La
légende du Phénix :
Le Phénix occidental classique :
Le mythe du Phénix est apparu d'abord
en Egypte avant de se répendre chez les Grecs puis
les Romains.
Chez les Egyptiens, le Phénix était appelé
"Benou / Bennu". Son nom venait peut-être
de la racine "webwn" signifiant "briller".
(> Voir des images
du benou)
Pendant l'Ancien Empire égyptien, le
Benou avait la forme d'une bergeronnette printannière
(Motacilla flava); celle-ci, selon les "Textes des pyramides"
symbolisait le dieu solaire Atoum / Ra.
L'oiseau Benou représentait aussi la planète
Vénus qui précède le Soleil pour le guider.
Un passage du "Livre des morts" dit ceci : "...
Que j'aille comme un faucon, et que je vienne comme le Benou,
l'étoile du matin (Vénus) de Ra, car je suis
comme le Benou qui est dans Héliopolis."
Les Grecs prétendront que le Phénix / Benou
était capable de renaitre aprés son immolation
dans un bûcher. Cette régénération
par le feu provenait probablement d'un symbolisme égyptien
mal compris puisqu'à l'origine le Benou était
la planète Vénus qui disparait chaque jour dans
l'incendescence de l'aurore avant de réapparaitre le
lendemain.
Au moyen Empire égyptien, le Benou
prendra l'aspect d'une héron cendré (ardea cinera),
de couleur beige, grise ou bleue, avec une double aigrette
sur la tête. Il est alors considéré comme
le "Ba" du dieu solaire Ra d'Héliopolis.
(le "Ba" est une sorte d'âme en forme d'oiseau,
il est aussi la forme sous laquelle le dieu peut se manifester
à distance... un peu comme les "anges"
du dieu Yahwé).
Dans le "Livre des morts", il est écrit :
"Je suis le Benou, le Ba de Ra,
et le guide des dieux dans la Douat (monde des morts)..."
Les Egyptiens pensaient que le Benou vivait sur la pierre
Benben d'Héliopolis. Au commencement du monde, il aurait
survolé les eaux primordiales (Noun) et rompu le silence
par son premier cri. Alors la première motte de terre
aurait émergé et il aurait pu se poser dessus,
représentant ainsi le premier lever de soleil sur la
terre (ce monticule primordial étant symbolisé
par la pierre Benben pyramidale d'Héliopolis). Ce monticule
était aussi appelé l'"île de la flamme"...
ce qui explique peut-être que les Grecs aient cru que
le Benou / Phénix venait à Héliopolis
pour s'immoler sur un bûcher.
Selon le "Livre des morts", l'oiseau Benou apparait
chaque matin sous la forme du soleil levant, puis il brille
sur le monde du haut de l'arbre Ished d'Héliopolis
où il se régénère. Cet arbre est
le persée / avocatier sacré d'Héliopolis
sous lequel le "Grand Chat d'Héliopolis"
avait tué le serpent Apophis, ennemi du dieu-soleil.
Le Benou sera aussi considéré
par les Egyptiens comme une manifestation d'Osiris ressuscité,
probablement à cause de la ressemblance symbolique
entre la régénération de l'oiseau-Benou
et la régénération du dieu Osiris. L'oiseau
Benou est alors représenté portant la couronne
"Atef" d'Osiris. On disait alors de lui : "Il
est le fameux Ba qui est sorti du coeur d'Osiris.".
On racontait également que le Benou, lorsqu'il était
descendu sur le tertre primordial, s'était posé
sur un Tjeret, c'est à dire un saule, arbre consacré
à Osiris;
La stèle de Metternich contient une allusion à
ce mythe :
"Tu es le grand Benou qui est
né sur les branches de l'arbre Tjeret dans la maison
du grand prince à Héliopolis"..
Et la planète Vénus sera parfois appelée
"l'étoile du bateau du Benou-Osiris".
Plus tard les Grecs adopteront le Benou sous
le nom de Phénix / Phoénix / Phoïnix (="Rouge")
en lui donnant l'aspect d'un aigle.
