DOSSIER HISTOIRE :




Les Pélasges :                                                                        

 

 

Les Pélasges sont un peuple légendaire qui aurait précédé les Grecs et qui, à l'époque classique, ne subsistait plus que sous la forme de tribus très dispersées dans toute la Grèce.
C'est du moins ce qui semble ressortir des différents textes, plus ou moins romancés, des auteurs anciens.
Mais ces textes pourraient très bien n'être que des productions ad-hoc pour essayer d'expliquer artificiellement l'origine de telle ou telle tribu et les raisons de son emplacement actuel. Certains de ces textes peuvent être le reflet de souvenirs authentiques sur les déplacement des Pélasges, mais d'autres pourraient très bien être de pures inventions et spéculations mythologiques pour cacher l'ignorance des auteurs.
Comme de nombreuses tribus de Pélasges vivaient plutôt dans la Grèce septentrionale, on pourrait tout aussi bien supposer que ceux-ci seraient un peuple venu du nord qui se serait infiltré tardivement entre les cités grecques.

Ainsi, dans les pièces d'Eschyle (-525-456), Pélasgos, le roi des Pélasges, régnait sur la rive occidentale du Strymon (en Macédoine), sur la terre des Perrhèbes (Thessalie), le pays au-delà du Pinde, prés de la Péonie, les montagnes de Dodone (en Epire) et Argos :
"Je suis le fils de Palaichtôn, qui naquit de la Terre, Pélasgos, chef suprême de ce pays ; et le peuple des Pélasges qui cultive ce sol a naturellement pris le nom de son roi. Je suis maître de tout le pays que traverse le Strymon sacré, à partir de sa rive occidentale. J'englobe les terres des Perrhèbes, et celles qui, au-delà du Pinde, touchent à la Péonie, et les montagne de Dodone, jusqu'au point où les eaux de la mer viennent former ma frontière : en-deçà, tout m'appartient." (les Suppliantes 250-259)

Ce texte résume assez bien les principales régions où l'on trouvait encore des Pélasges ou au moins des traditions sur leur présence passée.

Ainsi, Strabon (-60+20), en se basant sur des arguments linguistiques, pouvait tenter de repérer l'ancienne présence de Pélasges dans de nombreuses régions de la Grèce.
En effet, on pouvait remarquer que les Pélasges possédaient les villes de Larisse en Troade et de Larissa en Thessalie (= Argos pélasgique ?), ce qui laisse à penser que ce nom provenait de leur langue car il n'a pas de sens en grec.

Et Strabon citait de nombreuses villes portant le nom de Larissa. Leur nom indiquant probablement qu'elles avaient été fondées par les Pélasges ou par un peuple parlant la même langue :

"Il existe une autre Larisse dans l'Ossa ; et, en plus de celle-ci, une Larisse dite Crémasté, la même qu'on nomme parfois Pélasgie. La Crète, elle aussi, possédait une ville de ce nom, ville aujourd'hui réunie à Hiérapytna, mais qui a laissé à toute la plaine environnante le nom de Champ Larissien. Ajoutons qu'on connaît dans le Péloponnèse, outre Larisse, acropole d'Argos, un fleuve du nom de Larisus, qui forme la limite entre l'Elide et le territoire de Dymé, voire une ville appelée de ce même nom de Larisse, et bâtie, au dire de Théopompe, précisément sur cette frontière. L'Asie, à son tour, nous offre Larissa Phriconis, près de Cumes ; une autre Larissa près d'Hamaxitos en Troade ; Larissa Ephésienne et Larissa de Syrie. On connaît de plus, à 50 stades de Mitylène, les roches Larissies, lesquelles bordent le chemin escarpé qui mène à Méthymne ; et, dans le territoire de Tralles, à 30 stades au-dessus de cette ville, sur la route qui franchit le Mésogis et débouche dans la vallée du Caystre près du temple de Cybèle Isodrome, un bourg appelé Larissa qui, par sa situation et par certains avantages de son sol (lequel se trouve être, bien que largement arrosé, très favorable pourtant à la vigne), rappelle tout à fait Larissa Crémasté ; sans compter que c'est probablement de la même localité que Jupiter dit Larisius a emprunté son surnom. Signalons enfin sur le côté gauche du Pont un dernier bourg du nom de Larissa : il est situé entre Naulo[que et Odessus] non loin du point où vient finir l'Haemus. Quant à Olosson, à la blanche Olosson, ainsi appelée par Homère de la couleur de son sol qui est de nature argileuse, elle figure, ainsi qu'Eloné et Gonnus, au nombre des villes d'origine perrhébique. Seulement Eloné a changé de nom et s'est appelée depuis Limoné. Cette ville, aujourd'hui en ruines, était bâtie, comme Gonnus, au pied de l'Olympe, à une petite distance du fleuve Europus, le même que le poète nomme le Titarésius." (Strabon 9;5;19-20)

