DOSSIER BIBLE :



Datation des Évangiles :                                                        


Vers l'époque de la chute du Temple, en 70, Yohanan ben Zaccai fonda à Yabné / Jamnia un collège de "Sages" Pharisiens qui s’attacha à maintenir la tradition religieuse juive, fondant ainsi le Rabbinisme. On peut se baser sur la date moyenne de 85 pour déterminer l'instant ou le Rabbinisme et le Christianisme, se sont ainsi définitivement séparés alors qu'il provenaient tous les deux du même tronc Judaîque. Les Chrétiens eux-mêmes étaient divisés en deux branches : les Judéo-Chrétiens ("Nazaréens") qui conservaient des coutumes juives, et les Pagano-Chrétiens ("Hellénistes") qui étaient des païens convertis, qui ne suivaient pas les coutumes juives.

En se basant sur cette rupture de l'an 85, certains ont essayé de dater l'écriture des Évangiles :

Vers 50 - 63 furent rédigées les épîtres de Paul :
La première mise par écrit des paroles de Jésus aurait eu lieu vers l'an 50 - 60, dans un recueil appelé actuellement la "Source Q, et dont des extraits ont été incorporés dans les évangiles synoptiques. Jésus y était présenté comme un sage, auquel on attribuait un seul miracle : la guérison à distance du serviteur d'un centurion.
Cette "Source Q" pourrait être constituée de trois couches rédactionnelles : Q1 vers 50, Q2 vers 60 - 70 et Q3 vers 75.
L'évangile de Marc aurait été écrit, vers 66 - 70, par un disciple de Pierre.
Son chapitre final (chap 16 : 9-20) a cependant été rajouté tardivement et il s'inspire de Luc.
L'évangile de Marc présente Jésus comme un être divin qui fait des miracles.
L'évangile de Luc aurait été rédigé vers 80 - 85 (puis remanié vers 93 - 94) par un helléniste prétendument ami de Paul, avec Marc et la "Source Q" pour sources principales. Le même auteur aurait écrit les actes des apôtres vers 85 - 90. Il n'était manifestement jamais allé en Israël.
L'évangile de Matthieu aurait été écrit entre 80 et 85 (pendant la rupture entre les juifs et les chrétiens). Il aurait pour sources principales Marc et la "Source Q". Matthieu divinise encore plus Jésus dont il tente de mettre en accord les actes avec les anciennes prophéties, afin d'impressionner les Juifs.
La publication de l'évangile de Jean, en son état final, est datée d'entre 90 et 95. Jean présente Jésus comme un être céleste.
Selon Irénée l'Apocalypse aurait été éditée "vers la fin du règne de Domitien", soit peu avant 96, et l'Évangile selon Jean "sous Trajan", soit entre 98 et 117.

Mais en fait ces datations restent théoriques et ne se basent que sur des calculs, pas sur des documents historiques concrets.
Les calculs eux-mêmes peuvent être révisables selon que les écritures ont été fortement remaniées ou pas avec le temps.
Si on se base sur des documents et témoignages vraiment tangibles, voici ce que l'on peut trouver de concret sur les premiers textes chrétiens :



Datation des Épîtres de Paul :


- Selon les Actes 18:12-16, Paul écrit sa première épître aux Thessaloniciens alors qu'il est à Corinthe, avant d'être jugé par Gallion, proconsul d'Achaïe. Hors une inscription retrouvée à Delphe a prouvé que ce Gallion avait été proconsul de mi-51 à mi-52. Donc, la première Epître aux Thessaloniciens peut être datée de 51 ou 52.

- La ville de Colosse a été détruite par un tremblement de terre en 60.
L'épitre aux Colossiens n'a donc pu être écrite qu'avant cette date.
... Cependant les spécialistes doutent que cette épître soit de Paul lui-même. Et il en est de même de l'épître aux Ephésiens et de la 2ème épître aux Thessaloniciens.

- Dans l'épître aux Hébreux il est écrit :
"Car la loi, ayant l’ombre des biens à venir, non l’image même des choses, ne peut jamais, par les mêmes sacrifices que l’on offre continuellement chaque année, rendre parfaits ceux qui s’approchent.
Autrement n’eussent-ils pas cessé d’être offerts, puisque ceux qui rendent le culte, étant une fois purifiés, n’auraient plus eu aucune conscience de pécher.  Mais il y a dans ces sacrifices, chaque année, un acte remémoratif des péchés. Car il est impossible que le sang de taureaux et de boucs ôte les péchés."


Cela montre qu'à cette époque les sacrifices sanglants avaient toujours lieu dans le temple de Jérusalem. Hors ce temple a été détruit en 70.
Cette épître n'a donc pu être écrite qu'avant 70 (mais on doute aussi qu'elle soit vraiment de Paul).

En analysant ainsi le contenu même des épîtres de Paul, on arrive à dater celles-ci de 51 à 63 ap.JC.
Mais on peut aussi faire un recoupement en cherchant les plus anciens témoignages de la lecture de ces épîtres.

- Vers 96 - 98 (?), Clément de Rome parle de la première épîtres de Paul aux Corinthiens. Il semble aussi connaitre le contenu des épîtres aux Romains, aux Ephésiens et aux Hébreux.
De même en 107 Polycarpe de Smyrne montre qu'il connait les épitres aux Philippiens et aux Ephésiens.
Cela prouve que ces épîtres existaient bien à cette époque.

- En 140 - 144, Marcion apporte à Rome l' "Apostolicon", un livre contenant 10 épitres de Paul. C'était les épitres aux Galates, aux Corinthiens 1 et 2, aux Romains (sans les chapitres 15 et 16), aux Théssaloniciens 1 et 2, aux Laodicéens (Éphésiens), aux Colossiens, aux Philippiens et à Philémon. On notera que ces épîtres étaient plus courtes que dans leur version actuelle : Irénée de Lyon (130-202) prétendait que c'était Marcion qui les avait expurgées ... mais il est plus probable que ces textes représentaient plutôt la version originelle de ces épîtres.

- Vers 170-180, le canon de Muratori écrit ceci au sujet des oeuvres de Paul :
"De chacune de ces épîtres nous avons à discuter, puisque le bienheureux apôtre Paul lui-même, suivant la manière de son prédécesseur Jean n’a écrit sous leur nom propre qu’à sept Eglises, selon cet ordre : la première aux Corinthiens, la seconde aux Ephésiens, la troisième aux Philippiens, la quatrième aux Colossiens, la cinquième aux Galates, la sixième aux Thessaloniciens, la septième aux Romains, quoiqu’il ait récidivé avec les Corinthiens et les Thessaloniciens par manière de retouche....
... Il circule aussi une épître aux Laodiciens et une autre aux Alexandrins qui prennent faussement le nom de Paul pour soutenir l’hérésie de Marcion et beaucoup d’autres pièces qui ne peuvent être reçues dans l’Eglise catholique, car il ne convient pas de mêler le fiel au miel."


Origène (185 - 254) , cité par Eusèbe, a écrit :
"L'opinion, qui courait avant nous, est qu'elle (l'épître aux Hébreux) a été écrite par Clément, évêque de Rome ; d'autres, qu'elle est l'œuvre de Luc, auteur de l'Evangile. L'authenticité de cette Epître a été niée aussi par Irénée, évêque de Lyon, qui vivait en 178 ; par Hippolitus qui vivait en 220 ; par Novatus, presbytère de Rome, qui vivait en 251. Tertullien, presbytère de Carthage en 200, attribue cette Epître à Barnabas. Caïus, presbytère de Rome, qui vivait en 212, compte treize Epîtres de Paul, mais il ne comprend pas dans ce nombre l'Epître aux Hébreux. Cyprien, évêque de Carthage en 248, ne fait pas mention de cette Epître. jusqu'à ce moment, l'Eglise Syriaque refuse de reconnaître la 2ème Epître de Pierre, la 2ème et la 3e de Jean."

- Eusèbe de Césarée (265 - 339) écrit dans son Histoire 111,3 :
"Les Epîtres de Paul sont quatorze en nombre, mais quelques-uns doutent de l'authenticité de l'Epître aux Hébreux."

Conclusion :
De tout cela il ressort que les épîtres de Paul sont des textes très anciens qui remontent aux tout début du christianisme.



Datation de la "Source Q" :


La "Source Q" est un Évangile hypothétique ou Luc et Matthieu (et même Marc) auraient puisé des paroles de jésus (des "logions") pour les insérer dans leurs Évangiles.
Les plus anciennes citations connues qui semblent se rapporter à Luc et à Matthieu font toutes parties des logions recopiés dans la "Source Q". Cela signifie probablement que ces citations ne sont pas tirées des Évangiles de Luc et de Matthieu mais directement de la "Source Q" elle-même. Cela nous renseigne donc sur l'époque ou cette source était en circulation.

- Ainsi, vers 96 - 98, Clément de Rome cite des extraits semblant provenir des Évangiles de Luc et de Matthieu :

Corinthiens 13,2 :
"Soyez miséricordieux afin d'obtenir la miséricorde, pardonnez afin d'êtte pardonnés : selon que vous agirez, on agira envers vous ; comme vous donnerez, on vous donnera ; comme vous jugerez, on vous jugera ; selon que vous faites le bien on vous en fera ; de la mesure dont vous mesurerez, on mesurera pour vous en retour ."
(cf. Luc 6,31 : "Et comme vous voulez que les hommes vous fassent, vous aussi faites-leur de même." - cf. Luc 6,37-38 : "Et ne jugez pas, et vous ne serez point jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez point condamnés ; acquittez, et vous serez acquittés ; donnez, et il vous sera donné : on vous donnera dans le sein bonne mesure, pressée et secouée, et qui débordera ; car de la même mesure dont vous mesurerez, on vous mesurera en retour" - cf. Matthieu 6,14-15: "Car si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi à vous ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes leurs fautes, votre Père ne pardonnera pas non plus vos fautes." - cf. Matthieu 7,1-2 : 1 "Ne jugez pas, afin que vous ne soyez pas jugés : car, du jugement dont vous jugerez, vous serez jugés ; et de la mesure dont vous mesurerez, il vous sera mesuré".)

----> En fait, ce passage appartient à la "source Q" ou Luc et Matthieu ont puisé.

Corinthiens 46,8 : "Malheur à cet homme! Mieux vaudrait pour lui n'être pas né que de scandaliser un seul de mes élus ! Mieux vaudrait pour lui se voir passer autour du cou une pierre à moudre et être précipité dans la mer que de pervertir un seul de mes élus."
(cf. Luc 17,2 :
"Mieux lui vaudrait qu’on lui mît au cou une meule d’âne, et qu’il fût jeté dans la mer, que de scandaliser un de ces petits." - cf. Matthieu 18,6 : "Et quiconque est une occasion de chute pour un de ces petits qui croient en moi, il serait avantageux pour lui qu’on lui eût pendu au cou une meule d’âne et qu’il eût été noyé dans les profondeurs de la mer." - cf. Matthieu 26,24 : "Le fils de l’homme s’en va, selon qu’il est écrit de lui ; mais malheur à cet homme par qui le fils de l’homme est livré ! Il eût été bon pour cet homme-là qu’il ne fût pas né.")

----> En fait, ce passage appartient également à la "source Q" ou Luc et Matthieu ont puisé.