Ils disaient que le Phénix est un oiseau unique et
solitaire car il ne peut en exister qu'un à la fois.
Et il ne se reproduit pas car seule sa mort fera apparaitre
un autre phénix.
Ils l'associaient à leur dieu solaire Appolon : A l'aube,
chaque matin, le Phénix chantait une chanson tellement
belle que le dieu Soleil arrétait son char pour l'écouter.
Le premier Grec a avoir parlé du Phénix
est Hésiode, vers 640 av.JC :
"La corneille babillarde vit neuf
générations d'hommes florissants de jeunesse
; le cerf vit quatre fois plus que la corneille ; le corbeau
vieillit pendant trois âges de cerf ; le Phénix
vit neuf âges du corbeau et nous vivons dix âges
de phénix, nous, Nymphes aux beaux cheveux, filles
de Zeus armé de l'égide."
Si on prend 25 ans comme la durée d'une génération
humaine, alors ce calcul donne 24300 ans comme durée
de vie du phénix ... ce qui se rapproche de la durée
du cycle de déclinaison des équinoxes.
Ensuite viendra Herodote (483-425 av.JC).
2, 73, 1 :
"... Un autre oiseau sacré
est le phénix (phoïnix); Je n'en ai vu aucun,
sauf sur des peintures, parce qu'il est très rare et
vient dans le pays tous les
cinq cents ans seulement, à ce que disent les gens
d’Héliopolis; lorsque son père meurt.
S’il est tel qu’on le peint (.....) voici quelles
seraient sa grandeur et son apparence: les plumes de ses ailes
sont les unes couleur d’or, les autres d’un rouge
vif; pour la silhouette et la taille, il ressemble de très
près à l’aigle. On raconte de lui –
à mon avis c’est un récit incroyable –,
qu’il accomplirait cet exploit: partant de l’Arabie,
il transporterait au sanctuaire d’Hélios (le
Soleil) le corps de son père enveloppé de myrrhe,
et l’ensevelirait dans ce sanctuaire. Et, pour le transporter,
il s’y prendrait de manière suivante; il façonnerait
d’abord avec la myrrhe un œuf, de la grosseur de
ce qu’il peut porter, et s’essaierait ensuite
à voler avec cette charge; l’épreuve faite,
il creuserait l’œuf et y introduirait son père;
puis, avec d’autre myrrhe, il enduirait la partie de
l’œuf qu’il aurait creusée et par
où il aurait introduit son père, dont l’introduction
rétablirait le même poids; et, enveloppé
de la sorte, il le transporterait en Égypte au sanctuaire
d’Hélios. Voilà, dit-on, ce que fait cet
oiseau. "
Un passage de l'Exode d’Ézéchiel
le Tragique (IIe siècle av.JC) raconte que Moîse
rencontra un Phénix dans l'oasis d'Elim (ce passage
a été rapporté vers 254-269 ap.JC par
Eusèbe de Césarée, dans sa "Préparation
évangélique 9, 28-29") :
"... Là, nous avons encore
aperçu un animal étrange, merveilleux, tel que
personne n’en vit jamais de pareil. Il avait à
peu près le double de la taille de l’aigle, les
plumes des ailes de couleurs variées, la gorge pourpre,
les pattes d’un rouge vermillon et le cou s’ornant
d’une touffe couleur de safran. Sa tête était
pareille à celle de nos coqs. Ses yeux semblaient lancer
des reflets d’émeraude: sa prunelle flambait
comme un rouge kermès. Son chant était de tous
le plus harmonieux, et des êtres ailés il paraissait
le roi. On n’en pouvait douter car, se pressant ensemble,
tous les oiseaux, tremblants, s’élançaient
à sa suite. Lui marchait devant eux, aussi fier qu’un
taureau, et ses pieds, en marchant, faisaient des pas rapides."
