portait également le nom de "Mater Matuta"
("Mère du matin"). Elle présidait
au début du jour mais aussi à la maternité,
c'est à dire au début de la vie. La fête
des Matrialias lui était consacrées le 11 juin.
Elle sera tardivement identifiée avec la déesse
marine grecque Ino / Leucothée / Leucothoé.
La déeesse Aurore chez les
grecs :
Chez les Grecs, la déesse Aurore portait
le nom d'Eos / Auos. Soeur d'Hélios (dieu du Soleil)
et de Séléné (déesse de la Lune),
elle traversait le ciel dans un char brillant. On lui donnait
souvent l'épithète de Rhododactylos ("Aux
doigts de roses").
Dans son "Odyssée XIII 93",
Homère appelle l'Aurore du nom d'Eos Erigeneia ("l'Aube
tôt-levée") et l'associe à son fils
Eosphoros ("Porteur de la lumière de l'aube"),
la planète vénus en tant qu'etoile du matin)
:
"Alors apparait la plus brillante
des étoiles, Eosphoros, qui annonce le plus souvent
la lumière d'Eos Erigeneia."
Hésiode fait de même dans sa "Théogonie
378-382" :
"Et après celà,
Erigeneia porte l'étoile Eosphoros et les étoiles
brillantes dont le ciel est couronné."
Eos portait parfois aussi l'épithète
de "Eruphaassaa" ("la resplendissante"),
l'équivalent de "Vidâuuaiti" chez les
Irano-Aryens et de "Vibhâti" chez les Indo-Aryens.
La déeesse Aurore chez les
Baltes :
Chez les Lithuaniens, Aushriné (Aushra
= Aube) est la déesse de la beauté et de la
jeunesse, mais aussi de la planète Vénus en
tant qu' Etoile du Matin. Chaque matin elle prépare
la voie à Saule, le dieu du Soleil. Et chaque soir,
c'est Vakariné (la planète Vénus en tant
qu' Etoile du soir) qui prépare le lit du dieu Saulé.
Chez les Lettons, Auseklis ("Semence
de l'Aube" ou "Celle qui se lève") est
devenue le dieu de la planète Vénus. Il est
aussi le palefrenier de Saules Meita ("Fille du soleil"
= "Saules Dukryte" en lithuanien), la déesse
qui fait revenir de Printemps.
La déesse Aurore chez les Slaves
:
Chez les Slaves, la déesse du matin
est Zorya Utrennaia (Zoria Outrenniaia / Zvezda Danica / Zwezda
Dnieca), épouse de Myesyats (le dieu de la Lune). C'est
elle qui, le matin, ouvre les portes du ciel pour laisser
passer le Soleil levant. Elle est associée à
la planète Vénus en tant qu' Etoile du Matin.
Il y a aussi la déesse du soir, Zorya Vietchernaia
(Zoria Vetchernaia / Zorya Vechernyaya / Zvezda Vechernaya
/ Zvezda Vechernitsa) qui est chargée de refermer les
portes du ciel derrière le soleil couchant. Elle est
associée à la planète Vénus en
tant qu' Etoile du Soir.
On parle aussi parfois de la Zoria de minuit (Zorya Polunochnaya
/ Zwezda Polnoca), chez qui le Soleil meurt puis renait.
En regroupant ces trois déesses on obtient une triade
chargée de surveiller un chien fabuleux attaché
dans le ciel. S'il parvenait à se détacher ce
serait la fin du monde (mythe comparable à celui du
loup Fenrir chez les Germains).
Semblables aux trois fées,
Zorya du matin est une jeune fille, Zorya du soir est une
mère et Zorya de minuit est une vieille femme.
La déesse Aurore chez les Aryens
:
Chez les Aryens, Aurore portait le nom d'Ushah
ou Ushas. Amante (ou mère) du Soleil (ou d'Agni, le
feu), elle traversait le ciel dans un char brillant en chassant
les mauvais esprits de la nuit.
Dans le Rig-Veda II,15,6, cependant, il est dit qu'Indra (le
dieu guerrier de l'orage) aurait "écrasé
son char avec sa foudre".
