L'énigme
des enfants verts :
Un après-midi du mois d'août 1887, deux enfants
sortirent d'une grotte située aux alentours du village
de Banjos en Espagne. Ils marchaient en se tenant par la main
et traversèrent un champ où des paysans étaient
en train de moissonner.Ils avaient l'air craintif et ils parlaient
un langage incompréhensible. Leurs vêtements
étaient faits d'un tissu inconnu et leur peau était
complètement verte.
Les moissonneurs étaient en train de se reposer après
leur repas, quand le petit couple apparut à l'entrée
de la grotte. N'en croyant pas leurs yeux, les paysans se
précipitèrent vers les enfants qui, épouvantés,
se mirent à courir pour leur échapper. Après
les avoir attrapés, ils les conduisirent chez Mr Ricardo
Da Calno, un magistrat qui était le plus gros propriétaire
du pays (ou le juge de paix, selon une autre version). Mr
Da Calno prit la main de la petite fille, la frotta énergiquement,
mais la couleur verte ne disparut pas.
Les enfants refusèrent de manger ce qu'on leur proposait
mais ils touchèrent avec leurs doigts le pain et les
fruits en paraissant très intrigués.
Le magistrat remarqua que les traits de leur visage étaient
réguliers et assez semblables à ceux des peuplades
nègres. Leurs yeux étaient taillés en
amande et très enfoncés dans les orbites.
Les enfants demeurèrent six jours chez Mr Da Calno,
mais ils ne mangèrent rien et s'affaiblirent. On ne
trouvait pas d'aliment qui leur convînt. Un jour, on
leur apporta des haricots et ils se jetèrent dessus
avidement. Ils ne touchèrent jamais à autre
chose comme nourriture.
Ce jeûne avait tellement affaibli le garçon qu'il
mourut un mois après sa sortie de la grotte. La fille
elle, grandit normalement et devint domestique chez Mr Da
Calno. Sa couleur verte diminua d'intensité et plus
personne ne fit attention à elle. Elle finit par apprendre
quelques mots d'espagnol et elle put donner de vagues explications
sur elle-même : Le mystère n'en fut pas éclairci
pour autant.
Elle déclara quelle venait d'un endroit où il
n'avait pas de soleil et où il ne faisait ni jour ni
nuit donc où il y avait on suppose, un crépuscule
permanent. Elle dit: "Il y a un pays éclairé
pas loin de nous mais nous sommes séparés de
lui par un fleuve très large." Lorsqu'on lui demanda
comment elle était arrivée ici, elle répondit:
"Il y a eu un grand bruit. Nous avons été
pris dans un tourbillon et nous nous sommes trouvés
dans la grotte près du le champ de blé."
Elle vécut pendant cinq ans et mourut en 1892. Elle
fut enterrée à côté de son frère.
On peut douter de l'authenticité de cette affaire car
Javier Sierra du magazine "Mâs Allâ"
a fait une enquête sur l'affaire. Il en ressort que
le village de Banjos n'a jamais existé en Espagne et
que le seul endroit portant un nom plus ou moins similaire
est Banyoles, où l'histoire n'est pas connue.
En fait on s'est appercu que cette histoire d'enfants verts
en Espagne au XIXe siècle n’est qu’un plagiat
d’une histoire anglaise du XIIe siècle : Celle
des enfants verts de Woolpit (ville du Suffolk, qui se trouve
près de Bury Saint Edmonds) vers 1173.
Cette histoire est racontée dans le texte de William
de Newburgh ( 1136-1198 ou 1201 ), dans «Historia Rerum
Anglicarum » ( republié en 1618 ) :
"Je me dois ici de n'omettre une
merveille, un prodige dont on n'a entendu parler depuis l'aube
des temps, qui est connu pour s'être passé sous
le Roi Stephen (1135 à 1154). J'ai moi-même longtemps
hésité à lui accorder crédit,
bien qu'il ait été ébruité à
l'étranger par beaucoup de gens, et je pensais qu'il
était ridicule d'accept une chose qui n'avait aucune
raison d'être recommandée, ou au mieux avait
des raisons d'être très obscure, jusqu'à
ce que je fus tant submergé par le poids de tant de
témoins crédibles que je fus obligé de
croire et d'admirer ce que mon esprit tâche vainement
d'atteindre ou de suivre.
Il y a un village en Angleterre à quelques 4 ou 5 miles
du noble monastère du Roi Béni et du Martyre
Edmund, près duquel pourraient être vues certaines
tranchées d'antiquité immemoriale nommées
Wolfpittes dans la langue anglaise, et qui ont donné
leur nom à la ville adjacente. Lors d'une moisson,
alors que les moisonneurs se rassemblaient dans le maïs,
rampèrent hors de ces deux tranchées un garçon
et une fille La fille âgée de 10 ans environ,
le garçon plus jeune, verts en tous points de leur
corps, et dotés de vêtements Semblables à
des robes, selon Rodney Davies dans Supernatural Disappearances,
de teinte étrange et de texture inconnue.
