DOSSIER JUDAISME :



La réincarnation en Occident :                                                           

 

 

Jésus et les premiers chrétiens ont-ils enseigné la réincarnation ?
La kabbale juive enseigne-t-elle également la réincarnation ?
C'est ce que semblent indiquer certains textes.

Dans Malachie 3.23-24, il est dit :
"...Voici, je vous enverrai Elie, le prophète, avant qu'arrive le jour de l'éternel..."

-----> Cela semble vouloir dire que Elie, qui était monté tout vivant au ciel, redescendra un jour sur terre (d'ailleurs les Esséniens attendaient le retour d'Elie, pensant qu'il serait le messie). Pourtant, Elie ne semble pas être redescendu directement avec son ancien corps adulte mais il s'est bien réincarné dans un corps d'enfant :

-"Ta femme Elisabeth enfantera un fils, et tu l'appellera du nom de Jean... Il marchera devant Dieu avec l'esprit et la puissance d'Elie..." (Luc 1, 13-17)

-"En vérité je vous le dit, parmi les enfants des femmes, il n'en a pas surgi de plus grand que Jean le Baptiste.... Et lui, si vous voulez m'en croire, il est cet Elie qui doit revenir" (Matthieu 10, 10-14)

"Les disciples posèrent cette question à Jésus : Pourquoi donc les scribes disent-ils qu'Élie doit venir d'abord ? Il répondit : Il est vrai qu'Élie vient rétablir toutes choses. Mais je vous dis qu'Élie est déjà venu, et qu'ils ne l'ont pas reconnu et qu'ils l'ont traité à leur guise. De même le fils de l'homme aura lui aussi à souffrir d'eux." Les disciples comprirent alors qu'il leurs parlait de Jean-Baptiste." (Matthieu 17. 10-13)

-----> Tous ces passages semblent bien indiquer que, pour Jésus, Jean Baptiste était la réincarnation d'Elie. Cela pourrait s'expliquer par le fait que la valeur numérique kabbalistique de ces deux noms (Elie / Eliyahu et Jean /Yohanan) soit identique, et équivalente à celle du messie (52).

-"Jésus, étant arrivé dans le territoire de Césarée de Philippe, demanda à ses disciples : Qui dit-on que je suis, moi, le Fils de l'Homme. Ils répondirent : Les uns disent que tu es Jean-Baptiste; les autres Elie; les autres, Jérémie, ou l'un des prophètes." (Matthieu, 16, 13-15).

-----> Ce passage indique que les juifs pensaient possible que Jésus ne soit autre qu'un des anciens prophètes revenu sur Terre ... ce qui implique une réincarnation.

-"Jésus vit, en passant, un homme aveugle de naissance. Ses disciples lui firent cette question : Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu'il soit né aveugle." (Jean, 9, 1-3).

-----> Si les disciples de Jésus pensent que cet homme pourrait avoir subi une punition DÉS sa naissance, alors cela indique que pour eux son péché pourrait avoir été commis AVANT sa naissance ... ce qui ne peut s'expliquer que par une vie antérieure.

-"En vérité, je te le dis : nul, s’il ne naît à nouveau, ne peut voir le royaume de Dieu" (Jean 3).

-----> Certains ne traduisent pas par "naitre à nouveau" mais par "naitre d'en haut" car le mot grec contenu dans le texte original est "anôthen" qui signifie aussi bien "d'en haut" que "à nouveau" ou "dés le début".
Mais la réponse de Nicodème montre que c'est bien "naître à nouveau" qu'il faut comprendre :

" Comment un homme peut-il naître étant vieux ? Peut-il entrer dans le sein de sa mère et naïtre ? "
(Jean 3).

Pendant les premiers siècles du christianismes, la réincarnation était reconnue par les Chrétiens et surtout par les Gnostiques.
Certains Pères de l’Église (Clément d’Alexandrie, Origène, Plotin et saint Bonaventure, par exemple, ont notamment cru à la réincarnation) :

"Du fait de certaines tendances vers le mal, certaines âmes ... s'intègrent à des corps d'abord humains; puis, si elles entrent en contact avec les passions irrationnelles, lorsque s'achève le laps de temps alloué à leur vie humaine, elles sont transformées en bêtes, stade à partir duquel elles tombent au niveau des ... végétaux. De là, elles s'élèvent à nouveau en passant par les mêmes stades et réintègrent leur position dans le paradis." (Origène)

" Les causes des diversités des vies humaines sont dues aux existences antérieures. " (Origène, premier livre des Principes).

