CHRISTIANISME :



Le nombre de la bête :                                                           

 

 

Dans l'Apocalypse 13;18, on trouve ce passage célèbre évoquant le "nombre de la bête" :

"Ici est la sagesse. Que celui qui a de l’intelligence compte le nombre de la bête, car c’est un nombre d’homme ; et son nombre est six cent soixante-six."

Ce nombre "666" pourrait provenir du "signe de Chnoubis" utilisé par les gnostiques.
Chez les Egyptiens, Chnoubis ou Chnoumis était le nom d'un des décans du zodiaque, symbolisé par un serpent léontocéphale (>Voir). Plus tard il sera repris par les gnostiques qui l'identifieront avec le démiurge, chef des archontes. Son hiéroglyphe était le "signe de Chnoubis" : trois serpents traversés par une ligne horizontale. Plus tard celui-ci deviendra trois digammas / stigmas grecs (ou trois "S" latins) traversés par une droite (> Voir). Hors ces trois stigmas pouvaient se lire comme le chiffre 6-6-6". De plus, si on additionne la valeur numérique, en grec, de chacune des lettres du mot "Chnoubis", on obtient 1332, ce qui correspond à 2 X 666.

Le problème c'est que ce "nombre de la bête" ne peut s'écrire "6-6-6" qu'en numérotation décimale... hors celle-ci n'existait pas encore à cette époque.
En effet, en grec, ce nombre se prononcait "hexakosioi hexekonta hex" (six cent soixante-six), mais, en forme numérique, il s'écrivait "KHI-KSI-STIGMA" (100-60-6) et non pas "STIGMA-STIGMA-STIGMA" (6-6-6). Il fallait additionner les trois chiffres.
Celà rend donc l'explication par le "signe de Chnoubis" bien improbable, et même impossible.

Il faut savoir cependant que la forme « 666 » n'est pas la seule connue. Dans certains textes c'était la forme "616" (hexakosioi deka hex) qui était utilisée, le "IOTA" (10) remplaçant le "KSI" (60). Par exemple dans le Papyrus 115 d'Oxyrhynchus (225-275 ap.JC), le "De Monogramma Christi" attribué à Jérôme de Stridon, (347-420 ap.JC), le Codex C (5ème s. Ap. JC), ou le Codex Ephraemi Rescriptus (616 ap.JC). (Voir ICI, le Papyrus 115 / P4499 d'Oxyrhynchus. Source : Wikipedia)

Mais Irénée de Lyon (130-202 ap.JC), dans son "Adversus Haereses, Livre V, chap.30", vers 185 ap.JC, était pour le "666" et critiquait l'emploi du "616" :
"S'il en est ainsi, si ce chiffre figure sur toutes les copies se recommandant par leur ancienneté, si ceux qui ont vu Jean de leurs yeux attestent et si la raison nous enseigne que le chiffre du nom de la bête, compté à la manière des Grecs à l'aide des lettres que contient ce nom, est de six cent soixante-six, c'est-à-dire comporte un nombre de dizaines égal à celui des centaines et un nombre de centaines égal à celui des unités - car le nombre six conservé partout pareillement indique bien la récapitulation de toute l'Apostasie perpétrée au commencement, au milieu des temps et à la fin -, je ne sais comment certains ont pu se fourvoyer sous l'impulsion d'une opinion particulière et répudier le nombre médian, retranchant de celui-ci cinquante unités et ne voulant qu'un dizaine au lieu de six. Sans doute y a-t-il eu là une erreur de scribe, telle qu'il s'en produit couramment du fait que les chiffres sont écrits aussi au moyen de lettres: car la lettre KSI (60) s'étend facilement de manière à former un IOTA (10). Certains ont ensuite accepté le nouveau nombre sans plus ample examen: les uns l'ont utilisé simplement et sans arrière-pensées; les autres, dans leur sottise, se sont aventurés jusqu'à chercher des noms ayant ce nombre erroné."

Le "666" se trouvait également dans le papyrus P47 de la collection Chester Beatty (200 ap.JC), dans le Codex Sinaiticus (IVème siècle ap.JC), la Vulgate (390-405 ap.JC) et le Codex Alexandrinus (400-440 ap.JC), ainsi que dans les versions syriaque, copte, arménienne et éthiopienne.

Cependant, chez Césaire d'Arles (470-542 ap.JC), on lisait encore une autre variante : "690".
Et dans le manuscrit MS2344 (XIème siècle ap.JC) on trouvait la forme "665".
Et dans le Codex AR (IXème siècle ap.JC) on vait même "646".