Ceux-ci errèrent éperdumment aux alentours du
champ, jusqu'à ce que les moisonneurs les prennent
et les emmènent au village, où nombre affluèrent
pour voir cette merveille, ils furent gardés pendant
des jours sans nourriture. Mais, lorsqu'ils furent presque
morts de faim, et ne pouvaient toujours pas goûter aucune
espèces qui leur étaient offertes pour les soutenir,
il arriva que des haricots furent apportées du champ,
qu'ils saisirent immédiatement avec avidité,
et examinèrent la tige, mais ne trouvant rien dans
le creux de la tige, ils pleurèrent amèrement.
Sur ce, un des spectateurs, prenant les fèves dans
les cosses, les offrit aux enfants, qui les saisirent directement,
et les mangèrent avec plaisir. Par cette nourriture
ils furent soutenus durant de nombreux mois, jusqu'à
ce qu'ils apprennent l'utilisation du pain.
A la longue, par degrés, ils changèrent leur
couleur d'origine, à travers l'effet naturel de notre
nourriture, et devinrent comme nous, et aussi apprirent notre
langue. Il semblait convenir à certaines personnes
discrètes qu'ils devraient recevoir le sacrement du
baptême, qui fût administré en conséquence.
Le garçon, qui semblait être le plus jeune, survécu
au baptême mais peu de temps, et mourrut prématurément
; sa soeur, cependant, poursuivit en bonne santé, et
ne différait pas le moins du monde des femmes de notre
propre pays. Par la suite, raconte-t-on, elle se marria à
Lynne (ou Lenna), et vécu à partir de là
quelques années, au moins, dit-on.
De plus, après qu'ils eurent acquis notre langue, lorsqu'on
leur demanda qui et d'où ils étaient, on dit
qu'il répondirent, 'Nous sommes des habitants du pays
de Saint Martin, qui est considéré avec une
vénération particulière dans le pays
qui nous a donné naissance'.
Etant interrogés plus avant quant à l'endroit
où se trouvait ce pays, et comment ils vinrent de là
jusqu'ici, ils répondirent, 'Nous sommes ignorants
de ces deux circonstances ; nous ne nous souvenons que de
ceci, qu'un certain jour, lorsque nous nourrissions les volailles
de notre père dans les champs, nous entendîment
un grand son, comme celui auquel nous sommes aujourd'hui habitués
d'entendre à Saint Edmund, lorsque les cloches sonnent
; et tout en écoutant le son en admiration, nous entrâmes
dans une soudaine, comme ils le dirent, transe, et nous retrouvâmes
parmi vous dans les champs où vous étiez en
train de récolter'.
Interrogés sur le fait que les gens de ce pays croyaient
au Christ, ou si le Soleil s'y levait, ils répondirent
que le pays était chrétien, et possédait
des églises ; mais dirent-ils, "'Le Soleil ne
se lève pas sur les gens de notre pays ; notre pays
est peu chéri par ses rayons ; nous nous contentons
de cette pénombre qui, chez vous, précède
le lever du Soleil, ou suit son coucher. De plus, un certain
pays lumineux est vu, pas très loin du nôtre,
séparé de lui par une rivière très
considerable'.
Ceci, et bien d'autres choses, trop nombreuses à énumérer,
sont dites avoir été racontées aux investigateurs
curieux. Laissons dire à chacun ce qu'il veut, et raisonner
sur de tels sujets selon ces capacités ; je ne regrette
pas d'avoir répertorié un événement
si prodigieux et miraculeux."
Un autre texte, écrit par Ralph (Radulphi) de Coggeshall
dans «Chronicon Anglicanum» (réimprimé
en 1857) donne cette autre version :
"Une autre chose merveilleuse,
arrivée dans le Suffolk, à Sainte Marie des
Wolf-pits. Un garçon et sa soeur furent trouvés
par les habitants de ce lieu près de la bouche d'un
trou qui se trouve là, qui avaient la forme de tous
leurs membres comme ceux d'autres hommes, mais ils différaient
par la couleur de leur peau de tous les gens de notre monde
habitable ; car toute la surface de leur peau était
teintée d'une couleur verte.
Personne ne pouvait comprendre leur discours. Lorsqu'ils furent
amenés comme curiosités à la maison d'un
certain chevalier, Sir Richard de Calne, à Wikes, ils
pleurèrent amèrement. Du pain et d'autres victuailles
furent disposés devant eux, mais ils ne touchaient
à aucun d'entre eux, bien que tourmentés par
une grande faim, comme le reconnu par le suite la fille. Finalement,
lorsque de grands haricots fraîchement coupés,
avec leurs tiges, furent apportés à la demeure,
ils firent signe, avec grande avidité, qu'ils devraient
leur être donnés. Lorsqu'ils furent apportés,
ils ouvrirent les tiges au lieu des cosses, pensant que les
haricots étaient à l'intérieur ; mais
ne les trouvant pas là, ils commençèrent
à pleurer de nouveau. Lorsque ceux qui étaient
présents virent cela, ils ouvrirent les cosses et leur
montrèrent les haricots nus. Ils mangèrent ceux-ci
avec grand délice, et pendant une longue période
ne goûtèrent aucune autre nourriture.