Dans le Rig-Veda X,73, 6, il est dit qu'Indra
a détruit certains ennemis dont le char de Ushas.
Dans le Rig-veda IV,30,8-11, il est dit :
"Indra, c'est un acte de puissance
et de virilité que tu as réalisé, quand
tu as frappé la fille du ciel, une femme qui était
mauvaise.
Toi, Indra, le grand dieu, tu as écrasé Ushas
la fille du ciel, qui s'exaltait elle-même.
Ushas s'est enfuie dans la terreur, son char brisé,
écrasé par le vigoureux (Indra)
Son char est cassé et détruit et elle-même
a fui au loin."
Dans le Rig-Veda X,73, 6, il est dit :
"Elle est partie et a abandonné
son char."
Dans le Rig-Veda X,138,5, il est dit :
"La brillante Ushas avait peur
du coup de foudre destructeur d'Indra."
Parfois le nom d'Ushas était utilisé
au pluriel : Ushasah ou Ushâsas = "les Aubes",
pour désigner les "Trois étoiles du matin"
(?).
La déesse Aurore chez les Germains
:
Chez les peuples Germaniques, la déesse
Aurore portait le nom de Aud, fille de Nott (déesse
de la nuit). On l'appelait aussi Ostara (Ostare, Eostra, Eostre,
Eastra, Eastre, Ostern) : elle régnait alors non seulement
sur le matin, l'instant où le soleil se lève
(début de la journée), mais aussi sur l'est,
le lieu où le soleil se lève. C'est pourquoi
Ostara est de la même racine que le mot désignant
l'est chez les Germains : Ost en allemand, Oosten en néerlandais,
East en anglais, Öster en suédois, etc...
Elle régnait aussi sur l'instant où commence
le printemps : l'équinoxe du 21 Mars. C'est pourquoi
on la célébrait à cette date. Bède
le vénérable (672-735), dans son livre "De
temporum ratione C XV", raconte que les Germains Saxons
vénéraient alors leur grande déesse et
que, lorsqu'ils ont été christianisés,
cette fête a fusionné avec la fête de Pâques
:
"Eostur-monath (= Avril) a un nom qui est maintenant
traduit par 'mois pascal', mais il était autrefois
appelé d'après une déesse du nom d'Eostre,
en l'honneur de laquelle des fêtes étaient célébrées
pendant ce mois. Maintenant, ils (les Germains Saxons) désignent
cette saison pascale par son nom, en appelant les joies du
nouveau rite par le nom consacré de l'ancienne observance."
C'est pourquoi, chez les peuples germaniques actuels, le nom
de la fête de Pâques (Ostern en allemant et Easter
en anglais) doit son nom à la déeesse Eostre.
Quand aux oeufs de Pâques, ils dérivent
d'un ancien usage chez les Gréco-Romains, Perses et
Egyptiens : Ceux-ci s'offraient des oeufs (parfois dorés)
comme symboles de renaissance de la vie au Printemps. Cette
coutume existait déjà chez les Chrétiens
au IVème siècle. Plus tard, au XIIIème
siècle, en Europe, ces oeufs de Pâques commenceront
à être peints. Et en France, au XVIIIème
siècle, on commencera à en fabriquer en chocolat.
Pour les Catholiques, les oeufs de Pâques sont apportés
par des cloches volantes. Au Tyrol, cependant, on dit qu'ils
sont apportés par des poules, et en Suisse c'est par
des coucous. Chez les peuples germaniques protestants, ils
sont déposés par le "Lièvre de Pâques"
("Osterhase" en allemand) ou le "Lapin de Pâques"
("Easter Bunny" en anglais). Hors le lièvre
ou le lapin était l'animal associé à
la déesse Ostara chez les Germains.
La fête chrétienne de Pâques, chez les
peuples non-germaniques, pourrait elle-même avoir une
origine paîenne et représenter la survivance
d'une ancienne célébration du Printemps.