Puis les Romains s'intéressèrent
également au Phénix, en se basant surtout sur
les textes grecs :
Dans "Les Métamorphoses", Ovide (43 av.JC
- 17 ap.JC) raconte ceci :
"... Il y a un oiseau, un seul,
qui se renouvelle et se recrée lui-même; les
Assyriens l’appellent le phénix; il ne vit ni
de grains ni d’herbes, mais des larmes de l’encens
et du suc de l’amome. À peine a-t-il accompli
les cinq siècles assignés à son existence
qu’aussitôt, posé sur les rameaux d’une
yeuse ou la cime oscillante d’un palmier, il construit
un nid avec ses ongles et son bec pur de toute souillure.
Là il amasse de la cannelle, des épis de nard
odorant, des morceaux de cinname, de la myrrhe aux fauves
reflets; il se couche au-dessus et termine sa vie au milieu
des parfums.
Alors du corps paternel renaît, dit-on, un petit phénix
destiné à vivre le même nombre d’années.
Quand l’âge lui a donné assez de forces
pour soutenir un fardeau, il décharge du poids de son
nid les rameaux du grand arbre et il emporte pieusement son
berceau, qui est aussi le tombeau de son père; parvenu
à travers les airs légers à la ville
d’Hypérion, il le dépose devant la porte
sacrée de son temple."
Pomponius Méla (vers 43 ap.JC) rapporte
cela :
"... Devenu grand, il s’en
va porter en Égypte les ossements de son ancien corps
enrobés de myrrhe et, les déposant, dans une
ville appelée la Ville du Soleil, sur les bûchers
enflammés d’un autel, les consacre par de mémorables
funérailles."
Pline l'ancien (23-79 ap.JC), dans son "Histoire
naturelle X, 2", ajoute plein de détails :
"Le plus célèbre
de tous naît dans l'Arabie : c'est le Phénix,
si toutefois son existence n'est pas une fable; il est unique
dans l'univers entier, et on ne l'a pas vu souvent. On lui
donne la taille de l'aigle, un plumage éclatant comme
l'or autour du cou; du reste, pourpre, une queue d'azur entremêle
de plumes roses, des crêtes sous la gorge, et une huppe
qui pare sa tête. Le premier parmi les Romains qui en
ait parlé, et le plus exact, est Manilius, ce sénateur
si célèbre par les connaissances qu'il ne devait
qu'a lui seul : il dit que personne ne l'a vu mangeant; qu'en
Arabie il est consacré au Soleil; qu'Il vit cinq cent
neuf ans ; que vieillissant il se construit un nid avec des
branches de cannelle et d'encens; qu'Il le remplit de parfums,
et qu'il meurt dessus; que de ses os et de sa moelle il naît
d'abord une sorte de vermisseau qui devient un jeune oiseau;
que d'abord il rend les honneurs funèbres à
son prédécesseur; qu'il porte le nid tout entier
près de la Panchaïe, dans la ville du Soleil,
et qu'il le dépose sur un autel. Le même Manilius
expose que la révolution de la grande année
s'accomplit avec la vie de cet oiseau; qu'alors une nouvelle
période, avec les mêmes caractères, s'ouvre
pour les saisons et les astres, et qu'elle commence à
midi le jour ou le soleil entre dans le signe du Bélier.
Il ajoute que cette période était à sa
deux cent quinzième année sous le consulat de
P. Licinius et de Cn. Cornelius (an de Rome 657 / 96 av.JC),
moment ou il écrivait. Cornéiius Valérianus
a rapporté que le Phénix passa en Égypte,
sous le consulat; de Q. Plautius et de Sex. Papinius (an de
Rome 789 / 36 ap;JC). Cet oiseau fut apporté à
Rome pendant la censure de l'empereur Claude, l'an 800 de
Rome (47 ap.JC), et on l'exposa dans les comices, ce qui est
attesté par les Actes; mais personne ne doute que ce
ne fût un faux Phénix."