Cela nous indique de très nombreux lieux où l'onomastique a gardé le souvenir de ses insaisissables Pélasges.

On peut aussi se plonger dans les textes antiques afin d'essayer de retracer l'histoires de ces différentes tribus de Pélasges, en essayant des les dégager de tous les ornements mythologiques qu'on y a ajouté :


 

Les Pélasges de Thessalie :

Homère (-8e s av.JC) parlait des Pélasges comme d'un peuple originaire de Thessalie. La partie centrale de celle-ci, en effet, s'appelait la « Pélasgiotide » :
"les tribus des Pélasges aux bonnes lances, des Pélasges habitants de la plantureuse Larissa". (Iliade 2, 840)
"Et je nommerai aussi ceux qui habitaient l'Argos Pélasgique (Argos Pelasgikon), et Alos et Alopè, et ceux qui habitaient Trakinè (Trachis) et Phthia, et Hellas aux belles femmes." (Iliade 2, 681)

Hiéronymos / Jérome de Cardia (-354-250) a raconté que les Pélasges de Thessalie et les Aenianes avaient été chassés par les Lapithes.

Strabon (-60+20) plaçait aussi des Pélasges en Thessalie :
"Les Pélasges (c'est l'opinion presque universelle) formaient une race ou nation fort ancienne répandue par toute la Grèce, mais principalement en Thessalie, dans la région appelée Aeolide. (…) En donnant le nom d'Argos Pélasgique à la partie de la Thessalie qui est comprise entre les bouches du Pénée et les Thermopyles et qui se prolonge jusqu'à la chaîne du Pinde, Homère semble attester que les Pélasges ont longtemps aussi dominé en ce pays." (Strabon 9;5;2;4)

"Dans les limites que nous venons de tracer, la Thessalie présentait anciennement quatre divisions principales : la Phthiotide, l'Hestiaeotide, la Thessaliotide et la Pélasgiotide. A la Phthiotide correspond toute la partie méridionale et voisine de l'Oeta, s'étendant en longueur depuis le golfe Maliaque et la baie Pylaïque jusqu'à la Dolopie et au Pinde, et en largeur jusqu'à Pharsale et aux plaines thessaliennes. Quant à l'Hestiaeotide, elle comprenait la portion occidentale de la plaine et ce qui se trouve entre le Pinde et la Haute-Macédoine. Le reste de la plaine était partagé entre les Pélasgiotes qui habitaient au-dessous de l'Hestiaeotide, et s'étendaient jusqu'aux confins de la Basse-Macédoine et les Thessaliotes, dont les possessions continuaient la Pélasgiotide et se prolongeaient jusqu'à la côte dite de Magnésie, complétant ainsi la Thessalie propre. - La Thessalie, elle aussi, pourra nous fournir une longue liste de noms illustres à divers titres, illustres surtout par la mention qu'en a faite Homère ; mais de ses villes bien peu ont conservé leur antique éclat, et c'est encore Larisse qui est le moins déchue." (Strabon 9;5;3)