C'est au concile de Nicée, en 325, que la date de Pâques
a été placée au 1er dimanche aprés
la pleine lune suivant l'équinoxe de Printemps. Elle
célèbre la résurrection de Jésus
lors de sa sortie du tombeaux... mais elle dérive visiblement
de la Pâque juive (Pessah) qui était placée
au 15 du mois lunaire de Nisan (le 1er Nissan correspondant
à la 1ère nouvelle lune aprés l'équinoxe
de Printemps). Et dans l'ancien calendrier solaire des Esséniens,
cette fête retombait le 3 avril. Cette Pâque juive
célèbrait la résurrection du peuple Hébreu
lors de sa sortie d'Egypte. Mais à l'origine on pense
qu'elle célébrait probablement la résurrection
de la nature lors de la sortie de l'Hiver.
A noter que le 25 Mars, lors de la fête d'Hilaria, les
Romains célébraient la résurrection d'Attis,
l'amant de la déesse Cybèle. Cette mythologie
était d'origine anatolienne et, elle aussi, avait un
rapport avec une divinité de la fertilité sortant
des Enfers pour apporter le Printemps sur Terre.
La déesse Aurore chez les Arméniens
:
Chez les Arméniens, la déesse
Astlik / Astghik / Asdghig (un nom signifiant "Petite
Etoile") régnait aussi sur la fertilité,
l'amour et le printemps. Plus tard elle gouvernera également
les sources. On la célébrait lors de la fête
de Vartavar / Vardavar / Vardevar, 98 jours après Pâques
(donc vers le début de l'Eté).
La déesse Aurore chez les Celtes
:
Chez les peuples Aryens, la déesse
Aurore était souvent désignée par l'épithète
"Qui est de haute noblesse", c'est à dire
"Brhati" en Inde et "Barazaiti" en Iran.
Cette épithète existait aussi chez les peuples
celtiques, sous la forme "Brig", et elle a remplacé
le nom de la déesse.
Ainsi, chez les Celtes Gaulois, Aurore portait le nom de Brigindo
ou Bricta et elle était la déesse de la guérison.
Chez les Celtes de Grande-Bretagne, Aurore portait le nom
de Brigantia (Fraed en gallois).
Chez les Celtes Gaels d'irlande, Aurore portait le nom de
Brig, Breg, Brigid ou Brigit. Selon le "Sanas Cormaic" ("Glossaire
de Cormac"), il y avait trois déesses-soeurs portant
ce nom : la première (Brigit Bè Filid) présidait
l'art de la poésie, la 2ème (Brigit Bé
Goibnechta) présidait l'art de la forge, et la 3ème
(Brigit Bé Legis) présidait l'art de la médecine.
Brig était donc une triple-déesse, c'est à
dire une "déesse trifonctionnelle". Chez
les peuples Indo-Européens, en effet, les dieux étaient
classés dans trois "classes" ou "fonctions"
: Les dieux de la 1ère fonction dirigeaient la prétrise,
la poésie et la magie, ceux de la 2ème fonction
dirigeaient les armes et la guerre et ceux de la 3ème
fonction dirigaient la fertilité, la richesse et la
santé. Hors Brig régnait sur les trois fonctions
à la fois : Poésie (1ère fonction), forge
(2ème fonction) et médecine (3ème fonction).
En Irlande, Brig était aussi la déesse
du printemps. Elle était honorée lors de la
fête d’Imbolc (Oimelc / Emwalc'h), le 1er février.
Cette date, dans le calendrier irlandais, correspondait au
début du printemps (chez les Celtes, en effet, l'équinoxe
était placé au milieu de la saison et non pas
à son début). On dit que la déesse sortait
alors de sa prison d'hiver : la montagne Ben-Nevis. Lors de
cette fête, les paysans portaient des flambeaux et parcouraient
les champs en procession, priant la déesse de purifier
la terre avant les semailles.
