DOSSIER GNOSE :



Les Mages / Maguséens                                                                

 

Les Mages / Maguséens / Magiciens étaient une caste de prêtres de la religion iranienne prés-Zoroastrienne (ressemblant probablement, à l'origine, aux Brahmanes de l'Inde). En Mésopotamie, ces Mages adopteront les pratiques des astrologues et sorciers chaldéens, ce qui leurs donnera une réputation de grands "occultistes" auprés des Grecs et même des Juifs.
Leur influence semble avoir été importante même si elle est maintenant un peu trop oubliée. Il est bien possible que ce soit l'intéraction entre leurs croyances et celles des Juifs qui ait provoqué l'apparition du mouvement gnostique.

Les mages existaient déja avant la réforme zoroastrienne, à l'époque ou le Mazdéisme était encore polythéiste comme le Veddisme en Inde.
Dans la religion Mazdéenne réformée par Zoroastre, le Dieu suprême était Ahura Mâzdâ (Ohrmazd).
Bien que dieu unique, en théorie, il avait créé deux entités subordonnées : Spenta Mainyu, (l' "Esprit Saint") et Angra Mainyu (l' "Esprit Mauvais"). Ces deux êtres deviendront plus tard le "saint Esprit" et le "Diable" chez les Chrétiens.

Spenta Mainyu avait sous ses ordres six "Amesha Spentas" (Saints Immortels).Ils étaient probablement d'anciens dieux perses transformés en simples subordonnés du Dieu unique. Ce groupe s'infiltrera dans le judaisme où il donnera les sept hommes vétus de blanc du "Testament de Lévi", les sept anges de Tobie et les sept Esprits ou les sept "lampes"qui sont les yeux de Yahwé" dans Zacharie; Et chez les Chrétiens, ce groupe donnera les sept archanges..

Angra Mainyu avait aussi des êtres sous ses ordres : les six Drugs ou Darvands qui s'opposaient aux Amesh spentas; Eux aussi étaient d'anciens dieux perses (comme le prouve leurs noms) transformés en des sortes de démons. Ce groupe deviendra les sept Archontes chez les Gnostiques :

 LES SEPT AMESHAS SPENTAS ( Saints Immortels ) LES SEPT DRUGS / DARVANDS
( Démons )
 Spenta Mainyu ( Saint Esprit )   Angra Mainyu  ( Mauvais Esprit )
 Vohu Manah / Vohu Mano ( Bonne Pensée )  Ako Mano  ( Mauvaise Pensée )
 Asha Vahista / Arta vahista ( Vérité )  Andra / Indra  ( Enfer )
 Kshatra Vairya ( Gouvernement Divin )  Shauru / Suarvas  ( Tyrannie )
 Spenta Armaïti  ( Sagesse , Pensée Pieuse )  Nanhaithya/ Nasatyas  ( Orgueil )
 Haurvatât / Hamarvatat  ( Eau de Santé )  Tautu / Tairic  ( Soif )
 Amretât ( Eau de Jouvence , Ambroisie )  Zairik / Zairika  ( Faim )

Sous l'influence des astrologues chaldéens, les sept Archontes seront identifiés avec les sept planètes
Plus tard, les Juifs, Chrétiens et musulmans feront également correspondre les septs archanges avec les septs planètes.
Le Mazdéisme introduita encore bien d'autres éléments dans la religions juive : Le Messie et le Paradis, par exemple.

