DOSSIER GNOSE :



La Gnose dans la Bible :                                                                      

 

Les spéculations gnostiques ont-elles eu une influence sur le Christianisme ?
Certaines thèses de la Gnose ont-elle pu s'introduire dans le Nouveau Testament ?
On pourrait penser que non, étant donné l'énergie avec laquelle l'Eglise a combattu les sectes gnostiques. ... Et pourtant ...


Les Epitres de Paul de Tarse :

Dans son "Epitre aux Corinthiens I; 2, 7-8", on remarquera que Paul parle en utilisant le même vocabulaire que les Gnostiques :

"... mais nous parlons de la Sagesse (Sophia) de Dieu en mystère, la Sagesse (Sophia) cachée, laquelle Dieu avait préordonnée avant les siècles pour notre gloire ; qu’aucun des Archontes de cet Eon n’a connue, car s’ils l’eussent connue, ils n’eussent pas crucifié le Seigneur de gloire..."

Paul aurait-il  subi des influencse gnostiques ? Ou alors cite-t-il un passage tiré d'un texte gnostique inconnu ?

A noter aussi que rares sont les passages, comme celui-ci, où Paul parle de Jésus crucifié. La plupart de ses textes parlent de Jésus comme d'un être abstrait, vivant dans le ciel, et non comme d'un homme ayant vécu physiquement sur terre... ce qui rapproche Paul des Gnostiques Docétiens, pour qui Jésus n'était qu'un être spirituel.

Et on touve encore d'autres épitres où Paul semble employer des termes d'allures gnostiques :

"...Lorsque vous étiez morts dans vos fautes et dans vos péchés, dans lesquels vous avez marché autrefois, selon le train de ce monde, selon l'Archonte de l’autorité de l’air, de l’esprit qui opère maintenant dans les fils de la désobéissance..."
(Ephésiens 2;1-2)

"Notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre les principautés, contre les Archontes, contre les dominateurs de ces ténèbres, contre la Puissance spirituelle de méchanceté (Cosmocrator) qui est dans les lieux célestes."
(Ephésiens 6;12)

"... et de connaître l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance ; afin que vous soyez remplis jusqu’à tout le Plérôme de Dieu."
(Ephésiens 3;19)

"... ayant dépouillé les principautés et les Archontes, il les a produits en public, triomphant d’eux par la croix."
(Colossiens 2;15)

"... ensuite la fin, quand il aura remis le royaume à Dieu le Père, quand il aura aboli les principautés, et les Archontes, et les puissances..."
(I Corinthien 15;24)

(A noter toutefois que l'"Epitre aux Colossiens" et l'"Epitre aux Ephésiens" ne sont peut-être pas de Paul.)

Quand au 2ème "Epitre aux Corinthiens", il semble également parler du mauvais archonte des gnostiques, qui s'oppose au vrai Dieu :

"... en lesquels le dieu de ce siècle ('dieu' sans majuscule) a aveuglé les pensées des incrédules, pour que la lumière de l’évangile de la gloire du Christ qui est l’image de Dieu ('Dieu' avec une majuscule) , ne resplendît pas pour eux."
(II Corinthiens 4;4)


L'Evangile selon Saint Jean :

On remarquera aussi que le début de l'Evangile selon Saint Jean contient énormément de "termes techniques" gnostiques :

"Au commencement était le Verbe (Logos); et le Verbe (Logos) était auprès de Dieu ; et le Verbe (Logos) était dieu (ou : "était divin").
Il était au commencement auprès de Dieu.
Toutes choses furent faites par lui, et sans lui pas une seule chose ne fut faite de ce qui a été fait.
En lui était la Vie (Zoé), et la Vie (Zoé) était la Lumière des hommes.
Et la Lumière luit dans les Ténèbres ; et les Ténèbres ne l’ont pas comprise."