Le garçon, cependant, était toujours languissant
et déprimé, et il mourrut en peu de temps. Le
fille jouissait d'une bonne santé ; et s'accoutûmant
à divers types de nourriture, perdit complètement
sa couleur verte, et récupéra progressivement
l'habitude sanguine de tout son corps. Elle fut par la suite
régénérée par l'application du
saint baptême, et vécu de nombreuses années
au service de ce chevalier (ou soldat) comme je l'ai souvent
entendu de lui et de sa famille, et était plutôt
dissolue et dévergondée dans sa conduite.
Etant fréquemment questionnée sur les gens de
son pays, elle affirma que les habitants, et tout ce qu'ils
avaient de ce pays, étaient d'une couleur verte ; et
qu'ils ne voyaient pas de Soleil, mais jouissaient d'un degré
de lumière comme ce qui est après le coucher
du Soleil. Interrogée sur la manière dont elle
arriva dans ce pays avec le garçon susmentionné,
elle répondit que alors qu'ils suivaient leurs volailles,
ils arrivèrent à une certaines caverne, dans
laquelle en entrant ils entendirent un délicieux son
de cloches ; ravis par leur douceur, ils partirent un long
moment errer à travers la caverne, jusqu'à ce
qu'ils arrivent à sa sortie. Lorsqu'ils en sortirent,
ils furent saisis par la lumière excessive du Soleil,
et la température inhabituelle de l'air ; et reposèrent
ainsi un long moment. Terrifiés par le bruit de ceux
qui arrivèrent sur eux, ils voulurent s'enfuir, mais
ne purent trouver l'entrée de la caverne avant d'être
attrapés."
(Chronicon Anglicarum, tel que cité par Picart dans
ses notes sur William of Newbridge)
.L'original n'a pu être trouvé
dans la Collection of Histories, etc., de Martens et Durand,
-- le seul endroit où les travaux du chroniqueurs sont
censés avoir été imprimés.
Un texte de Gervase de Tilbury ( 1152 à 1220) donne
une autre version (source non retrouvée) :
".. Nous sommes des gens de la terre de St Martin ; qui
est notre saint principal. Nous ne savons pas où cette
terre se situe, et nous nous souvenons seulement qu'un jour
nous alimentions les gens de notre père, dans son domaine,
quand nous avons entendu un grand bruit semblable à
des cloches, comme quand, à la St Edmunds, elles carillonnent
toutes ensembles. Et soudain nous avons été
pris dans l'esprit et nous nous sommes retrouvés dans
votre champ. Chez nous il n'y a aucun coucher de soleil, ni
de lever, mais seulement un crépuscule. Cependant il
y a une terre de lumière à voir pas loin de
chez nous, mais elle est séparée de nous par
un fleuve de grande largeur..."
Mais rien ne prouve que ces textes anglais soient authentiques.
En effet ils citent des haricots (bean), hors ce légume
est originaire d’Amérique Centrale, et il n'a
fait son apparition en France que vers 1540. De plus à
cette époque il s’agit du haricot consommé
sec et non du haricot vert. Ce n’est qu’à
la fin du XVIIIe siècle que les tendres gousses seront
consommées en Europe.
Étrangement, dans le livre alchimique
"Atalanta fugiens" (Atalante fugitive) écrit
par Michael Maier en 1617, on trouve un passage ressemblant
étrangement à cette histoire :
"... Cette pierre, en effet, l’emporte
de loin en puissance sur l’or en face de n’importe
quel venin d’animal, et on l’insère d’ordinaire
dans l’or, comme dans une boîte ou une enveloppe,
de peur qu’il ne se gâte ou ne se perde. Mais
il faut que cette pierre soit légitime quand on la
demande à l’animal ; si, par contre, on l’extrait
des fosses souterraines, comme c’est l’usage,
qu’on la travaille pour lui donner la forme de la précédente
et qu’on lui fasse tenir sa place, elle doit être
choisie à partir des meilleurs minéraux, ceux
qui soulagent le cœur. C’est en eux, en effet,
que l’on trouve véritablement le crapaud philosophique,
non dans une carrière (comme le prétend cet
inventeur de fables) et il possède l’or en lui,
non au-dehors pour en faire étalage. Dans quel but,
en effet, s’ornerait un crapaud caché et enfermé
dans les ténèbres ? Serait-ce par hasard pour
recevoir le salut magnifique du scarabée si, au crépuscule,
il se portait à sa rencontre ? Quel orfèvre
souterrain lui aurait fabriqué une chaîne d’or
? Serait-ce par hasard le père des enfants verdoyants
qui sortirent de la terre de saint Martin disons, de la terre
elle-même, comme aussi, selon le même auteur,
deux chiens sortirent d’une carrière ?"
Aparemment c'est cet écrit alchimique
qui est à l'origine du mythe des enfants verts.
Il s'agit juste d'un texte symbolique qui ne raconte aucunement
un fait réel. Et on peut penser que ceux qui s'en sont
inspiré le savaient trés bien.
Quand à comprendre ce que veut expliquer
ce charabia alchimique, c'est un autre problème !
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