" Il y a nécessité de nature pour l'âme humaine immortelle d'être guérie et purifiée lorsqu'elle ne l'a pas été dans sa vie terrestre ; la guérison s'opère dans les vies futures et subséquentes. " (Saint Grégoire de Nysse).

“ L’âme qui habite plus d’une fois un corps humain. ” (Saint Justin).

"... Mon enfance a-t-elle succédé à un âge que j'aurais vécu, interrompue par une mort précédente ? Etait-ce celui que j'ai passé dans le sein de ma mère ?... Et avant cette vie, Ô Dieu de ma joie, me trouvais-je quelque part, ou dans un autre corps ?" (Saint Augustin, Les Confessions)

Saint Jérôme et Ruffinus (Lettre à Anastase) affirment que cette doctrine était enseignée comme vérité traditionnelle à un certain nombre d'initiés.

Au concile de Nicée, en 325, l’empereur Constantin s’efforça de faire condamner cette croyance.
Mais ce n'est qu'au 2ème concile de Constantinople, en 553, que cette doctrine a été définitivement supprimée sous la pression de l’empereur Justinien, simplement parceque le concept de la réincarnation gênait l’impératrice Théodora qui ne voulait pas accepter qu’elle puisse être d’un rang inférieur dans une vie future :
"Quiconque supportera le mythe de la doctrine de la pré-existence de l’âme et par consequent à l'opinion magnifique de son retour, que cela soit un anatheme."

Cependant, et ceci est peu connu, ce ne fut pas l’ensemble de la doctrine qui fut condamné, mais seulement la position d'Origène et de ceux qui affirmaient que “les âmes pouvaient revenir sur terre par lassitude de la contemplation divine ou refroidissement de l’amour de Dieu et qu’elles étaient renvoyées dans des corps par châtiment.” Il est donc toujours parfaitement licite de croire que des âmes puissent se réincarner par amour de leur prochain.

Chez les Juifs également on trouve des traces de croyances à la réincarnation. Il semble que cette doctrine ait été introduite par Anan ben David (715 - 795 ou 811 ap.JC) qui fut peut-être le fondateur du Karaïsme, une branche du judaïsme qui rejetait la Torah orale des rabbins pharisiens. Il avait peut-être été influencé par certaines sectes muslmanes ou par les Manichéens ?

On remarquera que la Kabbale juive déclare clairement qu'il y a trois types d'hommes : ceux qui ne se réincarnent pas, ceux qui se réincarnent seulement pour des raisons spécifiques, et ceux qui se réincarnent en général, les renaissances permettant de se purifier.
Le Zohar (ouvrage de Kabbale écrit vers 1290) dit à ce sujet :

-"Les âmes doivent réintégrer la substance absolue d'où elles sont sorties. Toutefois, pour cela, elles doivent développer toutes les perfections, dont le germe se trouve en e ?lles. Si elles ne satisfont pas à cette condition durant une vie, elles doivent en commencer une deuxième, une troisième et d'autres encore, jusqu'à ce qu'elles aient rempli les conditions qui leur permettront de s'unir à nouveau avec Dieu.".

-"Aussi longtemps qu'une personne ne parvient pas à atteindre ses objectifs dans ce monde, le Saint, Béni soit-il, la déracine et la replante autant de fois qu'il faut. " (Zohar I 186b)

-"Toutes les âmes sont sujettes à la réincarnation; nul ne connaît les voies du Saint, Béni soit-il! Les gens ne savent pas qu'ils sont présentés devant le tribunal avant d'entrer dans ce monde et une fois qu'ils l'ont quitté; ils ignorentqu'ils doivent subir beaucoup de réincarnations et de travaux secrets et que, complètement dépouillés, de nombreuses âmes et une infinité d'esprits errent dans l'au-delà sans pouvoir pénétrer sous le voile du Palais du Roi. Les hommes ne sont pas conscients que les âmes virevoltent comme des cailloux lancés par une fronde. Mais le temps sera proche quand on découvrira tous ces mystères ". (Zohar II 99b)