- Autre passage de Clément :
"Car le Seigneur dit: Vous serez comme des agneaux au milieu des loups; mais Pierre, répondant, dit: Si donc les loups mettent les agneaux en pièces? Jésus dit à Pierre: Que les agneaux ne craignent pas les loups après votre mort; et vous, ne craignez pas ceux qui vous tuent, et ensuite ne peuvent rien vous faire; mais craignez celui qui, après que vous serez morts, a la puissance de l'âme et du corps, et les peut envoyer dans la géhenne. "
( cf. Matthieu 10,16....28 :
"Voilà, je vous envoie comme des brebis au milieu des loups .... Ne craignez point ceux qui tuent le corps et ne peuvent tuer l'âme; mais plutôt craignez celui qui peut perdre et l'âme et le corps dans la géhenne." - cf. Luc 10,3 : "Allez, voilà je vous envoie comme des agneaux entre des loups." - cf. Luc 12,4 : " Or je vous dis, à vous qui êtes mes amis: N'ayez point peur de ceux qui tuent le corps, et après cela n'ont plus rien à faire davantage; mais je vous montrerai qui il faut que vous craigniez. Craignez celui qui, après qu'il aura tué, a la puissance d'envoyer dans la géhenne; oui, je vous dis, craignez celui-là.")

----> Et ce passage appartient également à la "source Q" ou Luc et Matthieu ont puisé.


- Vers 70-120, dans la Didaché, on trouve également des citations semblant provenir des Évangiles de Luc et de Matthieu :

Didaché I,2 :
"Voici donc le chemin de la vie. En premier lieu tu aimeras le Dieu qui t'a créé; en second lieu tu aimeras ton prochain comme toi-même".
(cf. Matthieu 22:37-39 :
"Et il lui dit : 'Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de toute ta pensée. C’est là le grand et premier commandement. Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même'." - cf.Luc 10,27 : "Et répondant, il dit : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de toute ta force, et de toute ta pensée.")

----> En fait, cette parole provient aussi de la "Source Q" ainsi que du Deutéronome 6:5 et du Lévitique 19:18.

Didaché I,4 :
"Car quel gré vous saura-t-on si vous aimez seulement ceux qui vous aiment ? Les païens ne le font-ils pas aussi ?"
(cf. Matthieu 5,46 :
"Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense avez-vous ? Les publicains même n’en font-ils pas autant ?" - cf. Luc 6,32 : "Et si vous aimez ceux qui vous aiment, quel gré vous en saura-t-on ? car les pécheurs aussi aiment ceux qui les aiment.")

----> En fait, cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché I,7 :
"Si quelqu'un te donne un soufflet sur la joue droite, présente-lui aussi l'autre et tu seras parfait."
(cf. Matthieu 5,39 :
"Mais moi, je vous dis : 'Mais si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre'." - cf. Matthieu 5,48 : "Vous, soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait." - cf. Luc 6,29 : "À celui qui te frappe sur une joue, présente aussi l’autre.")

----> Et cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché I,8-9 : "
Si quelqu'un te requiert pour une corvée d'un mille, fais-en deux avec lui. Si quelqu'un t'enlève ton manteau, donne-lui aussi la tunique. Si quelqu'un te prend ce qui est à toi, ne le redemande pas, car tu ne le peux. A quiconque te demande donne et ne redemande pas, car à tous le Père veut faire part de Ses propres bienfaits."
(cf. Matthieu 5,40-41 :
"et à celui qui veut plaider contre toi et t’ôter ta tunique, laisse-lui encore le manteau ; et si quelqu’un veut te contraindre de faire un mille, vas-en deux avec lui." - cf. Luc 6,29-30 : "et si quelqu’un t’ôte ton manteau, ne l’empêche pas de prendre aussi ta tunique. Donne à tout homme qui te demande, et à celui qui t’ôte ce qui t’appartient, ne le redemande pas.")

----> Ici aussi cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché I,11 :
"Mais, s'il n'a pas besoin, il rendra compte pourquoi il a reçu et dans quel but. Jeté en prison, il sera examiné sur ce qu'il a fait et il ne sera pas relaché jusqu'à ce qu'il ait restitué le dernier quadrant."
(cf. Matthieu 5,26 :
"en vérité, je te dis : Tu ne sortiras point de là, jusqu’à ce que tu aies payé le dernier quadrant." - cf. Luc 12,58-59 : "Car quand tu vas avec ta partie adverse devant le magistrat, efforce-toi en chemin d’en être délivré, de peur qu’elle ne te tire devant le juge ; et le juge te livrera au sergent, et le sergent te jettera en prison. Je te dis que tu ne sortiras point de là, que tu n’aies payé jusqu’à la dernière pite.")

----> Et cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché III,6 :
"Mon enfant, ne sois pas enclin aux murmures, parce que cela conduit au blasphème, ne soit pas arrogant, ni malveillant, car de tout cela naissent les blasphèmes. Mais sois doux, puisque les doux recevront la terre en héritage".
(cf. Matthieu 5,5 :
"bienheureux les débonnaires, car c’est eux qui hériteront de la terre." cf. Luc 6,20 : "Bienheureux, vous pauvres, car à vous est le royaume de Dieu.")

----> Cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché VIII,3 : "
Notre Père qui es au Ciel, que Ton Nom soit sanctifié, que Ton règne arrive, que Ta volonté soit faite sur la terre comme au Ciel; donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien et remets-nous notre dette comme nous remettons la leur à nos débiteurs et ne nous induis pas dans la tentation, mais délivre-nous du mal, car à Toi appartiennent la puissance et la gloire pour les siècles. (cf. Matthieu 6, 9-13 et Luc 11,2-4)

----> Mais cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché IX,5 :
"... Le Seigneur a dit : Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens."
(cf. Matthieu 7,6 :
"Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens, ni ne jetez vos perles devant les pourceaux, de peur qu’ils ne les foulent à leurs pieds, et que, se retournant, ils ne vous déchirent.")

----> Mais cette parole pourrait provenir aussi de la "Source Q" car, chez Matthieu, elle est coincée en plein milieu de deux passages issus de cette source.

Didaché XI,3 :
"Tout prophète qui parle en esprit, ne le mettez pas à l'épreuve et ne le jugez pas, car tout péché sera remis, mais ce péché-là ne sera pas remis."
(cf. Matthieu 12,31 :
"C’est pourquoi je vous dis : tout péché et tout blasphème sera pardonné aux hommes ; mais le blasphème contre l’Esprit ne sera pas pardonné aux hommes." - cf. Luc 12,10 : "Et quiconque parlera contre le fils de l’homme, il lui sera pardonné ; mais à celui qui aura proféré des paroles injurieuses contre le Saint Esprit, il ne sera pas pardonné." - cf. Marc 3,28-29 : "En vérité, je vous dis que tous les péchés seront pardonnés aux fils des hommes, et les paroles injurieuses, quelles qu’elles soient, par lesquelles ils blasphèment ; mais quiconque proférera des paroles injurieuses contre l’Esprit Saint n’aura jamais de pardon ; mais il est passible du jugement éternel".)

----> Cette parole provient aussi de la "Source Q".

Didaché XVI,1 :
"Veillez sur votre vie. Que vos lampes ne s'éteignent pas et que vos reins ne se déceignent pas, mais soyez prêts, car vous ne savez pas l'heure où notre Seigneur viendra."
(cf. Matthieu 24,42-44 :
" Veillez donc ; car vous ne savez pas à quelle heure votre Seigneur vient ... C’est pourquoi, vous aussi, soyez prêts ; car, à l’heure que vous ne pensez pas, le fils de l’homme vient." - cf. Matthieu 25,13 : "Veillez donc ; car vous ne savez ni le jour ni l’heure." - cf. Luc 12,35 : "Que vos reins soient ceints et vos lampes allumées. - cf. Luc 12,39-40 : "Mais sachez ceci, que si le maître de la maison eût su à quelle heure le voleur devait venir, il eût veillé et n’eût pas laissé percer sa maison. Vous donc aussi soyez prêts ; car, à l’heure que vous ne pensez pas, le fils de l’homme vient." - cf. Marc 13,35 : "Veillez donc ; car vous ne savez pas quand le maître de la maison viendra, le soir, ou à minuit, ou au chant du coq, ou au matin." )

----> Cette parole provient aussi de la "Source Q".


- Vers 70 /130, un passage de Matthieu 22:14 semble être cité dans l'"épître de Barnabé / Barnabas.

----> Mais cet extrait fait également partie de la "Source Q".


- Vers 120 - 135 (ou 107) Polycarpe de Smyrne (69 - 155 ou 167) cite des passages des Évangiles dans sa "Lettre à l'Eglise des Philippiens 2,3" :
"Nous souvenant des enseignements du Seigneur qui dit : "Ne jugez pas, pour ne pas être jugés ; pardonnez, et l'on vous pardonnera ; faites miséricorde pour recevoir miséricorde ; la mesure avec laquelle vous mesurerez servira aussi pour vous."
(cf. Marc 4,24 :
"Et il leur dit : Prenez garde à ce que vous entendez : de la mesure dont vous mesurerez il vous sera mesuré" - cf. Matthieu 7,1-2 : "Ne jugez pas, afin que vous ne soyez pas jugés : car, du jugement dont vous jugerez, vous serez jugés ; et de la mesure dont vous mesurerez, il vous sera mesuré." - cf. Luc 6, 36-38 : "Soyez donc miséricordieux, comme aussi votre Père est miséricordieux ; et ne jugez pas, et vous ne serez point jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez point condamnés ; acquittez, et vous serez acquittés ; donnez, et il vous sera donné : on vous donnera dans le sein bonne mesure, pressée et secouée, et qui débordera ; car de la même mesure dont vous mesurerez, on vous mesurera en retour.")

et "
bienheureux les pauvres et ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume de Dieu est à eux " (cf. Matthieu 5, 3 et 10 : "Bienheureux les pauvres en esprit, car c’est à eux qu’est le royaume des cieux ;" et "Bienheureux ceux qui sont persécutés à cause de la justice, car c’est à eux qu’est le royaume des cieux." - cf. Luc 6, 20 : "Et lui, élevant les yeux vers ses disciples, dit : Bienheureux, vous pauvres, car à vous est le royaume de Dieu.").

----> La encore tous ces extraits sont issus de la "Source Q".

Dans Matthieu 23:35, il est écrit :
"... en sorte que vienne sur vous tout le sang juste versé sur la terre, depuis le sang d’Abel le juste, jusqu’au sang de Zaccaria, fils de Baracchia, que vous avez tué entre le temple et l’autel."

Et dans Luc 11:51 (version du codex de Beze), il est écrit :
"... depuis le sang d’Abel jusqu’au sang de Zaccaria, fils de Baracchia, qui périt entre l’autel et le sanctuaire ... "

Ces deux passages ont été recopiés dans la "Source Q" et ils décrivent l'assassinat de Zacharie (Sacharja / Zekarja), fils de Barachie (Baris / Baruch / Berekia / Barachias), dans le temple de Jérusalem durant la révolte de 67-70 (selon Josèphe, Guerre des Juifs, IV,5.4).

Ce passage de la "Source Q" n'aurait donc pu être écrit qu'aprés.