Lorsque l'Irlande deviendra chrétienne, cette déesse
sera remplacée par Sainte Brigitte de Kildare sensée
avoir vécu de 451- 523 ap.JC. En irlandais on l'appelle
Bride, Brìghde, Brigit, Brigid ou Brighid. En breton,
on la nomme Brec'hed, Berhet ou Brehet. Elle aurait été
abesse de Cilldara (Kildare) là où se trouvait
jadis un sanctuaire paîen dans lequel 19 ou 20 vierges
entretenaient un feu perpétuel pour la déesse
Brig. Ce feu existait encore au XIIème siècle
où Giraldus Cambrensis (Giraud de Cambrie / Gerald
de Galles) racontait encore que la flamme de Brigid était
logée dans une enceinte sacrée, entourée
d'une haie d'osier qu'aucun homme ne pouvait traverser. Sainte
Brigitte conserve d'ailleurs un rapport avec le feu : On raconte
qu'à sa naissance, au lever du soleil, une colonne
de feu s'est élevée au dessus de sa tête.
Elle garde, en plus, des rapports avec les trois fonctions
: Elle préside le feu de divination, le feu de protection
et le feu de guérison. Sa fête restera placée
au 1er février, sous le nom de "Lá Fhéile
Bríde" c'est à dire "Jour de fête
de Brigitte" (ou "Là Fhèill Brìghde"
en Ecosse).
A noter que les Ecossais l'appellent Bride / Brìghdeet
en font la sage-femme qui a accouché Marie.
Le lendemain, le 2 février, correspond
à la fête de la Chandeleur. Il se peut que cette
fête ait eu, à l'origine, un rapport avec la
fête celtique du printemps, avant d'être christianisée.
Vers 385 ap.JC, l'église de Jérusalem inventa
la fête de la présentation du Christ au temple,
40 jours aprés sa naissance à Noël. Comme
l'Eglise d'orient placait Noël au 6-7 Janvier, la fête
de la présentation était donc datée du
14 Février. Cette date était peut-être
choisie pour remplacer la fête romaine des Lupercales
du 15 Février.
En 494 ap.JC, le pape Gélase 1er (492-496) instaura
cette fête chrétienne à Rome en la reportant
au 2 Février (car, depuis 354, l'Eglise d'occident
placait Noël au 25 Décembre).
En 537 ap.JC. le pape Vigile (537-555) y ajouta la fête
chrétienne de la purification de la vierge.
Plus tard, le pape Serge 1er (687-701) y ajouta encore une
procession avec des cierges bénis.
On l'appelait "Festa Candelarum" c'est à
dire "Fête des chandelles"... C'est de là
que provient le nom actuel de "Chandeleur" (ou "Candlemas").
Les actuelles crèpes de la Chandeleur pourraient également
être un symbole de la lumière solaire.
Selon Bède le vénérable (672-735), la
Chandeleur aurait été créée comme
une alternative à la fête romaine de Proserpine
pendant laquelle les assistants, réunis dans des grottes,
portaient des torches et mangeaient des galettes de céréales.
Le pape Innocent XII (1691-1700) pensait la même chose,
comme indiqué dans son sermon sur le sujet :
"Pourquoi, lors de cette fête
réalisons-nous des bougies ? Parce que les païens
avaient consacré le mois de Février aux dieux
infernaux. Au début de celui-ci, Pluton ayant enlevé
Proserpine, sa mère Cérès la chercha
dans la nuit (au sommet de l'Etna) avec des cierges allumés.
C'est pourquoi, au début du mois, les païens marchaient
autour des ville avec des bougies allumées. Comme les
saints Pères ne pouvaient extirper la coutume, ils
ont ordonné que les chrétiens devraient réaliser
des bougies en l'honneur de la Sainte Vierge. Et donc ce qui
était fait jadis en l'honneur de Cérès
est maintenant effectué en l'honneur de la Vierge."
A noter que Proserpine peut être considérée
comme la déesse du printemps : En effet, c'est lorsqu'elle
sort des enfers où l'avait entrainé Pluton que
l'hiver se termine et que la végétation renait.
Cependant, pour les Romains, cette déesse était
une déesse distincte de celle de l'aurore.
Cependant, d'aprés le pape Benoît XIV (1740-1758),
la Chandeleur ne servait pas à remplacer la fête
de Proserpine mais la fête de l'Amburbalia (2 ou 11
janvier ?) pendant laquelle les Romains faisaient des processions
avec des flambeaux autour des villes.
|