Strabon (-60+20), reprenant Hiéronymos, a raconté comment, dans la Pélasgiotide (Thessalie centrale), les Lapithes ont chassé les Perrhèbes dans les montagnes. Les Perrhèbes semblent avoir été des Pélasges et les Lapithes étaient peut-être des Grecs Eoliens venus envahir leur territoire :
"Au lot d'Eurypyle succède, dans le Catalogue d'Homère, le lot de Polypoetès, comprenant
'Et les habitants d'Argissa et ceux de Gyrtoné, d'Orthé, d'Eloné et de la blanche Oloosson' (Iliade 2, 738),
c'est-à-dire tout un canton de la Thessalie occupé anciennement par les Perrhèbes. Dans le principe, en effet, la nation des Perrhèbes se trouvait répandue sur le littoral et le long du cours inférieur du Pénée depuis Gyrton, ville d'origine notoirement perrhébique. Mais plus tard les Lapithes, ayant à leur tête Ixion et son fils Pirithoüs, subjuguèrent les Perrhèbes et occupèrent à leur tour tout ce canton, auquel Pirithoüs ajouta même le Pélion enlevé par lui de vive force aux Centaures, nation encore sauvage. C'est ce que marque Homère lorsqu'il dit :
'Il les expulsa du Pélion, et les poursuivit jusque chez les Aethices' (Iliade 2, 744).
Naturellement Pirithoüs assigna aux Lapithes les terres de la plaine, une portion toutefois (celle qui tend vers l'Olympe) resta au pouvoir des Perrhèbes, qui ailleurs s'étaient mêlés et fondus complètement avec les Lapithes. Argissas, ou, comme on l'appelle aujourd'hui, Argura, est située sur le Pénée. A 40 stades au-dessus de cette ville, mais toujours dans le voisinage du fleuve, on rencontre Atrax ; toute la vallée intermédiaire a longtemps appartenu aux Perrhèbes. Quant au nom d'Orthé, il désigne, d'après la supposition de quelques auteurs, l'acropole de Phalanna, ancienne ville perrhébique, bâtie sur le Pénée, aux abords de Tempé. Les Perrhèbes, cependant, s'étaient retirés devant les Lapithes leurs vainqueurs et avaient cherché presque tous un refuge du côté de la montagne, dans le Pinde, chez les Athamanes, chez les Dolopes. Le pays qu'ils quittaient et où un petit nombre des leurs voulut rester tomba alors au pouvoir des Larisséens, leurs voisins, riverains comme eux du Pénée et possesseurs déjà de la portion la plus fertile des plaines, mais qui avaient à se dédommager de tout ce que les débordements annuels dudit fleuve leur enlevaient de terre arable dans les fonds qui bordent le lac Nessonis : ils n'avaient pas encore eu l'idée de protéger leurs cultures par des levées parallèles au fleuve. L'ancienne Perrhèbie resta ainsi aux mains des Larisséens et continua de leur payer tribut jusqu'à l'époque où Philippe étendit sa domination sur la Thessalie entière.
(…)
Homère, on le voit, ne mentionne qu'une partie des possessions perrhébiques, celle qui était comprise dans les limites de l'Hestiasotide. Quant aux terres que possédaient les Perrhèbes dans les Etats de Polypoctès, il les attribue aux Lapithes parce qu'ici dans la plaine, bien que Perrhèbes et Lapithes vécussent côte à côte, c'étaient les Lapithes qui étaient les vrais maîtres du pays, et les cultivateurs perrhèbes n'étaient guère traités par eux autrement que comme des sujets. Toute la région montagneuse au contraire qui s'étend vers l'Olympe et Tempé (c'est-à-dire les cantons de Cyphos et de Dodone avec la vallée du Titarésius) appartenait sans conteste aux Perrhèbes. C'est d'un rameau ou chaînon contigu à l'Olympe et nommé le Titarius que descend le Titarésius, pour se diriger ensuite vers les cantons de la Perrhébie voisins de la vallée de Tempé et se réunir de ce côté au Pénée. Seulement, les eaux du Pénée sont pures, tandis que celles du Titarésius charrient une sorte de limon qui les rend toutes grasses : les deux courants ne se mêlent donc pas et le Titarésius 'surnage comme de l'huile au-dessus des eaux du Pénée' (Iliade 2, 754). La fusion des deux nations Perrhèbe et Lapithe explique comment Simonide a pu appeler indifféremment de l'un ou de l'autre nom l'ensemble des peuples de la Pélasgiotide, c'est-à-dire de la portion orientale de la Thessalie.
" (Strabon 9;5;19-20)