Pline explique donc que, pour les Romains,
le cycle de vie du Phénix correspond à la durée
de la "grande année". Celle-ci est la période
au bout de laquelle les différents cycles cosmiquent
retournent simultanément à leur configuration
initiale. Et comme chaque auteur la calcule différemment,
il n'est pas étonnant que chaque écrivain accorde
une durée différente à la vie du Phénix;
Tacite (55-120 ap.JC), dans "Les Annales
6;28", commente le faux retour du Phénix inventé
pour la mort de Tibère en 37 ap.JC :
"Sous le consulat de Paulus Fabius et de Vitellius, parut
en Égypte, après une longue période de
siècles, le phénix, oiseau merveilleux qui fut
pour les savants grecs et nationaux le sujet de beaucoup de
dissertations. Je rapporterai les faits sur lesquels ils s'accordent,
et un plus grand nombre qui sont contestés et qui pourtant
méritent d'être connus.
Le phénix est consacré au soleil. Ceux qui l'ont
décrit conviennent unanimement qu'il ne ressemble aux
autres oiseaux, ni par la forme, ni par le plumage. Les traditions
diffèrent sur la durée de sa vie. Suivant l'opinion
la plus accréditée, elle est de cinq cents ans.
D'autres soutiennent qu'elle est de quatorze cent soixante
et un.
Le phénix parut, dit-on, pour la première fois
sous Sésostris, ensuite sous Amasis, enfin sous Ptolémée,
le troisième des rois macédoniens ; et chaque
fois il prit son vol vers Héliopolis, au milieu d'un
cortège de nombreux oiseaux de toute espèce,
attirés par la nouveauté de sa forme. Mais de
telles antiquités sont pleines de ténèbres.
Entre Ptolémée et Tibère, on compte moins
de deux cent cinquante ans. Aussi quelques-uns ont-ils cru
que ce dernier phénix n'était pas le véritable,
qu'il ne venait pas d'Arabie, et qu'on ne vit se vérifier
en lui aucune des anciennes observations. On assure, en effet,
qu'arrivé au terme de ses années, et lorsque
sa mort approche, le phénix construit dans sa terre
natale un nid auquel il communique un principe de fécondité,
d'où doit naître son successeur. Le premier soin
du jeune oiseau, le premier usage de sa force, est de rendre
à son père les devoirs funèbres. La prudence
dirige son entreprise. D'abord il se charge de myrrhe, essaye
sa vigueur dans de longs trajets, et, lorsqu'elle suffit à
porter le fardeau et à faire le voyage, il prend sur
lui le corps de son père, et va le déposer et
le brûler sur l'autel du soleil.
Ces récits sont incertains, et la fable y a mêlé
ses fictions. Néanmoins on ne doute pas que cet oiseau
ne paraisse quelquefois en Égypte."
Une des durées que Tacite donne à
la vie du Phénix est de 1461 ans, ce qui correspond
au fameux "cycle sothiaque" des Egyptiens. En Egypte,
en effet, l'année sothiaque commencait avec le lever
héliaque de l'étoile Sothis (Sirius) vers le
19 Juillet. (Le lever héliaque correspond à
l'instant de l'année ou l'étoile sort de la
zone de brillance du soleil et devient visible à l'oeil
nu) Le calendrier civil égyptien, cependant, était
basé sur une année de 365 jours et non pas 365,25
jours (il n'y avait pas de système d'années
bissextiles), ce qui entrainait un décalage progressif
entre les dates réelles sothiaques et les dates du
calendrier civil. On appelait donc ca l'"année
vague". Et ce n'est qu'au bout d'un cycle de 1461 ans
(cycle sothiaque) que le jour de l'an dans le calendrier sothiaque
et dans le calendrier civil / vague correspondaient à
nouveau... ce qui représentait symboliquement le"retour
du Phénix à Héliopolis".
On a calculé que de tels "retour du Phénix"
ont ainsi eu lieu en 2781 av.JC, 1321 av.JC et 139 ap.JC.