Ce passage est d'ailleurs le seul de l'Evangie de Jean à être écrit en vers et non en prose; De plus il est mal relié au reste du récit où, nulle part, il n'est plus dit que Jésus soit le Logos.
Il est donc clair que ce texte ait été rajouté à l'Evangile alors qu'il provenait d'une source extérieure ... une source probablement gnostique.
D'ailleurs certains auteurs ont accusé le Gnostique Cérinthe d'être le vrai auteur de certainsl textes de Jean;

A propose du "Logos" (Verbe), on remarquera certains points intéressants :
Ce mot a été forgé par le philosophe grec Héraclite d'Ephèse (567-480 av.JC), pour qui il désignait à la fois la raison et la parole. Ce sera Philon d'Alexandrie (20 av.JC - 45 ap.JC) qui l'introduira ensuite chez les Juifs, ce mot désignant pour lui la pensée et la parole de Dieu. On peut d'ailleurs comparer ses idées avec celles de Jean l'évangéliste :

Philon : "Le Logos est le Fils de Dieu" (De Profugis).
Jean : "Ceci (la Parole) est le Fils de Dieu" (J 1, 34).

Philon : "Le Logos est considéré comme identique à Dieu" (De Somniis).
Jean : "Le Logos était Dieu" (J 1, 1).

Philon : "Il (le Logos) était avant toutes choses" (De Leg. Allegor.).
Jean : "Le même (le Logos) était au commencement avec Dieu" (J 1, 2).

Philon : "Le Logos est l'agent par lequel le monde a été créé" (De Leg. Allegor.).
Jean : "Toutes choses ont été faites par lui (le Logos)" (J 1, 3).

Philon : "Le Logos est la lumière du monde" (De Somniis).
Jean : "Le Logos était la vraie lumière" (J 1, 9).

Philon : "Seul le Logos peut voir Dieu" (De Confus. Ling.).
Jean : "
Aucun homme n'a vu Dieu ... Il (le Logos) l'a déclaré" (J 1, 18).

Le premier auteur à avoir intensément utilisé ce mot en philosophie était Plotin (204-270 ap.JC), un Néoplatonicien. A propose de la divinité, Plotin employait aussi le terme de "Noûs" (Intelligence) comme les Gnostiques :


"Psyché (l'âme) a une puissance et une énergie dérivée du Noûs (Intelligence divine)."

Pour Plotin, cette énergie de l'âme était le Logos :

"L'âme est le Logos du Noûs, et en quelque sorte son activité. comme le Logos proféré est le Logos du logos qui est dans l'âme, de même l'âme, elle aussi, est le Logos du Noûs, et toute son activité qu'il projette comme vie, pour conduire à l'existance quelque chose d'autre."

... Et pourtant Plotin méprisait la Gnose et de nombreux traités de ses "Ennéades" furent dirigés contre elle !

A noter aussi que Jean utilise souvent l'expression "le prince de ce monde". Mais celle-ci ne désigne peut-être pas le diable mais plutôt le démiurge des gnostiques. En effet ce nom se traduit exactement par "l'Archonte de ce monde" :

"Maintenant est le jugement de ce monde ; maintenant l'Archonte de ce monde sera jeté dehors."
(Jean 12;31)

"Je ne parlerai plus beaucoup avec vous, car l'Archonte du monde vient, et il n’a rien en moi."
(Jean 14;30)

"... de jugement, parce que l'Archonte de ce monde est jugé."
(Jean 16;11)


L'Apocalypse :

Dans l'Apocalypse 13;18, on trouve également ce passage célèbre évoquant le "nombre de la bête" :

"Ici est la sagesse. Que celui qui a de l’intelligence compte le nombre de la bête, car c’est un nombre d’homme ; et son nombre est six cent soixante-six."

Ce nombre "666" pourrait provenir du "signe de Chnoubis" utilisé par les gnostiques.
Chez les Egyptiens, Chnoubis ou Chnoumis était le nom d'un des décans du zodiaque, symbolisé par un serpent léontocéphale (>Voir). Plus tard il sera repris par les gnostiques qui l'identifieront avec le démiurge, chef des archontes. Son hiéroglyphe était le "signe de Chnoubis" : trois serpents traversés par une ligne horizontale. Plus tard celui-ci deviendra trois digammas / stigmas grecs (ou trois "S" latins) traversés par une droite (> Voir). Hors ces trois stigmas pouvaient se lire comme le chiffre 6.6.6. De plus, si on additionne la valeur numérique, en grec, de chacune des lettres du mot "Chnoubis", on obtient 1332, ce qui correspond à 2 X 666.
Mais le problème c'est que ce "nombre de la bête" ne peut s'écrire "6-6-6" qu'en numérotation décimale... hors celle-ci n'existait pas encore à cette époque. Il faut donc probablement se tourner vers une autre explication (>Voir).