Cependant, selon Jérôme, l'Évangile des Hébreux (version primitive de l'Évangile de Matthieu) portait "fils de Jéhojada" au lieu de "fils de Barachie". Il y aurait donc eu une confusion avec le Zacharie fils de Jehojada (Jehoïada / Jehoyada / Yehoyada) qui avait été lapidé sur le parvis du Temple plusieurs siècles auparavant (selon 2 Chroniques 24.21).

Conclusion :
Tout cela semble indiquer que le "Source Q" circulait entre 70 et 120 ap. JC


Datation de l'Évangile de Marc :


On sait que l'Évangile de Marc est antérieur à ceux de Luc et de Matthieu puisque ces derniers en ont recopié la presque totalité pour composer la partie narrative de leurs textes.

- Dans Marc 8:27 il est écrit :
"Et Jésus s’en alla, et ses disciples, aux villages de Césarée de Philippe ; et chemin faisant, il interrogea ses disciples, leur disant : Qui disent les hommes que je suis ?"

----> Hors Césarée de Philippe fut rebaptisée Néronias par le roi Agrippa II, en 66.
Ce passage de Marc devrait donc avoir été écrit avant 66... A moins que l'auteur n'ait été plus tardif mais aurait corrigé ce genre de détail afin que son texte reste plausible historiquement.

- Cependant dans Marc 13 : 1-2 il est écrit :
"Et comme il sortait du temple, un de ses disciples lui dit : 'Maître, regarde, quelles pierres et quels bâtiments !'  Et Jésus, répondant, lui dit : 'Tu vois ces grands bâtiments ? il ne sera point laissé pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas !' "

----> Cela se rapporte à la destruction du temple de Jérusalem par Titus lors de la révolte de 70.
Finalement ce passage de l'évangile de Marc n'a donc pu être écrit qu'aprés 70.


- Dans Marc 13:14 il est écrit :
"Et quand vous verrez l’abomination de la désolation établie où elle ne doit pas être, que celui qui lit comprenne, alors que ceux qui sont en Judée s’enfuient dans les montagnes ;"

----> Cela se rapporte à la statue de Jupiter installée par les Hadrien dans le temple de Jérusalem restauré. Cet acte impie avait déclanché la révolte de Bar Kochba en 132-135, ce qui avait amené la destruction totale de Jérusalem par les Romains.
Ce passage de l'évangile de Marc n'a donc pu être écrit qu'aprés 132.


- Vers 96 - 98 (?), Clément de Rome cite un extrait semblant venir de Marc:
"Malheur à cet homme-là, a-t-il dit, mieux vaudrait pour lui n'être pas né que de scandaliser un seul de mes élus. Mieux vaudrait pour lui se faire attacher une meule et jeter à la mer plutôt que de pervertir un seul de mes élus"
(cf. Marc 9:42 :
"Et quiconque sera une occasion de chute pour un des petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui mît au cou une pierre de meule, et qu’il fût jeté dans la mer".)

----> Ce passage sera aussi repris plus tard dans Luc 17:2 et Matthieu 18:6 ... mais il semble bien qu'il provienne à l'origine de la "Source Q".
Donc rien ne prouve qu'à cette époque l' Évangile de Marc existait déja.


- Vers 70-120, dans la Didaché X,3, on trouve cette citation semblant provenir de Marc :
"Souviens-Toi, Seigneur, de Ton Eglise, pour la délivrer de tout mal et la rendre parfaite dans Ton amour et rassemble-la des quatre vents , elle que tu as sanctifiée, dans Ton royaume que Tu lui as préparé, car à Toi sont la puissance et la gloire pour les siècles."
(cf. Marc 13,27 :
"et alors il enverra ses anges, et il rassemblera ses élus des quatre vents, depuis le bout de la terre jusqu’au bout du ciel.")

----> Il est donc possible que l'Évangile de Marc ait pu déjà exister à cette époque. Ou du moins ce passage particulier.
Cependant on ne peut pas dire que ce texte ait vraiment une grande ressemblance avec celui de Marc. Il est donc possible aussi que cette vague ressemblance soit fortuite.


- Vers 70-130 est écrite l'"Épître de Barnabé / Barnabas" ou l'on trouve ces extraits des Évangiles :

-Barnabé VII,3 :
"Mais, sur la croix, " il fut abreuvé de vinaigre et de fiel."
(cf. Matthieu 27,34 et 48 :
"ils lui donnèrent à boire du vinaigre mêlé de fiel ; et l’ayant goûté, il n’en voulut pas boire....... Et aussitôt l’un d’entre eux courut et prit une éponge, et l’ayant remplie de vinaigre, la mit au bout d’un roseau, et lui donna à boire." - cf. Luc 23,36 : "Et les soldats aussi se moquaient de lui, s’approchant, et lui présentant du vinaigre," - cf. Marc 15,23 : "Et ils lui donnèrent à boire du vin mixtionné de myrrhe ; mais il ne le prit pas.")

-Barnabé XII,11 :
" Voilà comment David l'appelle mon Seigneur, et non pas mon fils."
(cf. Matthieu 22,45 :
"Si donc David l’appelle seigneur, comment est-il son fils ?" - cf. Luc 20,44 : "David donc l’appelle seigneur ; et comment est-il son fils ?" - cf. Marc 12,37 : "David lui-même donc l’appelle seigneur ; et comment est-il son fils ?")

----> Cela indique donc que l'Évangile de Marc existait déjà à cette époque. Mais pas forcément les Évangiles de Luc et de Matthieu, puisque ces passages font partie de ceux que Luc et Matthieu ont recopié sur Marc ultérieurement.


Vers 107 - 115, la "Lettre d'Ignace d'Antioche aux Smyrniotes VI, 1" contient un extrait tiré des Évangiles :
"Que personne ne se trompe : même les êtres célestes, et la gloire des anges, et les archontes visibles et invisibles, s'ils ne croient pas au sang du Christ, pour eux aussi il y a un jugement : Que celui qui peut comprendre, comprenne ".
(cf. Marc 4,9 :
"Qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende." - cf. Luc 8,8 : "Qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende." - cf. Matthieu 13,9 : "Qui a des oreilles, qu’il entende." cf. Matthieu 19,12 : "Que celui qui peut le comprendre, le comprenne.")

----> Cela indique que l'Évangile de Marc existait déjà à cette époque. Mais pas forcément les Évangiles de Luc et de Matthieu, puisque ce passage fait partie de ceux que Luc et Matthieu ont recopié sur Marc ultérieurement.


- Vers 95 - 140, le texte du "Pasteur d'Hermas" contient plusieurs extraits des Évangiles :

Hermas 15,3 :
" Et celles qui tombent près des eaux, mais qui ne parviennent pas à rouler dans l'eau, tu veux savoir qui elles sont ? Ce sont ceux qui ont entendu la parole de Dieu et qui veulent être baptisés au nom du Seigneur."
(cf. Marc 4, 18-19 :
"Et d’autres sont ceux qui sont semés dans les épines : ce sont ceux qui ont entendu la parole ; et les soucis du siècle, et la tromperie des richesses, et les convoitises à l’égard des autres choses, entrant, étouffent la parole, et elle est sans fruit." - cf. Luc 8, 6-7 : " Et d’autres tombèrent sur le roc ; et ayant levé, ils séchèrent, parce qu’ils n’avaient pas d’humidité. Et d’autres tombèrent au milieu des épines ; et les épines levèrent avec eux et les étouffèrent.." - cf. Matthieu 13, 20-22 : "Et celui qui a été semé sur les endroits rocailleux, c’est celui qui entend la parole, et qui la reçoit aussitôt avec joie ; mais il n’a pas de racine en lui-même, mais n’est que pour un temps : et quand la tribulation ou la persécution survient à cause de la parole, il est aussitôt scandalisé. Et celui qui a été semé dans les épines, c’est celui qui entend la parole ; et les soucis de ce siècle et la tromperie des richesses étouffent la parole, et il est sans fruit." )

Hermas 29,5 :
"Tout le temps qu'il l'ignore, dit-il, il ne commet pas de péché ; mais s'il apprend le péché de sa femme et qu'elle, au lieu de se repentir, persiste dans l'adultère, à vivre avec elle le mari partage sa faute et participe à l'adultère. .-Que fera donc le mari, Seigneur, dis-je, si la femme persiste dans cette passion ? Qu'il la renvoie, dit-il, et qu'il reste seul. Mais si, après avoir renvoyé sa femme, il en épouse une autre, lui aussi alors, il commet l'adultère."
(cf. Marc 10, 11-12 :
"Quiconque répudiera sa femme et en épousera une autre, commet adultère envers la première, et si une femme répudie son mari, et en épouse un autre, elle commet adultère." - cf. Luc 16,18 : "Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre, commet adultère ; et quiconque épouse une femme répudiée par son mari, commet adultère." - cf. Matthieu 5, 32 : "Mais moi, je vous dis que quiconque répudiera sa femme, si ce n’est pour cause de fornication, la fait commettre adultère ; et quiconque épousera une femme répudiée, commet adultère." - cf. Matthieu 19, 9 : "Et je vous dis que quiconque répudiera sa femme, non pour cause de fornication, et en épousera une autre, commet adultère ; et celui qui épouse une femme répudiée, commet adultère.")

Hermas 23,6 :
"Croyez au Seigneur, vous qui doutez : il peut aussi bien détourner sa colère de vous que vous envoyer des châtiments, à vous qui doutez. Malheur à ceux qui ont entendu ces paroles sans les comprendre. Il vaudrait mieux pour eux n'être pas nés. "
(cf. Marc 14,21 : "Il eût été bon pour cet homme-là qu’il ne fût pas né." - cf. Matthieu 26, 24 : "Il eût été bon pour cet homme-là qu’il ne fût pas né.")

----> Ces passages confirment que l'Évangile de Marc existait à cette époque. Mais pas forcément les Évangiles de Luc et de Matthieu, puisque ces passages font partie de ceux que Luc et Matthieu ont recopié sur Marc ultérieurement.
(On notera que, plus anciennement, Marc 14,21 est un passage qui a lui-même été recopié dans la "Source Q".)


- Vers 110 - 135, Papias, évêque de Hiérapolis en Phrygie (80 - 155), écrit (rapporté par Eusèbe) une "Interprétation des Paroles du Seigneur" ou il dit :
"Marc, qui était l'interprète de Pierre, a écrit avec exactitude, mais pourtant sans ordre, tout ce dont il se souvenait de ce qui avait été dit ou fait par le Seigneur."

----> Mais cela ne peut pas être une descriptions de l'actuel Évangile de Marc car ce dernier est trés ordonné.
A moins que Papias ne soit pas d'accord avec l'ordre des évènements indiqué par Marc, et qu'il lui préfèrasse celui exposé dans un autre Évangile (celui de Jean, par exemple) ?


- Vers 120 - 135 (ou 107), Polycarpe de Smyrne (69 - 155 ou 167) cite, "dans sa lettre aux Philippiens 7,2", un passage ressemblant à Matthieu 26:41 et à Marc 14:38 :
"C'est pourquoi abandonnons les vains discours de la foule et les fausses doctrines, et revenons à l'enseignement qui nous a été transmis dès le commencement ; restons sobres pour pouvoir prier, persévérons dans les jeûnes, suppliant dans nos prières le Dieu qui voit tout de ne pas nous soumettre à la tentation, car, le Seigneur l'a dit : l'esprit est prompt, mais la chair est faible. "
(cf. Marc 14,38 :
"Veillez et priez, afin que vous n’entriez pas en tentation ; l’esprit est prompt, mais la chair est faible." - cf. Matthieu 26, 41 : "Veillez et priez, afin que vous n’entriez pas en tentation ; l’esprit est prompt, mais la chair est faible.").