Lors de ce dernier retour, l'empereur Antonin le pieux fit
tirer une monnaie commémorative représentant
un Phénix avec la légende "AIÔN"
("Ere"). Cela permet de savoir que les Romains représentaient
le Phénix comme les Egyptiens : sous la forme d'un
héron. Mais ils ajoutaient un nimbe radié, symbole
solaire, autour de sa tête.( >Voir
la pièce )
Plus tard, Philostrate (3ème siècle
ap.JC) inventera une connection du Phénix avec l'Inde
:
“L’oiseau qu’on nomme
Phénix, et qui tous les cinq cents ans vient en Egypte,
vole dans l’Inde pendant tout cet espace de temps. Il
est le seul de son espèce. Il naît des rayons
du Soleil, est tout étincelant d’or, a la taille
et la forme d’un aigle, et se pose sur un nid qu’il
se fait lui-même avec des aromates près des sources
du Nil. Quant à ce que disent les Egyptiens, qu’il
passe dans leur contrée, cela est confirmé par
le témoignage des Indiens, qui ajoutent que le Phénix
se brûle dans son nid en se chantant à lui-même
son hymne funèbre. C’est ce que disent aussi
des cygnes ceux qui savent les écouter..”
Dans le Judaîsme, le Phénix porte
le nom de "Milcham".et il est le seul animal à
avoir gardé son immortalité oroginelle, n'ayant
jamais mangé le fruit défendu malgré
les solicitations de Eve.
Pour les premiers Chrétiens, le Phénix
est ensuite devenu le symbole de la résurrection de
Jésus. Et on lui a donné parfois une forme ressemblant
à une colombe.
En géorgien le Phénix est appelé
"Piniksi".
Dans le folklore russe, le Phénix deviendra le "Jar-ptitsa"
(l'oiseau de feu).
Chez les Arabes, le Phénix sera parfois connu sous
le nom de "Qûqnûs", nom issu de "Kuknos"
qui signifie "Cygne" en grec.
Le Phénix chinois :
Depuis au moins la fin de la synastie Shang
(1767-1122 av.JC), les Chinois connaissent un oiseau appelé
Feng-Houang, que les Occidentaux ont voulu identifier à
leur Phénix ... probablement à tort. Il était,
certe, un symbole solaire (on le disait né du Soleil
ou des flammes), mais il ne possède aucun pouvoir de
régénération. Par contre il était
considéré comme l'ancètre et le souverain
de tous les oiseaux On prétendait aussi qu'il
ne supportait ni le mensonge ni la violence et qu'il n'apparaissait
qu'en temps de paix et lorsque l'empereur était un
homme vraiment vertueux.
Le Chouo-Wen en disait ceci : "L'image
du Feng-Huang montre une grue par devant, une licorne femelle
par derrière, un cou de serpent et une queue de poisson,
le front d'un héron et la barde d'un canard mandarin
mâle, des dessins de dragon et un dos tigré,
une gorge d'hirondelle et un bec de poule. Il a au complet
les cinq couleurs et est originaire du pays oriental des hommes
de bien. Il vole ici et là, au-delà des quatre
mers, dépassant le kun-Lun,
buvant auprés de l'île Ti-Tchou, trempant ses
plumes dans la mer de Jo-Chouei et passant la nuit dans la
caverne du vent."
On l'identifiait à l'"Oiseau vermillon"
/ "Oiseau de cinabre", symbolisant l'été,
le sud et l'élément feu.
Plus tard celui-ci deviendra aussi l'emblème de l'impératrice,
alors que le dragon,
symbole du printemps, de l'est et de l'élément
bois, deviendra l'emblème de l'empereur.
Le Phénix perse :
Un oiseau ressemblant au Phénix existait
également chez les Perses pré-islamiques. Il
s'agit du Simorg, Simurgh ou Sinmourgh (Semargl en slave,
Sen-margh en ossète). Dans l'Avesta son nom était
écrit "Marayô Saênô" (=
"l'oiseau Saêna") et en pahlavi il était
appelé "Sên Murw" (= "l'oiseau
Sên"). "Saêna" ou "Sên"
désignait probablement une espèce de rapace
à l'origine. Son équivelent chez les Arabes
prés-islamiques était l'oiseau Anqâ (un
héron ?).