Avec le temps se forma une version plus dualiste du Mazdéisme. Dans celle-ci Ohrmazd est fusionné avec Spenta Mainyu, devenant ainsi Ohrmaz, le Dieu du Bien, alors qu'Angra Mainyu est Ahriman, le Dieu du Mal. Ces deux divinités étant de puissance égale. Ce dualisme semble avoir influencé les croyances gnostiques.
Apparu alors également la secte des Mazdéens Zurvanistes en Iran occidental et en Cappadoce. Celle-ci faisait d'Ohrmazd et d'Ahriman deux émanations du Dieu Zurvan Akanara (le dieu du temps illimité).
Eudèmes de Rhodes (370-300 av.JC) fut le premier à décrire leurs croyances :

"Les Mages parlent d’une créature que certains nomment espace et d’autres temps et toute autre créature tactile est enclose en elle. Du cœur de cette créature naquirent le dieu du Bien (Oromasdes) et le dieu mauvais (Arimanios), et certains les nomment 'Lumière' et 'Obscurité'."
C'est tardivement, sous le roi perse sassanide Ardeshir II (379-383 ap.JC), que le Zurvânisme devint la religion dominante de l’ouest de l'empire perse.

De plus, les Mages des régions reculées s'adonnaient à des pratiques originales parfois trés différentes de celles du Mazdéisme officiel, dévoué au Dieu du Bien.
Plutarque raconte que les Mages offraient même des sacrifices à Angra Mainyus (Ahriman), avec des offrande d’herbes haoma arrosées de sang de loup et déposées dans un lieu obscur. Hérodote raconte aussi que l’épouse de Xerxés 1er (-486-465), la princesse Amestris, entièrement adonnée à l’influence des Mages, avait sacrifié sept enfants "au dieu des ténèbres et des régions inférieures".(Ahriman). Celà qui aurait été impensables et sacrilège aux Zoroastriens "orthodoxes"; pour eux c'était la de la basse sorcellerie. C'est probablement pour cela que les Mages furont persécutés sous le règne de Darius Ier (-522-486) et de Xerxès 1er (-486-465). Les survivants se réfugièrent alors principalement en Anatolie.

Certains Mages des marges de l'empire perse avaient aussi conservé quelques uns des anciens dieux mazdéens, antérieurs à la réforme monothéiste de Zoroastre.
Selon Hérodote, les Mages auraient emprunté l'"Aphrodire céleste" des Assyriens ... Cela signifie probablement qu'ils avaient identifié leur déesse persane Anahita à la déesse chaldéenne Ishtar. Hérodote confond d'ailleurs cette déesse avec le dieu perse Mithra, ce qui montre bien que celui-ci n'avait pas été oublié. C'est d'ailleurs le roi Artaxerxes III (-425-336) qui rétablira officiellement le culte de Mithra et d'Anahita dans l'empire perse. Les Arméniens, dans leur mythologie empruntée aux Perses, disaient  que le dieu Zervan avait créé le dieu Aramazd (Ohrmazd), lequel avait eu pour fille Anahid (Anahita). Et celle-ci aurait enfanté avec lui le dieu solaire Mihr (Mithra).

Selon Plutarque, Mithra était défini comme le "mesitês" (médiateur) entre Hôromazès (Ahura Mâzdâ) et Areimanios (Ahriman). Il était aussi considéré comme l'ized (ange) du soleil. Son culte se répendra en Anatolie qui faisait alors partie de l'empire perse. Ainsi, selon Strabon, les Perses Achéménides introduisirent le culte de Mithra en Arménie, en Cappadoce et dans le Pont  D'ailleurs dans les royaumes de Parthie (Perse) et du Pont (Nord de l'Anatolie), un grand nombre de rois portaient le nom de Mithridate (Mithra -date = "Donné par Mithra"). En Phrygie (centre de l'Anatolie) des inscriptions montrent que des fêtes de Mithra étaient pratiquées. Et, selon Plutarque (dans "Pompée, 24"), les pirates de Cilicie (sud de l'Anatolie) adoraient Mithra et ont retransmis son culte aux Romains.