----> Cela indique donc que l'Évangile de Marc existait déjà à cette époque. Mais pas forcément l'Évangile de Matthieu, puisque ce passage fait partie de ceux que Matthieu a recopié sur Marc ultérieurement.


- Vers 110 - 160 : L'Évangile du papyrus d'Oxyrhynque 840 contient un passage de Marc 7 sous une forme primitive. Donc l'Évangile de Marc existe bien vers cette date :
"... Et les prenants avec lui, il se rendit dans le parvis des purs et il se promenait dans le temple. Et un pharisien, prêtre en chef, du nom de Lévi, s’avança au-devant d’eux et dit au Sauveur : 'Qui t’a permis de marcher dans cette salle des purifications et de regarder ces vases sacrés, alors que tu n’as pas pris de bain et que tes disciples n’ont même pas jeté d’eau sur leurs pieds ? Tes pas ont souillé ce sanctuaire, ce lieu pur, que nul ne peut fouler s’il ne s’est baigné et n’a changé ses vêtements, et dont il n’ose regarder les meubles sacrés.' Le Sauveur s’arrêta aussitôt avec ses disciples et lui répondit : 'Et toi, qui es ici dans ce temple, es-tu pur ?' L’autre lui dit : 'Je suis pur. Je me suis baigné dans la piscine de David, où je suis descendu par une échelle et d’où je suis remonté par une autre. J’ai revêtu des habits blancs et purs ; C’est ainsi que je suis entré et que j’ai regardé ces meubles sacrés.' Le Seigneur lui répondit : 'Malheur à vous, aveugles qui ne comprenez pas ! Tu t’es baigné dans ces eaux courantes où nuit et jour l’on jette des chiens et des porcs, et ta toilette a nettoyé cette peau extérieure que prostituées et joueuses de flûtes parfument de myrrhe, lavent fourbissent et ornent pour exciter les passions des hommes. Mais l’intérieur est plein de scorpions et de tous les vices. Quant à mes disciples et à moi-même, qui à te croire, n’avons pas pris de bain, nous nous sommes immergés dans les eaux de la vie éternelle'."


- En 140 - 144, Marcion apporte à Rome une version de l'Évangile de Luc, hors ce dernier a été écrit en recopiant de nombreux passages de Marc ... donc l'Évangile de Marc existait forcément avant cette date.


- Vers 150, le pseudo-Clément cite plusieurs extraits des Évangiles :
Homélies Clémentines 3,15 :
"Vous apercevez ces grandes constructions ? En vérité je vous dis : pierre sur pierre ne sera pas laissée ici, qui ne sera arrachée."
(cf. Marc 13,2 :
"Et Jésus, répondant, lui dit : Tu vois ces grands bâtiments ? il ne sera point laissé pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas !" - cf. Luc 21,6 : "Quant à ces choses que vous regardez, les jours viendront où il ne sera laissé pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas." - cf. Matthieu 24,2 : "Et lui, répondant, leur dit : Ne voyez-vous pas toutes ces choses ? En vérité, je vous dis : Il ne sera point laissé ici pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas.")

----> Il s'agit la d'un passage de Marc qui a été repris plus tard par Luc et Matthieu. Donc l'Évangile de Marc existe bien à cette époque.

Autre extrait du Pseudo-Clément :
"Mes frères sont ceux qui font la volonté de mon Père"
(cf. Marc 3,35 :
"car quiconque fera la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère" - cf. Matthieu 12,50 : "Car quiconque fera la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère.")

----> Il s'agit la d'un passage de Marc qui a été repris plus tard par Matthieu. Donc l'Évangile de Marc existe bien à cette époque.


- Vers 172, Tatien écrit le "Diatessaron" en compilant les quatre Évangiles. Parmi ceux-ci il semble bien avoir utilisé l'Évangile de Marc.
L'Évangile de Marc existait donc bien à cette époque.
D'ailleurs, vers la même période, le Canon de Muratori cite les quatre évangiles parmi les livres acceptés dans le Nouveau Testament.


- Le chapitre final de Marc (chap 16 : 9-20) a été rajouté tardivement et on constate que son auteur s'est inspiré de Luc. Cependant il semble avoir été déja présent dans le texte utilisé par Tatien.


Conclusion :
De tout cela on peut probablement conclure que l'Évangile de Marc circulait déjà vers 70-120 ap. JC.
Mais la rédaction finale de certains passages ne sera réalisée qu'après 132.



Datation de l'Évangile de Luc :


Il a été démontré que l'Évangile de Luc avait été écrits en combinant trois sources au moins :
- La "Source Q", recueil de paroles de jésus.
- L'Évangile de Marc, pour la partie narrative.
- Divers textes dont un "Évangile de l'enfance selon St.Luc".


- Dans Luc 21:5-6 il est écrit :
"Et comme quelques-uns parlaient du temple [et disaient] qu’il était orné de belles pierres et de dons, il dit : Quant à ces choses que vous regardez, les jours viendront où il ne sera laissé pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas."

----> Ce passage a été recopié dans Marc et il décrit la destruction du temple de Jérusalem par les Romains lors de la révolte de 70.
L'Évangile de Luc n'a donc pu être écrit qu'aprés 70.


- Vers 96 - 98, Clément de Rome cite des extraits ressemblant à Luc 6,31, 6,37-38 et 17,2.

----> Mais ces passages appartiennent également à la "source Q" ou Luc a puisé.
Donc rien ne prouve que l'Évangile de Luc soit déja assemblé à cette époque.


- Dans la Didaché (70 - 120) on trouve plusieurs citations de Luc.

----> Mais ces passages appartiennent également à la "source Q" ou Luc a puisé.
Donc rien ne prouve que l'Évangile de Luc soit déja assemblé à cette époque.


-Vers 107 - 115, Ignace, évêque d'Antioche, cité par Polycarpe de Smyrne, écrit ce passage dans sa "Lettre aux chrétiens de Smyrne III,2" :
"Et quand il vint a Pierre et à ceux qui étaient avec lui, il leur dit : 'Prenez, touchez-moi, et voyez que je ne suis pas un démon sans corps.' Et aussitôt ils le touchèrent, étroitement unis à sa chair et à son esprit."
Cet extrait ressemble à Luc 24,39 :
"Voyez mes mains et mes pieds ; c’est moi-même : touchez-moi, et voyez ; car un esprit n’a pas de la chair et des os, comme vous voyez que j’ai."

----> Pourtant il s'agit en fait d'un extrait de l' "Évangile des Hébreux" ainsi que le prouve ce passage cité par Jérôme, dans "Sur les hommes illustres" :
"Et quand Jésus vint auprès de Pierre et de ses compagnons, il leur dit : 'Voici, touchez-moi et voyez, car je ne suis pas un démon incorporel.' Aussitôt ils le touchèrent et ils crurent."


- En 140 - 144, Marcion arrive à Rome avec l'"Évangelion" ou "Évangile du Seigneur", une version de l'Évangile selon Luc plus courte que l'actuelle. Tertullien (160-240) en 210 et Épiphane (vers 315-403) en 377 l'accuseront d'avoir expurgé lui-même le texte de nombreux passages ... cependant il est trés possible, au contraire, que cet Évangile ait en fait représenté la forme ancienne du texte de Luc.
On sait en tout cas que toute la première partie de Luc ( l'"Évangile de l'enfance selon St. Luc") manquait. Selon Tertullien, son l'Évangélion commencait en effet ainsi :
"La quinzième année du règne de Tibère, à l'époque du procurateur Pons Pilate et le prêtre Caifa Sommo, le Sauveur fils de Dieu, descendit du ciel à Cafarnao, ville de la Galilée, pour commencer là ces prédications."

- Vers 150, le Pseudo-Clément de Rome cite plusieurs extraits de Luc :

"Celui qui me confessera devant les hommes , je le confesserai devant mon Père."
(= Luc 12,8 :
"Quiconque m’aura confessé devant les hommes, le fils de l’homme le confessera aussi devant les anges de Dieu").

"Si vous n'avez pas gardé ce qui est petit, qui vous confiera ce qui est grand ? Je vous le dit, celui qui est fidèle pour très peu de chose ,l'est aussi pour beaucoup".
(= Luc 16,10 :
"Celui qui est fidèle dans ce qui est très-petit, est fidèle aussi dans ce qui est grand ; et celui qui est injuste dans ce qui est très-petit, est injuste aussi dans ce qui est grand.")

"
Nul ne peut servir deux maîtres. Si nous désirons servir à la fois Dieu et Mammon, tant pis pour nous".
(= Luc 16,13 : "
Nul serviteur ne peut servir deux maîtres ; car ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre : vous ne pouvez servir Dieu et les richesses").

----> Parmi ces extraits, seul Luc 12,8 pourrait aussi provenir de la "Source Q".
L'Évangile de Luc existait donc bien à cette époque ... mais sous quelle forme exactement ?


- Vers 172, Tatien écrit le "Diatessaron" en compilant les quatre évangiles.
Cependant il ne parle pas de la naissance de Jésus alors que celle-ci se trouve actuellement au début de l'Évangile de Luc. Il ne décrit pas non plus la généalogie de Jésus, alors que celle-ci est bien actuellement contenue au début de l'Évangile de Luc.
Il semble donc qu'à cette époque l'Évangile de Luc était différent de l'actuel : il manquait encore sa première partie ( l'"Évangile de l'enfance selon St. Luc").

- En 178, Celse écrit son discour contre les Chrétiens où il résume la première partie de l'Evangile de Luc :
" Tu racontes que des Chaldéens, ne pouvant se tenir à l'annonce de ta naissance, se mirent en route pour venir t'adorer comme Dieu, alors que tu étais encore au berceau; qu'ils an noncèrent la nouvelle à Hérode le Tétrarque, et que celuici, dans la crainte que, devenu grand, tu n'usurpasses son trône, fit égorger tous les enfants du même âge pour te faire périr à coup sûr...... Mais un Dieu ne peut craindre la mort. Un ange vint tout exprès du ciel t'ordonner à toi et à tes parents de fuir."

--->L'"Évangile de l'enfance selon St. Luc" existait donc déja à cette époque.


- Vers 200, le morceau de papyrus Bodmer XIV-XV "P75" contient des passages de Luc 3:18-22, 3:33-4:2, 4:34-5:10, 5:37-6:4, 6:10-7:32, 7:35-39, 7:41-43; 7:46-9:2, 9:4-17:15, 17:19-18:18 et 17:22:4-24:53. Il manque cependant la "péricope de la femme adultère" (7:53 - 8:11).


- Un peu aprés 200, le papyrus "P4" contient des passages de Luc 1:58-59, 1:62-2:1, 2:6-7, 3:8-4:2, 4:29-32, 4:34-35, 5:3-8, 5:30-6: 16.
La première partie de l'Évangile de Luc ( l'"Évangile de l'enfance selon St. Luc") existe donc enfin à cette époque.