Comme le Phénix chinois, on disait que le Simorg était
le roi de tous les oiseaux.
Comme le Phénix occidental, on disait qu'il vivait
trés vieux (1700 ans) et qu'il se régénérait
en se consumant dans les flammes. Il était même
si vieux qu'il aurait déjà vu trois fois la
destruction du monde. Plus tard on le dira même immortel.
On en faisait aussi l'ennemi mortel des serpents, ce qui le
rapproche de l'oiseau Garuda des Hindouistes : Ce Garuda était
en effet en guerre perpétuelle avec les serpents Nâgas.
Il était également le roi des oiseaux et servait
de monture au dieu Vishnu. Et c'est lui qui apportait l'Amrita
(Nectar d'immortalité) du ciel vers la terre. On notera
en plus que, dans les Veddas, l'ancien nom de Garuda était
"Syena", ce qui est la même racine que "Saêna".
On représentait parfois le Simorg comme un être
mi-chien mi-oiseau et on le faisait vivre sur l'arbre
de vie (porteur de toutes les graines) appelé "Vispubish"
/ "Harvisp Tokhmak" (ou sur le "Gaokerena",
arbre d'où on extrait le breuvage Haoma), situé
dans la mer de "Varoukâshâ" ou de "Farâkhkart".
La croyance au Simorg sera conservée
par les Perses aprés leur islamisation (...tout comme
la croyance à l'oiseau Anqa sera conservée par
les Arabes aprés leur islamisation). On dira alors
que son nid est situé dans l'arbre Tûbâ
(l'arbre de la connaissance)
qui pousse au sommet du mont
Qaf dans le monde de Malakût (Il s'agit du monde
imaginal où se trouvent les archétypes. Il est
cité dans les sourates coraniques VI:75 ; VII:185 ;
XXIII:88 et XXXVI:83).
Les mystiques Soufis feront alors du Simorg
le symbole du divin. Ainsi, dans son livre "Mantiq al
Tayr" ("La conférence des oiseaux"),
le Soufi Farid-ed-dîn Attâr (1146-1221) racontera
comment un groupe d'oiseaux (symbolisant les âmes humaines)
se lance dans un grand voyage pour rejoindre le Simorg, leur
roi (symbolisant Dieu); Aprés avoir traversé
les vallées de la Quête, de l'Amour, de la Connaissance,
du détachement, de l'Unité divine, de la Stupeur
et de l'Annihilation en Dieu, seuls trente survivants arriveront
à la "Station de Baqa", au sommet du mont
Qaf. Ils découvriront alors que le Simorg n'est
autre qu'eux-mêmes ... car "Si-morg" peut
se traduire par "Trente-Oiseaux".
Pour l'étymologie populaire, depuis au moins l'époque
de la Perse Sassanide, cette traduction par "Trente Oiseaux"
signifie que le Simorg est grand comme trente oiseaux. C'est
donc une créature gigantesque capable d'enlever des
chameaux et des éléphants. (Son équivalent
arabe, l'oiseau Anqâ, était également
considéré comme un géant).
De la vient probablement le mythe arabo-iranien de l' "Oiseau-Rokh"
ou "Rukh". Celui-ci apparait dans les "Contes
des mille et une nuits" et dans "Simbad le marin"
comme un oiseau gigantesque capable d'enlever des éléphants.
Marco Polo décrit ainsi ce qu'il a appris sur cet oiseau
:
"C'est pour tout le monde comme
un aigle, mais il est de taille énorme, si grand en
fait que ses piquants faisaient douze pas de long et étaient
épais en forte proportion. Et il est si grand qu'il
peut saisir un éléphant dans ses serres et l'enlever
dans les airs pour le laisser tomber afin qu'il soit mis en
pièces. Aprés l'avoir ainsi tué, l'oiseau
s'abat sur lui et le mange à loisir."