"Hiéronyme donne à la grande plaine thessalienne et à la Magnésie 3000 stades de circuit. Suivant le même auteur, ces deux cantons de la Thessalie auraient eu pour premiers habitants des Pélasges chassés plus tard par les Lapithes et rejetés jusqu'en Italie, et ce serait pour cette raison qu'aujourd'hui encore on nomme Pelasgicus campus la partie de la Thessalie qui comprend Larissa, Gyrtoné, Phères, Mopsium, le Boebéis, l'Ossa, l'Homolé, le Pélion, voire toute la Magnésie." (Strabon 9;5;22)

Denys d'Halicarnasse (-60-08) a donné d'autres noms peu crédibles aux peuples qui ont chassé les Pélasges de Thessalie :
"Les Pélasges aussi étaient une nation grecque originaire du Péloponnèse. (…) A la sixième génération, quittant le Péloponnèse, ils s'en allèrent vers le pays qui s'appelait alors Hémonie et maintenant Thessalie. Les chefs de la colonie étaient Achaeos, Phthios et Pelasgos, les fils de Larissa et de Poséidon. Quand ils arrivèrent en Hémonie ils en chassèrent les habitants barbares et divisèrent le pays en trois parties : ils les appellèrent, d'après le nom de leurs chefs, Phthiotide, Achaïe et Pelasgiotide. Ils restèrent là cinq générations, durant lesquelles ils parvinrent à la plus grande prospérité en récoltant les produits des plaines les plus fertiles de la Thessalie, mais à la sixième génération ils furent chassés par les Curètes et les Lélèges, qui s'appellent maintenant les Étoliens et les Locriens, et par beaucoup d'autres qui vivaient près du Parnasse : leurs ennemis étaient commandés par Deucalion, le fils de Prométhée et de Clyméné, la fille d'Océan.
Et se dispersant dans leur fuite, certains allèrent en Crète, d'autres occupèrent quelques îles appelées les Cyclades, certains s'installèrent dans la région appelée Hestiaeotide près de l'Olympe et de l'Ossa, d'autres passèrent en Béotie, en Phocide et en Eubée ; certains, passant en l'Asie, occupèrent beaucoup de places sur la côte le long de l'Hellespont et plusieurs des îles voisines, en particulier celle qu'on appelle maintenant Lesbos : ils s'unirent à ceux qui composaient la première colonie envoyée là de Grèce sous la conduite de Macar, fils de Crinacus."

(Denys d'Halicarnasse 17;1–3 et 18;1-2)

Thucydide (-465-395) a expliqué que, par la suite, les Grecs Doriens Thessaliens seraient entrés dans la Thessaliotide soixante ans après la guerre de Troie :
"La soixantième année après la prise d'Ilion, les Bœotiens d'aujourd'hui, chassés d'Arné par les Thessaliens, s'établirent dans la contrée appelée maintenant Bœotie ; elle se nommait auparavant Cadméide. Il s'y trouvait dès long-temps une portion de ce peuple, et elle avait envoyé des troupes devant Ilion. Ce fut dans la quatre-vingtième année après la prise de cette ville, que les Doriens occupèrent le Péloponnèse avec les Héraclides."  (Thucydide, I, 12)

Strabon (-60+20) parlait aussi de cette invasion dorienne venue de Thesprotie, dans le sud-est de l'Epire :
"Une troisième tradition veut que ce nom de Thessalie ait été donné au pays par des conquérants étrangers sortis d'Ephyre en Thesprotie et issus d'Antiphus et de Phidippe, fils de l'héraclide Thessalus, et cela en l'honneur de leur ancêtre."  (Strabon 9;5;23)