Conclusion :
De tout cela on peut conclure que l'Évangile de Luc a été écrit peu avant 140.



Datation des Actes des Apôtres (oeuvre qui passe pour être de Luc) :


-Dans les Actes des apôtres 5:36-37, qui passent pour être la suite de l'Évangile de Luc, il est écrit :
"
Car, avant ces jours-ci, Theudas se leva, se disant être quelque chose, auquel se joignit un nombre d’environ quatre cents hommes ; et il fut tué, et tous ceux qui lui obéissaient furent dissipés et réduits à rien. Après lui s’éleva Judas le Galiléen, aux jours du recensement, et il entraîna à la révolte un grand peuple après lui ; lui aussi a péri, et tous ceux qui lui obéissaient furent dispersés. Après lui, parut Judas le Galiléen, à l’époque du recensement, et il attira du monde à son parti ..."

----> Ce passage fait référence à la révolte de Theudas, hors celle-ci a eu lieu en 47.
Les actes des apôtres ont donc été écrits par Luc aprés 47.


- Vers 96 - 98 (?), Clément de Rome parle de "
donner plus volontiers que de recevoir", ce qui pourrait être une allusion aux "Actes des apôtres 20:35" ("... et nous souvenir des paroles du seigneur Jésus, qui lui-même a dit : Il est plus heureux de donner que de recevoir.").


- Un autre de ses passage,
"J'ai trouvé un homme selon mon cœur, David, le fils de Jessé", semble se référer au Actes des apôtres 13:22 ("J’ai trouvé David, le fils de Jessé, un homme selon mon cœur, qui fera toute ma volonté").

----> Cela indique que les "Actes des Apôtres" pouvaient exister dés cette époque.


- Cependant dans les Actes des apôtres 27:27 la mer Adriatique est nommée :
"Quand la quatorzième nuit fut venue, comme nous étions portés çà et là sur la mer Adriatique, les matelots, au milieu de la nuit, pensèrent que quelque terre les approchait "

----> Hors cette mer ne prendra ce nom qu'en 140 ap. JC; auparavant elle portait le nom de mer d'Illyrie.
Donc ce passage des actes des apôtres n'a pu être écrit qu'aprés 140.


- De plus, lorsque Marcion arrive à Rome, vers 140-144, il possède une version de l'Évangile selon Luc alors qu' il ne semble pas connaître les "Actes des Apôtres", texte qui est pourtant, pense-t-on, du même auteur.


- C'est vers 150 (ou 120 - 135) que le livre des "Actes des apôtres" est cité pour la 1ère fois, par Polycarpe de Smyrne.


Conclusion :

De tout cela on peut conclure que les Actes des apôtres pourraient dater d'un peu après 140, mais qu'ils contiennent des parties ayant été écrites avant 98.


Datation de l'Évangile de Matthieu :


Il a été démontré que l'Évangile de Matthieu avait été écrits en combinant trois sources au moins :
- La "Source Q", recueil de paroles de jésus.
- L'Évangile de Marc, pour la partie narrative.
- Divers textes dont un "Évangile de l'enfance selon St.Matthieu".


- Dans Matthieu 17:24 il est écrit :
"Et lorsqu’ils furent venus à Capernaüm, les receveurs des didrachmes vinrent à Pierre, et dirent : Votre maître ne paye-t-il pas les didrachmes ?"

----> Cela semble décrire l'impôt que les Juifs devaient payer au temple de Jérusalem pour son entretien et son service. Donc ce passage a du être écrit quand le temple de jérusalem existait encore.
Cependant il est probable que ce passage décrive plutôt l'impôt romain postérieur à la destruction du tempe en 70.


- Cependant dans Matthieu 24:1- 2 il est écrit :
"Et Jésus sortit et s’en alla du temple ; et ses disciples s’approchèrent pour lui montrer les bâtiments du temple. Et lui, répondant, leur dit : 'Ne voyez-vous pas toutes ces choses ? En vérité, je vous dis : Il ne sera point laissé ici pierre sur pierre qui ne soit jetée à bas'. "

----> Ce passage a été recopié dans Marc et il décrit la destruction du temple de Jérusalem par les Romains lors de la révolte de 70.
L'Évangile de Luc n'a donc pu être écrit qu'aprés 70.


- Dans Matthieu 21:43 il est écrit :
"C’est pourquoi je vous dis que le royaume de Dieu vous sera ôté, et sera donné à une nation qui en rapportera les fruits."
Et dans Matthieu 28:15 il est écrit :
"Et eux, ayant pris l’argent, firent comme ils avaient été enseignés ; et cette parole s’est répandue parmi les Juifs jusqu’à aujourd’hui."

----> Cela montre qu'à cette époque les Chrétiens s'étaient déja séparé des Juifs.
Hors on pense que c'est autour de 80 - 90 que Gamaliel II (patriarche de Yabneh de 80 à 116) a créé la prière "Birkat ha-minim" (malédiction contre les hérétiques) contre les Nazaréens (premiers Chrétiens) et commenca à les chasser des synagogues (cf. Talmud de Babylone, Berakhot 28b-29a).
L'Évangile de Matthieu date donc d'aprés 80 - 90.


- Vers 96 - 98 (?), Clément de Rome cite des extraits ressemblant à Matthieu 6:14-15, 7:1-2, 18:6 et 26:24.
.----> Mais ces passages font également partie de la "source Q" ou Matthieu a puisé.
Donc rien ne prouve que l'Évangile de Matthieu était déjà assemblé à cette époque.


- Vers 70-120, dans la Didaché, on trouve plusieurs citations de Matthieu.
----> Mais ces passages font également partie de la "Source Q" ou Matthieu a puisé.

Donc rien ne prouve que l'Évangile de Matthieu était déjà assemblé à cette époque.


- Il existe cependant quelques citations dans la Didaché qui ne semblent pas faire partie de la "Source Q" :
Didaché I,2 :
"Et tout ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît, ne le fais pas non plus à autrui."
(cf. Matthieu 7:12 :
"Toutes les choses donc que vous voulez que les hommes vous fassent, faites-les-leur, vous aussi, de même ; car c’est là la loi et les prophètes.")

----> Mais cette parole provient aussi du sage Hillel, un peu antérieur à Jésus.

"Ne donnez pas aux chiens ce qui est saint"
(cf. Matthieu 7,6 :
"Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens, ni ne jetez vos perles devant les pourceaux, de peur qu’ils ne les foulent à leurs pieds, et que, se retournant, ils ne vous déchirent.")

----> Cependant ce passage se trouvant coincé entre deux extraits de la "Source Q" inclus dans Matthieu, il n'est donc pas exclu qu'il en ait fait partie.
De plus cette parole est également dans l'Évangile de Thomas (Logion 93 :
"Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens, de peur qu’ils ne le prennent pour du fumier. Ne jetez pas les perles aux porcs de peur qu’ils n’en fassent de l’ordure.")

Didaché X,3 :
"Souviens-Toi, Seigneur, de Ton Eglise, pour la délivrer de tout mal et la rendre parfaite dans Ton amour et rassemble-la des quatre vents, elle que tu as sanctifiée, dans Ton royaume que Tu lui as préparé, car à Toi sont la puissance et la gloire pour les siècles."
(cf. Matthieu 24,31 :
"Et il enverra ses anges avec un grand son de trompette ; et ils rassembleront ses élus des quatre vents, depuis l’un des bouts du ciel jusqu’à l’autre bout." )

----> Mais ce passage existe aussi chez Marc 13,27 (
"et alors il enverra ses anges, et il rassemblera ses élus des quatre vents, depuis le bout de la terre jusqu’au bout du ciel."). Hors on sait que l'Évangile de Marc est antérieur à celui de Matthieu (puisque Matthieu a puisé dans Marc). Donc rien ne prouve qu'il existait déjà un Évangile de Matthieu indépendant à cette époque.


- Vers 70 /130 est écrite l'"épître de Barnabé / Barnabas" ou on trouve une citation de Matthieu 22:14.
----> Mais ce passage fait également partie de la "source Q" ou Matthieu a puisé.

On y trouve aussi des citations de Matthieu 22,45 et 27,34-48.
----> Mais ces passages font partie aussi de l'Évangile de Marc ou Matthieu a puisé.
Donc rien ne prouve que l'Évangile de Matthieu soit déja assemblé à cette époque.


- Vers 107 - 115, Ignace d'Antioche écrit ceci dans sa "lettre à Polycarpe II, 2" :
" Sois en toutes choses prudent comme le serpent et simple toujours comme la colombe."
Cela semble être un extrait de Matthieu 10,16 :
"Soyez donc prudents comme les serpents, et simples comme les colombes"

----> Mais cela pourrait tout aussi bien être un extrait de Thomas, logion 39 :
"Quant à vous, soyez prudents comme les serpents et simples comme les colombes."
De plus on pense que les écrits d'Ignace contiennent des interpolations datant d'après 160 (ses écrits existent sous plusieurs formes, celles les plus longues portant des traces de nombreux ajouts tardifs.)
Donc rien ne prouve que l'Évangile de Matthieu existait déjà à cette époque.

- Vers 95 - 140, le texte du "Pasteur d'Hermas" contient un passage faisant penser à Matthieu :
Hermas 106 :
"Vous tous qui persévérerez ainsi et serez comme les petits enfants; sans malice, vous serez plus glorieux que tous les précédents."
(cf. Matthieu 18, 3 :
"En vérité, je vous dis : si vous ne vous convertissez et ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux.")

----> Mais ce passage n'est pas extraordinairement ressemblant. Il n'est pas certain qu'il vienne vraiment de Matthieu.


- Vers 110 - 135, Papias, évêque de Hiérapolis en Phrygie (80 - 155), écrit (rapporté par Eusèbe) une "Interprétation des Paroles du Seigneur" ou il dit :
"Matthieu réunit donc en langue hébraïque (araméen) les logions (paroles) de Jésus et chacun les interpréta comme il en était capable."

----> Mais ca ne peut donc pas être l'Évangile actuel de Matthieu car ce dernier n'est pas un recueil de logions et il ne semble pas être une traduction directe de l'araméen. Peut-être que Papias parle ici plutôt de la "source Q" ?


- Vers 120 - 135 (ou 150) Polycarpe de Smyrne (69 - 155 ou 167) écrit ceci dans "Polycarpe 1:2,3" :
"Heureux les pauvres et les persécutés à cause de (la) justice, car à eux est le royaume des cieux."
Clément d'Alexandrie (150 - 215) écrit aussi ceci dans les "Stromates | IV,6,41" :
"Heureux, dit-il, les persécutés à cause de la justice, parce qu'ils seront appelés fils de Dieu. Ou, comme disent certains de ceux qui changent les évangiles : Heureux les persécutés pour la justice, car ils seront parfaits et heureux les persécutés à cause de moi, car ils auront un lieu où ils ne seront pas persécutés."

----> Ceci est bien, aparemment, une citation de Matthieu 5:3 et 10 :
"Bienheureux les pauvres en esprit, car c’est à eux qu’est le royaume des cieux ...
bienheureux ceux qui sont persécutés à cause de la justice, car c’est à eux qu’est le royaume des cieux."

Polycarpe cite aussi Matthieu 5:7, 5:10, 7:1-2 et 26:41.