L'Oiseau-Tonnerre :
Certains font un rapprochement entre l'Oiseau-Rokh
des Perses et l'Oiseau-Tonnerre des Amérindiens ...
mais il est bien probable que les rapprochements ne soient
ici que des coîncidences.
On retrouve le mythe de l'Oiseau Tonnerre surtout sur la cote
nord-ouest des USA ainsi que dans la Grande Plaine. Mais en
fait ce mythe se retrouve, plus ou moins déformé,
dans la totalité des Amériques; il est bien
possible qu'il ait donc été une croyance trés
anciennes, apportée en Amérique par les premiers
Amérindiens lorsqu'ils sont arrivés par le détroit
de Béhring.
Cet Oiseau-Tonnerre est un être gigantesque
(capable de manger des baleines) qui produit le tonnerre par
le battement de ses ailes et les éclairs par les clignements
de ses yeux.
Selon les tribus, il est connu sous de nombreux noms divers
:
Achiyalaopa chez les iPueblos;
Alkuntam chez les Bella-Coola;
Animikii, Binesi ou Pinesi chez les Ojibwas.
Ba'a chez les Comanches.
Bebika chez les Guayakis d'Amérique du sud.
Chequah chez les Potawatomis.
Cullona chez les Malecites.
Culloo chez les Micmacs;
Dukwally ou Theukloots chez les Makahs et Wakashans.
Hahness chez les Chehalis et Salishs.
Huhuk chez les Pawnees et Caddoans.
Kunna-kat-eth chez les Tlingits.
Kwunusela chez les Kwakiutls et Wakashans.
Mechquan chez les Ossippees.
Met'co chez les Montagnais.
Nunyenunc chez les Shoshones,.
Nu-tugh-o-wik chez les Eskimos et Aléoutes.
Omaxsapiteau chez les Pieds noirs.
Pach-an-a-ho chez les Yakimas.
Piasa ou Pilhan-naw chez les Ossippees.
Sanuwa ou Tlanuwa chez les Cherokees et Iroquois.
Tse'na'hale chez les Navajos.
Yello-kin chez les Miwoks et Penutiens.
Wakinyan (waka-kinyan = ailes sacrées ?) chez les Sioux
Dakotas.
Cependant il est évident que ces oiseaux
n'ont pas de rapport avec notre Phénix.
L'aigle à deux têtes :
L'aspect solaire du Phénix le rapproche
également des rapaces solaires ayant donné naissance
au symbole de l'aigle impérial.
Un tel rapace était ainsi connu en Egypte : le dieu-faucon
Horus, qui représentait le soleil et le ciel diurne.
En Syrie ancienne l'aigle était considéré
comme le serviteur du soleil et chez les Grecs il était
l'oiseau du dieu Zeus..
Aux Amérique le rapace solaire était également
connu. Ainsi, chez les Aztèques on trouvait deux corps
d'élite dans les armées : les guerriers-aigles
et les guerriers-jaguars. L'aigle symbolisait le ciel diurne
et le jaguar symbolisait le ciel nocturne. Ou alors l'aigle
représentait le ciel et le jaguar représentait
le monde souterrain. L'aigle correspondait aussi au dieu Huitzilopochtli
alors que le jaguar correspondait au dieu Tezcatlipoca.
Chez les Incas, l'aigle solaire était remplacé
par le condor, et la fusion du jaguar (ou du puma) et du condor
formait l'animal mythique appelé "wari".
Et en Amérique du nord, le peuple des Mound-builders
opposait le faucon solaire au lapin lunaire (le lapin lunaire
était également connu des Aztèques et
des Chinois).
Le rapace solaire, roi du ciel, étant symbole de force
et de domination, il sera souvent employé comme emblème
militaire, royal ou impérial. Par exemple chez les
Perses, les Epirotes puis les Romains. Et même dans
l'Empire Napoléonien et les USA.