Diodore de Sicile (-90 +30) a également décrit l'invasion de la Thessalie par les Doriens d'Héraclès / Hercule :
"Après l'expulsion des Dryopes, la guerre s'alluma entre les Doriens habitant l'Hestiéotide sujets du roi Egimius, et entre les Lapithes habitant les environs du mont Olympe, et sujets du roi Coronus, fils de Cénée. L'armée des Lapithes étant beaucoup plus nombreuse, les Doriens se réfugièrent auprès d'Hercule. Ils lui offrirent le tiers de la Doride et de leur royaume pour le secours qu'il leur prêterait dans cette guerre. Après avoir réussi dans leur négociation auprès d'Hercule, ils marchèrent contre les Lapithes. Hercule eut avec lui les Arcadiens qui l'accompagnaient dans toutes ses expéditions ; il défit les Lapithes, tua le roi Coronus ; et, ayant laissé un grand nombre d'ennemis sur le champ de bataille, il les obligea de céder aux Doriens le pays contesté. Après cela, Hercule remit à Egimius le tiers du pays, avec l'ordre de le conserver pour ses descendants. Pendant son retour à Trachine, il tua Cycnus, fils de Mars, qui l'avait provoqué au combat. En quittant Itone, il traversa la Pélasgiotide, se joignit au roi Orménius et lui demanda en mariage Astydamie, sa fille. Orménius n'accueillit pas cette demande, sachant qu'Hercule était marié à Déjanire, fille d'Oïnée. En conséquence de ce refus, Hercule lui déclara la guerre ; il prit sa ville, et tua ce roi, qu'il n'avait pu persuader. Maître d'Astydamie, qui était sa captive, il en eut un fils nommé Ctésippus. Après cela, il pénétra dans l'Oechalie et marcha contre les enfants d'Eurytus pour se venger du refus d'Iolé qu'il avait demandée en mariage. Les Arcadiens l'accompagnèrent dans cette expédition ; il prit la ville, et tua Toxée, Motion et Pytius, fils d'Eurytus." (Diodore de Sicile 4;37)

Selon Archémaque (Histoire 424 F1), une partie des Grecs Eoliens Béotiens qui habitaient la Thessaliotide ne s'est pas enfuie vers la Béotie mais a accepté la servitude aux termes d'un accord selon lequel ils travailleraient pour les Thessaliens en tant que serfs. Leurs descendants sont appelés "pénestes".

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Les Pélasges de Dodone, en Epire :

Selon Homère (-8e s av.JC), les Perrhèbes, une tribu de Pélasgiotide en Thessalie, sont partis s'établir à Dodone en Epire, probablement pour fuir les Lapithes :
"Gouneûs a amené de Cyphos, sur vingt-deux vaisseaux, les Enianes / Eniènes et les bouillants Perrhèbes, tant ceux qui ont établi leur demeure autour de l'âpre et froide Dodone que ceux qui cultivent les bords riants du Titarésius (rivière de Thessalie)." (Iliade 2, 748).

L'oracle du dieu Zeus, à Dodone, était d'ailleurs réputé pour avoir été établi par les Pélasges, ce qui indique que les Perrhèbes étaient bien des Pélasges :
"Zeus ! Puissant Dodonien, Pélasgique, lointain, qui règnes sur Dodone, en ce rude pays, au milieu de tes divinateurs, les Selles, qui ne se lavent point les pieds et dorment sur la terre." (Illiade 16;233)

Selon Hérodote (480-425), la région de l'oracle de Dodone, en Epire / Thesprotie, avait porté le nom de "Pélagie" ce qui indique que des Pélasges y avaient vécu :
"Je pense que celle-ci fut vendue afin d'être conduite dans le pays des Thesprotiens, qui fait partie de la Grèce actuelle, et qu'on appelait alors Pélasgie ; que, pendant son esclavage, elle éleva sous un chêne une chapelle à Jupiter ; car il était naturel que celle qui dans Thèbes avait desservi les autels de ce dieu lui donnât, dans le lieu où on l'avait transportée, des marques de son souvenir, et qu'ensuite elle instituât un oracle." (Hérodote 2;56)

Selon Denys d'Halicarnasse (-60-08), ce sont bien des Pélasges chassés de Thessalie qui se sont réfugiés à Dodone :
"Mais la plupart d'eux, se tournant vers l'intérieur, trouva refuge chez les habitants de Dodone, leurs parents : personne, parce que le peuple était sacré, n'osait leur faire la guerre; et ils y restèrent pendant quelque temps. Mais quand ils s'aperçurent qu'ils devenaient un fardeau pour leurs hôtes, parce que la terre ne pouvait pas les contenir tous, ils s'en allèrent pour obéir à un oracle qui leur ordonnait de naviguer vers l'Italie, qui alors s'appelait Saturnie." (Denys d'Halicarnasse 18;1-2)