Le Mithraîsme se répendra en effet dans l'empire romain. Mais comme c'était un culte secret, réservé aux soldats, on ignore comment son culte se déroulait et quelles croyances il véhiculait.
Des mithraeums (temples souterrains de Mithra) ont cependant été fouillés et on y a trouvé des statues. Certaines représentaient un "Mithra tauroctone" (Mithra sacrifiant un taureau. > Voir). D'autres montraient Mithra entouré du cercle du zodiaque (> Voir). Cela le rapprochait d'Aion, dieu grec du temps infini (identifié à Chronos / Saturne), qui était également représenté entouré du cercle zodiacal (> Voir). On pouvait également le rapprocher du dieu primordial Phanès des Orphiques, généré par le dieu Chronos, qu'on représentait ailé, ceinturé par un serpent et entouré aussi du cercle zodiacal.(> Voir). Hors on observe qu'un texte de Theon de Smyrne parlant de Phanes était exactement le même qu'un texte de Zenobius parlant de Mithras (Mithra). On peut donc penser que ces dieux étaient la même entité.

D'autres statues retrouvées dans les mithraeums représentaient un homme léontocéphale ailé (> Voir). Certains pensent qu'il correspondait peut-être à Zervan Akanara, le dieu zurvanite du temps infini.
Chez les gnostiques ce personnage léontocéphale était également connu, gravé sur des amulettes. Il représentait le démiurge, le chef des archontes. En effet, son nom était "Iaô" ou "Iaô Zabao", c'est à dire Yahwé / Sabaoth, le dieu des Hébreux (> Voir).
Ce léontocéphale s'identifiait peut-être à Phanès car son corps était entouré d'un serpent comme lui. De plus, selon Celse, les Gnostiques Ophites disaient que "Phainon est en sympathie avec l'archonte ressemblant a un lion". Hors "Phainon", nom grec de la planète Saturne, est de la même racine que "Phanes".

Sur les amulettes gnostiques il y avait aussi des représentations d'un serpent léontocéphale du nom de "Chnoubis / Chnoumis". C'était une autre forme du démiurge car, dans le livre gnostique "Apocryphon de Jean" il est écrit que ce dernier avait la forme d'un dragon à face de lion. Et, selon Grégoire de Naziance, les Gnostiques Ophites disaient que le dieu primordial était un serpent à tête de lion. Ce serpent léontocéphale, sur les amulettes, portait aussi le nom d' "Abraxas" (autre nom de démiurge), de "Iao", "Eli-Yahu" ou "Tzabaoth", ce qui l'identifie encore au dieu Yahwé des Hébreux (> Voir). D'ailleurs on notera que ce Chnoubis était considéré comme un "écraseur de géants" ce qui est peut-être une allusion à la légende des géants détruits par Yahwé avec le déluge. (Cependant, à l'origine, Chnoubis / Chnoumis était juste un génie représentant le 3ème décan du cancer ou le 1er décan du lion dans l'astronomie égyptienne.)

Tout celà se raccorde bien avec les croyances des Gnostiques : Pour eux, le démiurge était le chef des sept archontes planètaires, comme Ahriman, et il avait une tête de lion. Et il était assimilable au dieu des Juifs et à la planète Saturne..
Dans un mithraeum de York, on a d'ailleurs retrouve la statue d'un dieu (dont la tête manquait) portant une ceinture en serpent, et son nom etait ecrit "Arimanius" (Ahriman. > Voir).

Dans les mitraeums, la statue de Mithra était souvent entourée de symboles astronomiques, indices possibles d'une influence chaldéenne : Deux porteurs de torche symbolisant le lever et le coucher du soleil, les 12 signes du zodiaque, divers animaux pouvant représenter des constellations équatoriales : corbeau, serpent, scorpion, taureau, chien, etc...
Celse (dans le "Discours véritable") racontait que, dans les mystères de Mithra, on montrait (et on montait) une échelle symbolique composée de sept portes (eptapylos) correspondant chacune à une planète et à un métal. (La aussi il semble y avoir une influences des idées astrologiques cjaldéennes); Du bas jusqu'en haut on avait :
- Porte de Saturne, en plomb.
- Porte de Vénus, en étain.
- Porte de Jupiter, en cuivre ou bronze.
- Porte de Mercure, en fer.
- Porte de Mars, en "alliage monétaire" (électrum ?)
- Porte de la Lune, en argent.
- Porte du Soleil, en or.
L'âme de l'initié devait traverser ces sept portes planétaires pour se dégager du monde matériel et se rapprocher progressivement du monde spirituel, (le ciel des étoiles fixes)... ce qui est un symbolisme trés proche de ceux de la Gnose.
Les initiés aux mystères de Mithra passaient par sept grades : Corbeau, Epoux (ou Griffon), Soldat, Lion, Perse, Héliodrome (Courrier du soleil) et Père. Ceux-ci étaient probablement mis en rapport également avec les sept planètes de l'échelle.