Mais que signifiait ce "nombre de la bête" ?
C'était un code. En grec ancien, tout comme en hébreu, les lettres de l'alphabet servaient également à indiquer les chiffres. Il était donc possible de coder les mots en donnant leur valeur numérique : c'était la science de la gématrie.
Le "666" pouvait donc désigner une personne car il était dit que c'était un "nombre d'homme". Et on pense que cette personne était Néron. Celui-ci était mort en 68 ap.JC, mais certains croyaient à son retour prochain.
Hors, en grec, le nom Néron Claude Auguste s'écrit "NERON KLAUDIOS SEBASTOS", ce qui, transformé en nombre fait en effet 666.
Et le grec "Caesar Neron" s'écrit "NRON QSR" en hébreu, et ce nom, transformé en nombre, donne aussi "666".
Par contre en latin populaire on peut également écrire "Caesar-Nero", soit "NRO QSR" en hébreu, et cela donne "616" en nombre. On retrouve ainsi la possibilité de cette autre version.

Mais ce sera le "666" qui sera finalement retenu car il peut symboliser l'imperfection face au "777" qui représente la perfection. Et dans les "Oracles Sibyllins, 1;324-331", il est dit que 666 est le chiffre du diable, mais que 888 est le chiffre de Jésus et de la perfection. En grec, en effet, son nom IHSOUS (IOTA-ETA-SIGMA-OMICRON-UPSILON-SIGMA) correspond bien à ce nombre.

En tout cas il est une chose à retenir :
Si la "bête" correspond bien à Néron alors ça signifie que l'Apocalypse a été écrite peu de temps avant ou aprés sa mort en 68 ap.JC, ce qui fait plus tôt que ce que l'on croyait. Mais ça signifie également que cette prophétie qui annoncait son retour est tombée à l'eau.

Vous voulez un autre exemple de l'emploi de la gématrie en hébreu ?

Dans Genèse 14;14-16 et15;1-4, il est écrit ceci :

"Et Abram apprit que son frère (son neveu Lot) avait été emmené captif, et il mit en campagne ses hommes exercés, trois cent dix-huit hommes, nés dans sa maison, et poursuivit les rois jusqu'à Dan ; et il divisa sa troupe, et se jeta sur eux de nuit, lui et ses serviteurs, et il les frappa, et les poursuivit jusqu'à Hoba, qui est à la gauche de Damas. Et il ramena tout le bien, et ramena aussi Lot, son frère, et son bien, et aussi les femmes et le peuple (…)
Après ces choses, la parole de l'Éternel fut adressée à Abram dans une vision, disant : Abram, ne crains point ; moi, je suis ton bouclier et ta très-grande récompense. Et Abram dit : Seigneur Éternel, que me donneras-tu ? Je m'en vais sans enfants, et l'héritier de ma maison, c'est Éliézer de Damas. Et Abram dit : Voici, tu ne m'as pas donné de postérité ; et voici, celui qui est né dans ma maison est mon héritier. Et voici, la parole de l'Éternel vint à lui, disant : Celui-ci ne sera pas ton héritier ; mais celui qui sortira de tes entrailles, lui, sera ton héritier."


Hors Rachi a apporté une explication sur ce passage dans « Genèse Rabbah 43: 2, Ned. 32a » :

"Nos Sages ont dit : C'était Eliezer seul, et le nombre 318 est la valeur numérique de son nom."

Et dans "Nedarim 32a", il est écrit ceci :

"Trois cent dix-huit : R. Ammi b. Abba a dit : Eliezer l'emportait sur tous. D'autres disent, c'était Eliezer, car c'est la valeur numérique de son nom."

Il semble donc que la valeur numérale des lettres formant le nom "Eliézer" est 318, c'est à dire exactement le nombre des "hommes exercés" d'Abram.
Donc soit le nom "Eliézer" ne désigne pas un homme mais un groupe de 318 hommes, soit c'est la troupe armée d'Abram qui était constituée d'un seul homme appelé Eliézer et non pas de 318 guerriers. En tout cas, les 318 hommes, tout comme Eliézer, sont dits "nés dans la maison", c'est à dire qu'ils sont des fils adoptifs d'Abram.

On ignore quel sens et quel enseignement il fallait tirer de ce passage codé.
Mais cela indique une chose : A l'époque où ce passage a été écrit, les Hébreux utilisaient déjà le système de la gématrie.
Hors on pense que c'est Pythagore (580-495 av.JC) qui a inventé la numérologie, bien avant que celle-ci soit adoptée par les Hébreux sous le nom de "gématrie". Cela indique apparemment que la Genèse n'aurait pas été composée à une date très reculée.