----> Mais ces passages appartiennent également à la "source Q" ou Matthieu a puisé.
Donc rien ne prouve que l'Évangile de Matthieu soit déja assemblé à cette époque.
(Seule la citation de Matthieu 26:41 pourrait ne pas être de la "Source Q".)


- Justin (100-165) cite un passage de Matthieu dans sa "Première Apologie 16,13" :
"Car beaucoup viendront en mon nom, au-dehors revêtus de peaux de brebis, mais au-dedans sont loups ravisseurs A leurs oeuvres vous les reconnaîtrez."
(= Matthieu 7,15 :
"Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous en vêtements de brebis, mais qui au dedans sont des loups ravisseurs.")

----> Ce passage était coincé entre deux grands extraits tirés de la "Source Q", et il n'est donc pas impossible qu'il ait fait partie de celle-ci.
Sinon ça signifie que l'Évangile de Matthieu existait enfin à cette époque.


- Vers 150, le Pseudo-Clément de Rome cite plusieurs extraits de Matthieu :

"Ce n'est pas en me disant "Seigneur, Seigneur", dit-il, que l'on sera sauvé, mais en accomplissant la justice ."
(= Matthieu 7,21:
"Ce ne sont pas tous ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le royaume des cieux ; mais celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux").

"
Celui qui me confessera devant les hommes , je le confesserai devant mon Père."
(= Matthieu 10,32 :
"Quiconque donc me confessera devant les hommes, moi aussi je le confesserai devant mon Père qui est dans les cieux ").

"
Mes frères sont ceux qui font la volonté de mon Père"
(= Matthieu 12,50 :
"Car quiconque fera la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère.")

"Que vaut à l'homme de gagner le monde entier, s'il ruine sa propre vie ?"
(= Matthieu 16,26 : "
Car que profitera-t-il à un homme s’il gagne le monde entier, et qu’il fasse la perte de son âme ; ou que donnera un homme en échange de son âme ?")

"
Serviteur mauvais et paresseux,il fallait que tu places mon argent chez les banquiers et moi, arrivé, j'aurais réalisé mon bien. Jetez le serviteur inutile dans les ténèbres extérieures."
(= Matthieu 25,26-27 :
"Méchant et paresseux esclave, tu savais que je moissonne où je n’ai pas semé, et que je recueille où je n’ai pas répandu, tu aurais donc dû placer mon argent chez les banquiers, et, quand je serais venu, j’aurais reçu ce qui est à moi avec l’intérêt.")

"
Beaucoup viendront à moi en vêtement de brebis, mais au-dedans sont loups ravisseurs. D'après leurs fruits vous les reconnaîtrez ."
(= Matthieu 7,15 :
"Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous en vêtements de brebis, mais qui au dedans sont des loups ravisseurs.")

----> De tous ces extraits, seul Matthieu 10,32 pourrait aussi être une citation de la "Source Q".
Donc l'Évangile de Matthieu devait exister à cette époque.


- Vers 152 - 160, Justin de Naplouse (Justin Martyr, 100 - 163) écrit ceci dans son "Dialogue avec Tryphon 78:1-2" :
"Et en effet, ce roi Hérode apprit des anciens de votre peuple, les mages d'Arabie étant venus vers lui et ayant dit avoir reconnu à un astre qui avait brillé dans le ciel qu'un roi était né dans votre pays, et nous sommes venus nous prosterner devant lui ; et les anciens dirent : 'A Bethléem, car il est écrit dans le prophète : Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n'es nullement le moindre parmi les clans de Juda, car de toi sortira un chef qui paîtra mon peuple. ' Donc, les mages d'Arabie étant venus à Bethléem et s'étant prosternés devant l'enfant, lui offrirent en présent de l'or et de l'encens et de la myrrhe. Puis par révélation, après s'être prosternés devant l'enfant à Bethléem ils reçurent l'ordre de ne pas revenir vers Hérode."

----> C'est un résumé de Matthieu 2:1-12.
Cela montre que la première partie de Matthieu (l' "Évangile de l'enfance selon St. Matthieu") existait à cette époque.


- Vers 172, Tatien écrit le "Diatessaron" en compilant les quatre évangiles.
Cependant il ne parle pas de la naissance de Jésus alors que celle-ci se trouve pourtant au début de l'Évangile de Matthieu. Il ne décrit pas non plus la généalogie de Jésus, alors que celle-ci est bien contenue au début de l'Évangile de Matthieu. Il semble donc qu'à cette époque l'Évangile de matthieu était différent de l'actuel : Sa première partie ( l'"Évangile de l'enfance selon St. Matthieu") n'y avait pas encore été jointe. (Ou alors Tatien n'avait pas voulu l'utiliser).


- Vers 193 - 200, Clément d'Alexandrie écrit aussi :
" Rappelez-vous les paroles de Jésus notre Seigneur : 'Malheur à cet homme-là, a-t-il dit, mieux vaudrait pour lui n'être pas né que de scandaliser un seul de mes élus. Mieux vaudrait pour lui se faire attacher une meule et jeter à la mer plutôt que de pervertir un seul de mes élus'."

----> C'est une citation de Mathieu 18, 6 :
"Et quiconque est une occasion de chute pour un de ces petits qui croient en moi, il serait avantageux pour lui qu’on lui eût pendu au cou une meule d’âne et qu’il eût été noyé dans les profondeurs de la mer."

----> A noter, cependant, que ce passage appartient également à la "source Q".


- Clément parle aussi d'un "Évangile des Hébreux", utilisé par les Nazaréens et les Ébionites, et qui semble être une version hébraïque de l'Évangile de Matthieu. Il serait cependant plus court de 300 lignes, ne possédant apparemment pas les chapitres du début de Matthieu (selon Nicéphore 758-828). Pour Jérôme cet Évangile correspondrait à la version primitive de l'Évangile de Matthieu.


- A la fin du 2ème siècle, le morceau de papyrus Oxyrhynchus 4404 "P104" contient des passages de Matthieu 21:34-37 et 21:43-45.


- Vers 200, le morceau de papyrus Magdalen "P 64", conservé à Oxford, contient des passages de Matthieu 3:9, 3:15, 5:20-22, 5:25-28, 26:7-8, 26:10, 26:14-15, 26:22-23 et 26:31-33.


- Vers 200, le morceau de papyrus Oxyrhynchus 2683 & 4405 "P77" contient un passage de Matthieu 23:30-39.


- Vers 200, le morceau de papyrus Oxyrhynchus 4403 "P103" contient des passages de Matthieu 13:55-56 et 14:3-5.


- Vers 200 (ou aprés), le papyrus fragmenté "P64 - P67" contient des passages de Matthieu 26:7-8, 26:10, 26:14-15, 26:22-23, 26:31-33. (P 64) et Matthieu 3:9, 3:15, 5:20-22, 5:25-28 (P67).


- Dans Matthieu 16:18, , il est écrit :
"Tu es Pierre et sur cette pierre je batirais mon Eglise"

----> C'est le seul emploi du mot "Eglise" (ekklesia) dans les Evangiles, et qui plus est dans le sens de "bâtiment", ce qui est totalement anachronique : à l'époque de Jésus, en effet, ce mot désignait encore seulement une assemblée. Pourtant le verbe "oikodomêsô" qui l'accompagne ici ne peut signifier que "construire en maçonnerie". De plus ce verbe est employé ici avec le datif au lieu de l'accusatif ... hors le datif n'a remplacé l'accusatif dans cette conjugaison qu'à partir du 6ème siècle ap.JC seulement.
Ce passage a donc été rajouté tardivement, vers le 6ème siècle, pour justifier la prédominance de l'évèque de Rome (le Pape) sur les autres évèques.


Conclusion :
De tout cela il est difficile de conclure.
L'Évangile de Matthieu pourrait avoir été écrit un peu avant le milieu du 2ème siècle, mais une version plus ancienne aurait peut-être ou exister déjà dans la 1ère partie de ce même siècle.


Datation de l' Évangile des Hébreux / Évangile des Nazaréens :


- Vers 107 - 115, Ignace, évêque d'Antioche, écrit ce passage dans sa "Lettre aux Smyrniotes III,2" :
"Et quand il vint à Pierre et à ceux qui étaient avec lui, il leur dit : 'Prenez, touchez-moi, et voyez que je ne suis pas un démon sans corps.' Et aussitôt ils le touchèrent, étroitement unis à sa chair et à son esprit."

----> Il semble s'agir d'un extrait de l' "Évangile des Hébreux" tel qu'il sera aussi cité par Jérôme, dans "Sur les hommes illustres" :
"Et quand Jésus vint auprès de Pierre et de ses compagnons, il leur dit : 'Voici, touchez-moi et voyez, car je ne suis pas un démon incorporel.' Aussitôt ils le touchèrent et ils crurent."
(Ce passage ressemble aussi, vaguement, à Luc 24,39 :
"Voyez mes mains et mes pieds ; c’est moi-même : touchez-moi, et voyez ; car un esprit n’a pas de la chair et des os, comme vous voyez que j’ai.")

- Vers 150, le Pseudo-Clément de Rome fait cette citation tirée de l'Évangile des Hébreux :
"Si vous êtes avec moi, rassembés dans mon sein, et si vous transgressez mes commandements, je vous rejetterai, et m'écrierai : 'Partez loin de moi , je ne vous connais pas ,je ne sais d'ou vous êtes, ouvriers d'iniquité ! '. "
(cf. Codex 1424 :
"Si vous étiez dans mon sein et ne faisiez pas la volonté de mon Père qui est dans les Cieux, je vous rejetterais de mon sein.")


- Vers 185, Irénée de Lyon (130-202) cite l'existance des Ébionites et de leur livre appelé l' "Évangile des Ébionites" ou "Évangile de Matthieu".


- Vers 193 - 200, Clément d'Alexandrie (150 - 215) parle d'un "Évangile des Hébreux", utilisé par les Nazaréens et les Ébionites. Il en cite ce passage :
"Et il arriva que, lorsque le Seigneur fut remonté de l'eau, toute source de l'Esprit Saint descendit, se reposa sur lui et lui dit : 'Mon Fils, dans tous les prophètes, j'attendais que tu viennes pour me reposer en toi. Car tu es mon repos, tu es mon Fils premier-né qui règne pour l'éternité.' "

Clément en cite également cet autre passage (dans Stromates II, 9, 4 et 5, 14) :
"Celui qui s’étonne régnera. Et celui qui régnera goûtera le repos. Qui cherche poursuivra sa quête jusqu’à ce qu’il ait trouvé. Et qui trouve s’étonnera. Et qui s’étonne régnera et qui règne jouira du repos."
"Il cherche qui n'abandonnera pas jusqu'à ce qu'il trouve, et ayant trouvé, il sera surpris, et ayant été surpris, il l'emporte et ayant prévalu, il repose en paix. "

(cf. logion 2 de l’évangile de Thomas : Jésus a dit :
" Que celui qui cherche ne cesse pas de chercher jusqu'à ce qu'il trouve. Et quand il aura trouvé, il sera troublé ; quand il sera troublé, il sera émerveillé, et il régnera sur le Tout. " - cf. Papyrus d'Oxyrhynque 654 : "Jésus dit : 'Celui qui cherche, qu'il ne cesse pas de chercher jusqu'à ce qu'il ait trouvé; et quand il aura trouvé, il sera stupéfait; et ayant été stupéfait, il régnera; et ayant régné, il se reposera'. ")


- Origène (185 - 254) fait également des citations tirées de l'Évangile des Hébreux.