L'Eucharistie :

Dans Marc 14;22-24, il est écrit :

"Et comme ils mangeaient, Jésus, ayant pris un pain et l'ayant béni, le rompit et le leur donna, et dit : Prenez ; ceci est mon corps. Et ayant pris la coupe et ayant rendu graces, il la leur donna; et ils en burent tous. Et il leur dit : Ceci est mon sang, celui de la nouvelle alliance, qui est versé pour plusieurs."

Il s'agit la, en fait, d'un rituel issu du culte de Mithra. En effet, dans le mithraisme, les disciples partageaient du pain et du vin, représentant le corps et le sang de Mithra, lors d'un banquet d'immortalité.
Cela est confirmé par Justin (mort en165) :

" ... après la présentation du pain et d'une coupe d'eau, comme le font les adeptes de Mithra, désormais nous nous remémorons toujours ces choses entre nous ; ceux qui ont du bien viennent en aide à tous ceux qui sont dans le besoin, et nous nous sommes toujours entre nous."

A ce propos, Justin le Martyr disait qu'on offrait alors du pain et une coupe d'eau en prononcant certaines formules :

"Et voila ce que les démons ont encore essayé d'imiter par l'institution des mystères de Mithra. Vous savez ou vous pouvez savoir que dans la célébration de ces mystères, on présente à l'initié du pain et de l'eau, en prononçant certaines paroles mystérieuses."

Cependant, dans les comptes du mithraeum de Doura, les archéologues observent que c'était les frais de pain et de vin qui venaient en tete. On avait donc bien affaire a du pain et du vin.

Et sur une tablette du culte de Mithra, on a lu ceci :

"Celui qui ne mangera pas de mon corps et ne boira pas de mon sang, de sorte qu'il sera fait un avec moi et moi avec lui, celui-la ne connaitra pas le salut."

Il est possible, cependant, que ce rituel ait transité par les Esséniens. Chez eux, en effet, il semble avoir existé un repas sacré au cours duquel avait lieu la bénédiction du pain et du vin.

 


La Trinité :

La Trinité est un concept qui est trés employé par le Christianisme alors qu'il n'apparait dans aucun passage authentique de la Bible; 
D'où vient alors ce concept ?
En fait c'est simple : C'est le gnostique Héracléon, disciple de Valentin, qui, vers 140 ap.JC, a parlé le premier d'une Trinité, composée du Père, du Fils et du Pneuma (Esprit).
La encore il s'agit d'une infiltration d'un concept gnostique à l'intérieur du Christianisme.


La divinité de Jésus :

Le concept du Chrit qui est Dieu et homme à la fois provient des affirmations de Simon le magicien, gourou des Gnostiques Hélléniens.

Pseudo-Tertullien, dans "Adversus omnes haereses", en dit ceci :

"Il osa se proclamer la Vertu Souveraine, c'est-à-dire le Dieu suprême. Il ajoutait que le monde avait été créé par ses anges ; que, grâce à un démon qui errait autour de lui, et qui était la sagesse, il était descendu chez les Juifs pour se faire reconnaître par ce peuple ; qu'il n'avait pas souffert sous le fantôme de Dieu, mais qu'il avait comme souffert."

Et Irénée, dans "Contre les Hérésies, Livre 1 chap. 23; 1-3", ajoute cela :

"C'était lui-même, enseignait-il, qui s'était manifesté parmi les juifs comme Fils, qui était descendu en Samarie comme Père et qui était venu parmi les autres nations comme Esprit Saint: il était la suprême Puissance, c'est-à-dire le Père qui est au-dessus de toutes choses, et il consentait à être appelé de tous les noms dont l'appelaient les hommes (...) Il descendit, en se métamorphosant et en se rendant semblable aux Principautés, aux Puissances et aux Anges : c'est ainsi qu'il se montra également parmi les hommes comme un homme, quoique n'étant pas homme, et qu'il parut souffrir en Judée, sans souffrir réellement."