-"Rabbi Yossi a répondu: Ces corps méprisables qui n'ont pas réalisé leur objectif, seront considérés comme n'ayant pas existé ... Rabbi Its'hak,n'étant pas d'accord, lui a répondu : Le Saint, Béni soit-Il, leur insufflera une autre âme et s'ils sont jugés méritants, ils auront droit à l'éternité, sinon ils seront de la cendre foulée par les justes." (Zohar, I 131A et II 105B)

-"Pineas, fils d'Eléazar, était la réincarnation de notre ancêtre Isaac ... Essaü se réincarna en Zimri, fils de Salou." (Zohar (III, 236B, 237A).

-"Un cadavre qui reste sans sépulture pendant plus de vingt-quatre heures cause un affaiblissement des éléments du Char céleste et empêche le dessein divin d'être accompli; car peut-être Dieu a-t-Il décrété qu'il doit subir une réincarnation immédiatement le jour de sa mort, ce qui serait le mieux pour lui. Mais tant que le cadavre n'est pas inhumé, l'âme ne peut ni se trouver en présence du Saint Béni soit-il, ni être transférée dans un autre corps. Car une âme ne peut entrer dans un deuxième corps si le premier n'est pas en terre." (Zohar III 88B).

-"Nous savons que Moise était la réincarnation (gilgoul) d'Abel" (Tikouné Zohar 69, 99B).

-"Caïn se réincarna en Essaü". (Tikouné Zohar 69, 118B)

-"Quant à lui (Adam), il se réincarna en nos anciens saints, Abraham, Isaac, Jacob".
(Tikouné Zohar 69, 1113A)

-"L'homme ne reçoit pas la récompense de ses bonnes actions dans ce monde, de peur qu'il n'y revienne (réincarné) par suite de ses péchés." ("Talmud Irouvin 22A)

Le Tikouné Zohar 69-103A laisse entendre que, même si un faible progrès est enregistré à chaque fois, l'âme a des milliers d'occasions de se réincarner afin d'atteindre son état de perfection.

Avant le Zohar, le "Sepher ha-Bahir" (datant du 12ème siècle) disait déja ceci :

"Pourquoi n'advient il à tel juste que de bonnes choses alors qu'un autre juste subit des épreuves ? C'est parce que ce dernier a fait le mal dans une vie antérieure et qu'il en paie maintenant les conséquences...C'est comme la personne qui a planté une vigne et recueille du raisin acide au lieu des fruits sucrés qu'il espérait. Voyant qu'il a planté et vendangé en vain, il arrache la vigne et, après avoir bien nettoyé, en plante une nouvelle. Et ainsi de suite." (Bahir 195)

Plus tard, le grand rabbi Its'hak Louria (1534-1572) a même écrit tout un ouvrage sur le sujet : le "Shaar Ha Gilgoulim" ("Les portes de la réincarnation"). Le "Sefer HaGuilgoulim" ("le Livre de la Réincarnation"), de son disciple Haïm Vital (1542-1620), est aussi un ouvrage entièrement consacré à ce sujet.

Dans l'Islam, le courant Soufi (et les anciens Rawendites du Khorasan au 8ème siècle) enseigne parfois aussi la réincarnation :

-"Quand j'étais pierre, je suis mort et je suis devenu plante, Quand j'étais plante, je suis mort et je suis parvenu au rang d'animal, Quand j'étais animal, je suis mort et j'ai atteint l'état d'homme. Pourquoi aurais-je peur ? Quand ai-je perdu quelque chose en mourant?" (Jalal ud-Din Rumi)

Le concept de réincarnation était donc, dans la passé, bien moins étranger aux Judéo-Chrétiens qu'on le croit actuellement.

Et n'oublions pas que, dans l'antiquité, les Druides,les Orphiques, les Pythagoriciens, les Gnostiques et même Platon (dans le mythe d'Er) professaient déja la métempsychose.