- Eusèbe de Césarée (265 – 339) dit ( dans l' "Histoire ecclésiastique. 3: 39") que la "péricope de la femme adultère" existe dans l' "Évangile des Hébreux" (à cette époque elle n'est pas encore insérée dans l'Évangile de Jean).


- Épiphane (315 - 403) fait des citations de passages de l'Évangile des Ébionites. Il estime que cet Évangile ressemble à une version écourtée de l'Évangile de Matthieu (il manque la 1ère partie).


- Vers 374 - 379, Jérôme prend connaissance d'un exemplaire de l' "Évangile de Matthieu en araméen" ("Évangile des Hébreux" ou "Évangile des Nazaréens") employé par les Judéo-Chrétiens Nazaréens. Il écrit (dans "Au sujet des hommes illustres III") :
"Avec la permission des Nazaréens qui habitent Béroé (Alep), en Syrie, et qui se servent de cet écrit, j'ai pu en prendre copie."
Dans le "Commentaire sur Matthieu XII, 13", il ajoute :
"Il est appelé par la plupart le Matthieu authentique."
Il considère cet "Évangile des Hébreux" comme étant la version primitive de l'Évangile de Matthieu. Selon Nicéphore (758-828) elle est cependant plus courte de 300 lignes, ne possédant apparemment pas les chapitres du début de l'Évangile de Matthieu actuel.


Conclusion :
De tout cela on pourrait déduire qu'il existait peut-être déjà une version primitive, plus courte, de l'Évangile de Matthieu, en hébreu (= araméen ?), dés le début du 2 ème siècle. Son existance ne devient certaine qu'à partir du milieu de ce siècle.



Datation de l'Évangile de Jean et de l'Apocalypse de Jean :


- Selon Irénée l'Apocalypse aurait été éditée "vers la fin du règne de Domitien", soit peu avant 96, et l'Évangile selon Jean "sous Trajan", soit entre 98 et 117.


- Dans Jean 5:2 il est écrit :
"Or il y a à Jérusalem, près de la porte des brebis (Probatique), un réservoir d’eau, appelé en hébreu Béthesda, ayant cinq portiques."

----> Le présent de l’indicatif est utilisé pour parler de l’existence du réservoir alors que tout le reste du récit est à l’aoriste, c’est-à-dire au passé. C'est à dire que, pour Jean, les faits relatés faisaient partie du passé mais que la piscine existait toujours à l'époque ou il écrivait. Étant donné que le réservoir a été détruit lors de la révolte de 70 ou 132-13), ce passage de l'Évangile n'a donc pu être écrit qu'avant. A moins que l'auteur n'ait été plus tardif mais aurait corrigé ce genre de détail afin que son texte reste plausible historiquement.


- Cependant dans Jean 9:22 il est écrit :
"Ses parents dirent ces choses, parce qu’ils craignaient les Juifs ; car les Juifs étaient déjà convenus que si quelqu’un le confessait comme le Christ, il serait exclu de la synagogue."
Et dans Jean 12:42 il est écrit :
"Toutefois plusieurs d’entre les chefs mêmes crurent en lui ; mais à cause des pharisiens ils ne le confessaient pas, de peur d’être exclus de la synagogue"

----> Cela se passait donc aprés l'époque (vers 80 - 90) ou le patriarche Gamaliel II avait créé la prière "Birkat ha-minim" (malédiction contre les hérétiques) contre les Nazaréens (premiers Chrétiens) et avait commencé à les chasser des synagogues (cf. Talmud de Babylone, Berakhot 28b-29a).


- Dans Jean 5:43 il est écrit :
"Moi, je suis venu au nom de mon Père, et vous ne me recevez pas ; si un autre vient en son propre nom, celui-là vous le recevrez."

----> Cela semble parler de Bar Kochba, la faux messie que les juifs ont suivi lors de la révolte de 132-135. Dans ce cas l'Évangile de Jean daterait d'aprés 135.
A moins que ce passage n'évoque plutôt Paul ?


- En 135-140 Papia semble connaitre un passage de l'Apocalypse 22:2. Il cite également "l'histoire d'une femme accusée de nombreux péchés devant le Seigneur". On peut penser qu'il s'agit de la "péricope de la femme adultère" qui sera insérée plus tard dans l'Évangile de Jean.


Vers 150 - 200 (ou 130 - 165), le morceau de papyrus "Egerton 2" contient des extraits ressemblant à l'évangile de Jean 5:39-47, 7:30, 7:44, 8:20, 8:59, 9:29, 10:31, 10:39 et à l'épisode des lépreux de l'évangile de Marc.

----> Cependant il semble bien qu'il s'agisse d'un évangile inconnu car il possède aussi des parties sans parallèles avec la Bible actuelle.
Ce texte pourrait être la source ou Jean aurait puisé des phrases pour composer son Évangile.


- Vers 152 - 160, Justin de Naplouse (Justin Martyr, 100 - 163) semble avoir connu l'Apocalypse de Jean.


- Théophile d'Antioche (évêque d'Antioche vers 168 après J.C) parle du "Verbe / Logos" incarné qui est le démiurge créateur du monde. Cette idée du Logos sort directement de la philosophie de Philon d'Alexandrie (-12 + 54) qui assimilait la sagesse de Dieu au Logos de Platon.
Athénagoras (133 - 190) parle aussi du Verbe (non incarné) et cite quelques paroles ressemblant au "Sermon sur la montagne".
Le Verbe / Logos de l'Évangile de Jean semble avoir été trés influencé par toutes ces spéculations.


- Vers 172, Tatien écrit le "Diatessaron" en compilant les quatre évangiles. Il semble probable que l'évangile de Jean en faisait déja partie. Cependant Tatien ne reprend pas la péricope de la femme adultère, ce qui montre qu'elle ne faisait toujours pas partie de l'Évangile de Jean.


- Vers 185, Irénée de Lyon (130-202) cite l'Évangile de Jean pour la première fois clairement sous son nom (Il connait également l'Apocalypse).
----> Donc cet Évangile existait d'une manière certaine à cette époque.


- Au 2ème siècle, le morceau de papyrus Oxyrhynchus 3523 "P90" contient des passages de Jean 18:36-19:1 et 19:2-7.


- Au 2ème siècle, le morceau de papyrus Oxy 3523 "P90" contient des passages de Jean 18:36-40 et 19:1-7.

- Au 2ème siècle, le morceau de papyrus "P98" contient un passage de l' Apocalypse 1:13-2:1.

- Vers 170-190, le morceau de papyrus Bodmer II "P 66" contient des passages de Jean 1:1-6:11, 6:35-14:26, 14:29-30, 15:2-26, 16:2-4, 16:6-7, 6:10-20:20, 20:22-23 et 20:25-21:9. Par contre il ne contient pas la péricope de la femme adultère (7:53 - 8:11).

- Vers 200 (ou 120 - 150) le fragment de papyrus Rylands 457 "p 52" contient des passages de Jean 18:31-33 et 18:37-38.

- Vers 200, le morceau de papyrus Bodmer XIV-XV "P75" contient des passages de Jean 1:1-11:45, 11:48-57, 12:3-13:1, 13:8-9, 14:8-29 et 15:7-8.

- Vers 200, le morceau de papyrus Oxyrhynchus P2" contient des passages de Jean 1:10-12 et 1:15-18.

- Eusèbe de Césarée (265 – 339) a transmis ce passage de Dionysius sur l'Apocalypse (Hist. VIl. 25) :
"Quelques uns avant nous (les Alogiens) l'ont écartée et essayé de la réfuter, en critiquant chaque chapitre et déclarant le livre entier comme n'ayant ni sens ni raison. Ils disent qu'il a un faux titre et qu'il n'est pas de Jean. Ils vont même, jusqu'à affirmer qu'il n'est pas une révélation, attendu qu'il est couvert d'un voile si épais d'ignorance qu'aucun Apôtre, aucun des saints hommes, des hommes, de l'Eglise, ne saurait en être l'auteur ; mais que c'est Cérinthe, le fondateur de la secte des Cérinthiens, qui l'aurait composé et attribué à Jean ; car les Cérinthiens croient qu'il y aura un règne terrestre du Christ, ..."


- Caïus (vers 200) disait la même chose (selon Hippolyte), ainsi que Denys et Épiphane.


- Vers 320-330 : Insertion de la "péricope de la femme adultère" dans l'Évangile de Jean (Bibles occidentales) ou dans l'Évangile de Luc (Bibles Césaréennes F13).

Conclusion :
L'Apocalypse (de Jean ?) semble avoir été écrite un peu avant 135 (ou alors sa compilation aurait commencé à ce moment).
L'Évangile de Jean daterait aparemment d'un peu avant 152.



Datation de l' Évangile apocryphe de Thomas :


Les logions (paroles de jésus) contenus dans l'Évangile de Thomas ressemblent beaucoups à plusieurs paroles de Jésus contenues dans les autres Évangiles (y compris dans leurs parties issues de la "Source Q"). Cependant ces logions ont une forme plus brutes et moins travaillées que leurs homologues des 4 Évangiles, comme s'ils en constituaient une version plus primitive, et donc plus ancienne.


- Dans la 1ère épître de paul aux Corinthiens 2:9 il est écrit ceci :
"Ce que l’œil n’a pas vu, et que l’oreille n’a pas entendu, et qui n’est pas monté au cœur de l’homme, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment."

----> Cela semble être une reprise du 17ème logion de l'Évangile deThomas :
"Jésus dit : Je vous donnerai ce que jamais œil n'a vu, et ce que jamais oreille n'a entendu, et ce que jamais main n'a atteint, et cela qui n'est jamais monté au cœur de l'homme. "
Cela démontrerait que cet Évangile existait déja à la fin du 1er siècle, époque ou l'épitre de Paul était connu.
Cependant ce passage pourrait tout aussi bien avoir été puisé dans Ésaïe 64:4, dans l'Ancien testament :
"Et jamais on n’a entendu, jamais on n’a ouï de l’oreille, jamais l’œil n’a vu, hors toi, ô Dieu, ce que Dieu a préparé pour celui qui s’attend à lui."


- Vers 70 - 120, dans la Didaché IX,5, on trouve ce passage :
"... Le Seigneur a dit : Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens."

----> Cela pourrait être une citation du logion 93 de l'Évangile de Thomas :
"Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens, de peur qu’ils ne le prennent pour du fumier. Ne jetez pas les perles aux porcs de peur qu’ils n’en fassent de l’ordure."
Cependant on trouve aussi ce passage dans l'Évangile de Matthieu 7,6 :
"Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens, ni ne jetez vos perles devant les pourceaux, de peur qu’ils ne les foulent à leurs pieds, et que, se retournant, ils ne vous déchirent."
Donc il n'est pas certain que le texte de l'Évangile de Thomas existait déja de manière indépendante à cette époque.


- Vers 172, Tatien écrit le "Diatessaron" en compilant les quatre évangiles. Les paroles de Jésus qu'il contient ressemblent cependant plus à leur version de l'évangile de Thomas qu'à leur version des évangiles de Luc et de Matthieu : On trouve en effet 60 passages très proches de l'"Évangile de Thomas".
Cela pourrait signifier que l'un des 4 évangiles utilisés était celui de Thomas, et donc que celui-ci existait déja.
Ou alors cela signifie simplement que les paroles de Jésus contenues dans tous les Évangiles étaient encore sous leur forme primitive, non améliorée.