Cette correspondance entre les planètes et les métaux semble avoir eu une grande extension.
Elle semble dériver du mythe des "quatre ages de l'humanité", que l'on retrouve chez plusieurs peuples :

 Selon l' Avesta Perse Selon Hésiode Selon Daniel (Bible)  En Inde
 Age d'or   Age d'or   Age d'or  Krita yuga
 Age d'argent  Age d'argent   Age d'argent  Trétâ Yuga
Age d'acier  Age de bronze   Age d'airain  Dvâpara Yuga
Age de fer (aliage)  Age de fer   Age de fer  Kali yuga

Ce système, inspiré peut-être des quatre saisons, sera ensuite étendu par les Mages pour correspondre aux sept planètes des Chaldéens. Il sera ensuite repris et modifié par plusieurs générations d'alchimistes

Les sept planètes Les jours de la semaine Les cycles selon l'Avesta Perse (2ème version) Pindare, Zosime, Proclus, Olympiodore (4-6e s) et les Perses Stephanus d'Alexandrie (7e siecle) et ses suivants
Soleil Dimanche AGE D'OR  4.Or  4.Or
Lune Lundi AGE D'ARGENT  7.Argent  7.Argent
Mars Mardi Age de bronze  3.Fer  3.Fer
Mercure Mercredi Age de cuivre  6.Etain  6.Vif argent
Jupiter Jeudi Age d'étain  2.Electrum  2.Etain
Venus Vendredi AGE D'ACIER  5.Cuivre  5.Cuivre
Saturne Samedi AGE DE FER  1.Plomb  1.Plomb

Les Mages s'étant atiré ainsi une réputation de spécialistes en astrologie, il n'est pas étonnant qu'on parle d'eux jusque dans la Bible, lors de la naissance de Jésus (voir : Les "Rois-Mages").

Chez les Grecs ils étaient réputés aussi en "magie" et sorcellerie diverses. Selon Pline l'ancien ("Histoire Naturelle XXX, 2, 4 ; XXX, 5, 1"), le premier auteur sur la magie fut un certain Ostanes qui accompagnait Xerxès Ier dans son expédition contre la Grèce (480 av.JC). Hermodoros en faisait un magicien de la lignée de Zoroastre. Cet Ostanes disait qu'il y a plusieurs espèces de magie :
"La magie emploie l'eau, les globes, l'air, les étoiles, les lampes, les bassins, les haches, et beaucoup d'autres moyens ; toutes pratiques qui promettent la divination, et, en outre, les colloques avec les ombres et les enfers".(Pline, Histoire Naturelle xxx.2.8-10)
Bolos de Mendès (200av.Jc) a également rapporté aussi une parole de cet Ostanès :
"La nature se plaît dans la nature, la nature triomphe de la nature, la nature domine la nature;"

Selon Epiphane, les Mages s'étaient concentrés en Phrygie et Galatie, dans le centre de l'Anatolie. L'archéologie montre qu'il y en avait aussi en Commagène, Cappadoce, Pont, Pisidie, Cilicie, Lycaonie, etc ...C'est à dire dans la zone ou l'on trouve actuellement des Yazdanites, parents des anciens Gnostiques. Selon Epiphane, on trouvait des Mages jusqu'en Egypte (ce pays avait subi pendant quelques années la domination perse).

Cependant les Mazdéens et Chaldéens ne croyaient pas à la réincarnation. On ignore donc d'où cette croyance a pu être introduite chez les Gnostiques et Yazdanites. Peut-être provenait-elle des Orphiques ?