Mais chez les Sumériens de Lagash, il prendra une nouvelle
forme : celle de l'aigle à deux têtes de la déesse
Bau ( > Voir
), dérivant probablement de l'aigle léontocéphale
Imgig ( > Voir
) du dieu Ningirsu. Cet emblème sera repris par les
Hittites ( > Voir
) chez qui il sera la monture de Kurunta / Ruwata / Runda (le dieu de la chasse et de la chance) et le symbole de Haran (l'envoyé
du soleil). Ensuite il sera adopté par les Grecs Mycéniens ( >
Voir ).
Après la destruction de l'Empire Mycénien par
les Doriens et de l'Empire Hittite par les Mushkis, ce symbole
connaitra une éclipse avant de renaître chez
les Arméniens, probables descendants de ces Mushkis.
L'aigle bicéphale sera ainsi utilisé par les
Arsacides d'Arménie (I-IVèmes siècles
ap.JC) puis par les sparapets Mamikoniens d'Arménie
(IV-VIIIèmes siècles ap.JC). Cependant les Romains
l'ignoreront et préfèreront utiliser l'aigle
monocéphale comme emblème de leur empire.
Plus tard, aprés une autre éclipse, le symbole
de l'aigle impérial bicéphale serait réapparu,
par on ignore quel chemin, chez le comte Anglo-Saxon Léofric
de Mercie (1017-1057). Il semble cependant que ce soit une
légende : en fait son emblème n'était
qu'un aigle à une tête.
C'est dans l'Empire des Turcs Seldjoukides de Rum (1058-1307), en fait, que l'on retrouve les traces de l'aigle à deux
têtes ( >
Voir ). Il était alors identifié
avec l'oiseau Hamca, dérivant probablement du Haga,
l'oiseau géant à deux têtes connu en Paphlagonie
(Nord de l'Asie mineure) et dont le nom dérive de l'oiseau
Anqa des Arabes.
Sous l'influence des Turcs Seldjoukides, l'empereur byzantin
Isaac Commène (1057–1059) adoptera également
cet emblème pour remplacer l'ancien aigle monocéphale
hérité des Romains. L'aigle à deux tête
sera alors employé comme symbole de la domination byzantine
à la fois sur l'Orient et l'Occident (ou comme symbole
du règne à la fois séculier et religieux
de l'Empereur). On le retrouvera chez les dynasties byzantines
des derniers Commènes (1081-1185) puis des Anges (1185-1204).
( > Voir )
Les Byzantins Laskaris de Nicée (1204-1261) l'utiliseront
encore mais les Croisés Flamands, envahisseurs de l'Empire
Byzantin (1204-1261), s'en empareront. C'est ainsi que les
deux filles du premier empereur latin de Constantinople (Byzance)
l'emporteront en Occident, l'une en Flandre, l'autre en Savoie.
Et c'est pourquoi ce symbole sera employé, au milieu
du XIIIème siècle, par Othon, compte de Gueldre
et de Looz, et par 0Robert de Thourotte, évèque
de Liège. L'aigle bicéphale arrivera ainsi dans
le Saint Empire Romain-Germanique qui l'adoptera vers 1345
(ou déjà vers 1250 ?), en remplacement de son
ancien aigle monocéphale (datant de 1155). Il symbolisera
alors l'union de l'Eglise et de l'Etat ( > Voir ).
La Russie adoptera ensuite l'aigle bicéphale lors du
mariage d'Ivan III (1440-1505) avec la princesse byzantine
Zoé Sophie Paléologue en 1472, Moscou devenant
ainsi la "3ème Rome", l'héritière
de l'Empire byzantin (les deux têtes de l'aigle représentant
Rome et Byzance). ( >
Voir )
L'Autriche, l'Espagne, la Serbie, le Montenegro, la Bulgarie,
l'Albanie, etc... adopteront également l'aigle à
deux tête comme emblème ( >
Voir ).
En Inde cet oiseau mythique sera également connu, sous
le nom de "Gandaberuda / Gandabherunda" ( > Voir )
depuis au moins l'an 1047 ap.JC. Il y est considéré
comme un avatar du dieu Vishnu.
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