- Origène (185 - 254) parle de l' Évangile de Thomas et en site le logion 82.


- Vers 193 - 200, Clément d'Alexandrie (150 - 215) cite le logion 57 ainsi que le logion 2 :
"Celui qui s’étonne régnera. Et celui qui régnera goûtera le repos. Qui cherche poursuivra sa quête jusqu’à ce qu’il ait trouvé. Et qui trouve s’étonnera. Et qui s’étonne régnera et qui règne jouira du repos." (cf. Thomas, logion 2 : "Jésus dit: 'Que celui qui cherche ne cesse point de chercher jusqu'à ce qu'il trouve: lorsqu'il trouvera, il sera ému; et lorsqu'il sera ému, il admirera, et il régnera sur l'univers'!"). Mais il prétend que ce logion 2 provient de l'"Évangile des Hébreux".)


- Les papyrus d'Oxyrhynque 654, 1 et 655 contiennent une version ancienne de l'Évangile de Thomas. ils datent d'environ 200 - 250.


- Saint Augustin d’Hippone (354-430) cite aussi le logion 52 de Thomas :
"Lorsque les apôtres… demandaient au Seigneur ce qu’il pensait des prophètes des juifs, il répondit : celui qui est vivant devant vous, vous le rejetez et nous parlons des morts ! " (= Thomas 52 : "Ses disciples lui dirent: 'Vingt-quatre prophètes ont parlé en Israèl et tous, ils se sont exprimés en toi ! ' Il leur a dit: 'Vous avez délaissé Celui qui est vivant en face de vous, et vous avez parlé des morts ! ').

Conclusion :
Il est difficile de conclure sur la date de création de l'Évangile de Thomas. Il est possible que sa rédaction se soit étalée sur une durée assez longue, par intégration de textes tirés de sources diverses.



Datation des évangiles apocryphes de l'enfances :

 

- Vers 130 - 140 : Les deux premières parties au moins (jusqu'au chapitre 22) de l'"Évangile de l'enfance" / "Protévangile de Jacques" / "Jacques l'Hébreu" semblent déja connues (Justinien en fait état). Ce texte raconte l'enfance de Jésus mais il ignore tout des coutumes juives.
Ce livre a du être remanié tardivement car il utilise le titre de "Mère de Dieu" (theotokos) pour Marie ... hors ce titre ne date que du concile d’Ephèse en 431.


- Vers 152 - 160, Justin de Naplouse (Justin Martyr, 100 - 163) connait l'histoire de l'enfance de Jésus telle qu'elle est racontée dans Matthieu 2:1-12 (ce passage n'est probablement pas encore intégré au début de l'Évangile de Matthieu) et peut-être aussi celle du Protévangile de Jacques.


- Vers 185, Irénée de Lyon (130-202), dans "Contre les hérésies I,20,1" semble connaitre ce passage du "Pseudo-Thomas" / "Histoire de l'enfance de Jésus 14,1-2" sous une forme primitive :
"Lorsque Joseph vit qu'il était intelligent, il ne voulut pas qu'il demeurât illettré et il l'amena chez un maître. Et le maître lui ordonna : 'Dis Alpha !' puis il ajouta : 'Dis Bêta !' Et Jésus lui dit : 'Dis-moi d'abord ce que c'est qu'alpha, et je te dirai ce que c'est que bêta.' S'étant fâché, le maître le frappa (et aussitôt tomba mort)."


-Vers 172, Tatien écrit le "Diatessaron" en compilant les quatre évangiles. Il n'utilise pas les passages de Luc et Matthieu racontant l'enfance de Jésus. Il est probable que ces passages n'étaient pas encore intégrés dans les Évangiles.


- Vers la fin du 2ème siècle : L'Évangile de l'enfance selon St. Luc est ajouté au début de l'Évangile de Luc et l'Évangile de l'enfance selon St. Matthieu est ajouté au début de l'Évangile de Matthieu.


- Origène (185 - 254) cite un "Livre de Jacques" qui doit être le "Protévangile de Jacques". C'est ce texte qui a inventé la virginité perpétuelle de marie, les demi-frêres de jésus et grotte de la nativité :

Protévangile de Jacques 18-1 :
"Et Joseph trouva là une grotte, l'y introduisit, mit près d'elle ses fils et sortit chercher une sage-femme juive dans la région de Bethléem."

Protévangile de Jacques 19-2 :
" ... Et la sage-femme partit avec Joseph et ils se tinrent à l'endroit de la grotte. Et une nuée lumineuse couvrait la grotte. ... Et aussitôt la nuée se retira de la grotte et une grande lumière apparut dans la grotte, au point que les yeux ne pouvaient la supporter. Et, peu à peu, cette lumière se retirait jusqu'à ce qu'apparût un nouveau-né; et il vint prendre le sein de sa mère Marie."

- Clément d'Alexandrie (150 - 215) semble connaitre également le Protévangile de Jacques. Cependant sa fin est différente de la version existant actuellement.

- Vers 300, le papyrus "Bodmer 5" contient le Protévangile de Jacques sous le nom de "Nativité de Marie, Révélation de Jacques".

- Au 3 / 4 ème siècle : Existence du Pseudo-Thomas / Évangile de la petite enfance selon Thomas / Histoire de l'enfance de Jésus. Il contient un épisode tiré de l' "Évangile de l'enfance selon St Luc (Luc 2:41-52).

- Au 5ème siècle : Existence du "Livre arménien de l'enfance", qui dérive du Pseudo-Thomas.

- Vers 550-570 : Création du Pseudo-Matthieu / Mathias / "Sur l'origine de la Très Sainte Vierge Marie et l'enfance du Sauveur" en se basant sur le Protévangile de Jacques et le Pseudo-Thomas, et en y ajoutant le récit de la fuite en Égypte. C'est ce livre qui a ajouté le boeuf et l'âne dans la grotte de la nativité.
Évangile de l'enfance du Pseudo-Matthieu 14 :
"Or le troisième jour après la naissance du Seigneur, Marie sortit de la grotte, entra dans une étable et elle déposa l’enfant dans la crèche, et le bœuf et l’âne l’adorèrent. Ainsi fut accompli ce qui avait été dit par le prophète Isaïe : 'Le bœuf a connu son maître et l’âne la crèche de son maître.' (Isaïe 1,3) Ces animaux donc qui avaient l’enfant entre eux l’adorait sans cesse. Ainsi fut accompli ce qui avait été dit par le prophète Habacuc : 'Tu te manifesteras au milieu de deux animaux'. (Habacuc 3,2) "

- Vers le 6ème ou 7ème siècle : Existance de l'"Évangile en arabe de l'enfance" / "Vie de Jésus en arabe" (njilu 't Tufuliyyah) inspiré de l'"Histoire de l'enfance de Jésus".


Conclusion :
La création d'Évangiles racontant l'enfance de Jésus semble avoir commencé un peu avant le milieu du 2ème siècle.




Synthèse :


- Vers 51-63 : Écriture des épîtres de Paul, et peut-être de l'Évangile de Thomas.

- Vers 70-120 : Existance probable de la "Source Q" , de l'Évangile de Thomas et de l'Évangile de Marc.

- Vers 96-135 : Existance possible des "Actes des apôtres".

- Vers 100 : Existance de la fin de l'"Évangile des Hébreux" (passage ressemblant à Luc).

- Vers 110-135 : Existance d'un Évangile de Marc (peut-être pas le même qu'actuellement) et d'un Évangile araméen de Matthieu différent de l'actuel (= la "Source Q" ?). Existance de la "péricope de la femme adultère", mais elle se trouve pas encore insérée dans l'Évangile de Jean.

- Vers 135-140 : Existance d'au moins une partie de l'Apocalypse. Existance des deux premières parties au moins du "Protévangile de Jacques" (de ce texte dériveront plus tard les Évangiles de l'enfance).

- Un peu avant 140 : Assemblage de l'Évangile de Luc (sans sa 1ère partie) à partir de la "Source Q" et de l'Évangile de Marc.

- Un peu aprés 140 : Existance des "Actes des apôtres" selon leur forme actuelle.

- Vers 130-165 : Existance de l'Évangile du papyrus "Egerton 2", une source possible de l'Évangile de Jean.

- Un peu avant 150 (ou vers 120 ?) : Assemblage de l'Évangile de Matthieu (sans sa 1ère partie) à partir de la "Source Q" et de l'Évangile de Marc. Création probable de l'Évangile de Jean.

- Vers 150 : Existance de l'Évangile de l'enfance selon St. Matthieu (pas encore intégré au début de l'Évangile de Matthieu). Existance aussi de l'Évangile des Hébreux (version primitive de l'Évangile de Matthieu ?).

- 172 : Il est probable que l'Évangile de Luc ne comporte toujours pas sa 1ère partie ( l'Évangile de l'enfance selon St. Luc) et que l'Évangile de Matthieu ne comporte toujours pas sa 1ère partie non plus (l'Évangile de l'enfance selon St. Matthieu). Existance de l'évangile de Thomas.

- 178 : Existance avérée de l'"Évangile de l'enfance selon St. Luc".

- Vers 175-180 : Édition du Nouveau Testament dans ses versions Alexandrine et Césaréenne. La version occidentale pourrait être plus ancienne.

- 185 - 190 : Existance certaine de l'Évangile de Jean (le 21ème chapitre sera ajouté plus tard) ainsi que de l' Évangile de Juda et de l'"Histoire de l'enfance de Jésus" (d'où on tirera l'"Évangile en arabe de l'enfance" au 6e ou 7 e siècle).

- Vers la fin du 2ème siècle : L'Évangile de l'enfance selon St. Luc est ajouté au début de l'Évangile de Luc et l'Évangile de l'enfance selon St. Matthieu est ajouté au début de l'Évangile de Matthieu. Existance d'un "Évangiles des Hébreux" (ou "des Ébionites" ou "des Nazaréens") qui semble être une variante courte (et archaïque) de l'Évangile de Matthieu (en araméen). Existance également d'un "Évangile de Pierre" (écrit vers 130-180 ?).

- Vers 200 : Existance d'un "Livre de Jacques" qui doit être le "Protévangile de Jacques". Ce livre inspirera plus tard l'"Évangile de Matthias ou du pseudo-Matthieu" ( au 4e ou 5e siècle) et celui de la "Nativité de Jésus".

- Vers la fin du 3 ème siècle : Existance de la péricope de la femme adultère dans l' "Évangile des Hébreux."

- Vers 320-330 : Insertion de la "péricope de la femme adultère" dans l'Évangile de Jean (Bibles occidentales) ou dans l'Évangile de Luc (Bibles Césaréennes F13).

Vers 400 : L'"Évangile de Matthieu en araméen" / "Évangile des Hébreux" est toujours utilisé par les Nazaréens.

- Vers 550-570 : Création du Pseudo-Matthieu en se basant sur le Protévangile de Jacques, et en y ajoutant le récit de la fuite en Égypte.

- Vers le 6ème siècle : Le passage "
Tu es Pierre et sur cette pierre je batirais mon Eglise" est inséré dans l'Évangile de Matthieu.