Selon Strabon (-60+20) aussi, les Pélasges avaient occupé Dodone en Epire :
"Il est remarquable enfin qu'il (Homère) joigne au nom de Jupiter-Dodonéen l'épithète de Pélasgique : 'Tout-puissant Jupiter, Jupiter Dodonéen, Jupiter Pélasgique !'
Beaucoup d'auteurs, du reste, qualifient de Pélasgiques les populations mêmes de l'Epire, comme pour mieux marquer que la domination des Pélasges s'était étendue sur toute cette contrée."
  (Strabon 9;5;2;4)


 

Les Pélasges du Péloponnèse :

Selon Hérodote, les Ioniens Athéniens étaient des Pélasges hellénisés :
"Il résulte de ces conjectures, si l'on peut s'en autoriser, que les Pélasges parlaient une langue barbare. Or, si tel était l'idiome de toute la nation, il s'ensuit que les Athéniens, Pélasges d'origine, oublièrent leur langue en devenant Hellènes, et qu'ils apprirent celle-ci de ce dernier peuple." (Hérodote 1;57)


Selon Hérodote (-480-425), les anciens Ioniens du nord du Péloponnèse (avant leur fuite en Attique et Ionie pour échapper aux Doriens) descendaient des Pélasges. Et idem pour les Eoliens de Thessalie :"Les Ioniens amenèrent cent vaisseaux. Ils étaient armés comme les Grecs. Ils s'appelèrent Pélasges-Aegialéens, comme le disent les Grecs, tout le temps qu'ils habitèrent la partie du Péloponnèse connue aujourd'hui sous le nom d'Achaïe, et avant l'arrivée de Danaüs et de Xuthus dans le Péloponnèse. Mais dans la suite ils furent nommés Ioniens, d'Ion, fils de Xuthus.
Les Insulaires, armés comme les Grecs, donnèrent dix-sept vaisseaux. Ils étaient Pélasges; mais dans la suite ils furent appelés Ioniens, par la même raison que les douze villes ioniennes fondées par les Athéniens. Les Éoliens amenèrent soixante vaisseaux. Leur armure était la même que celle des Grecs. On les appelait anciennement Pélasges, au rapport des Grecs."
(Hérodote 7;94-95)

Denys d'Halicarnasse (-60-08) situait lui aussi d'anciens Pélasges en Achaïe (nord du Péloponnèse) :
"Les Pélasges aussi étaient une nation grecque originaire du Péloponnèse. Ils étaient malheureux pour beaucoup de raisons mais en particulier parce qu'ils erraient sans arrêt et qu'ils n'avaient aucune demeure fixe. Ils vécurent d'abord à proximité de la ville que l'on nomme maintenant Argos d'Achaïe ; c'était les autochtones, selon la plupart des témoignages. Leur nom vient, à l'origine, de leur roi Pelasgos.
Pelasgos était, dit-on, fils de Zeus et de Niobé la fille de Phoroneos, qui, selon la légende, fut la première mortelle que Zeus connut. A la sixième génération, quittant le Péloponnèse, ils s'en allèrent vers le pays qui s'appelait alors Hémonie et maintenant Thessalie."
(Denys d'Halicarnasse 17;2–3)

Selon Pausanias (+115+180), les Pélasges seraient originaires de l'Arcadie (centre du Péloponnèse) :
"Les Arcadiens disent que Pélasgos fut le premier homme qui ait existé dans cette contrée (…) La terre mit au monde le divin Pélasgos sur les montagnes touffues de l'Arcadie, pour que l'espèce humaine commençât à exister. Pélasgus pendant son règne enseigna aux hommes, soit l'art de se construire des cabanes pour se mettre à l'abri du froid, de la pluie et de la chaleur, soit celui de se faire des vêtements avec des peaux de sangliers, (…) On dit que le pays porta le nom de Pélasgie sous le règne de Pélasgos." (Description de la Grèce VIII, 1, 4-6)
Selon lui, le sanctuaire de Déméter Pelasgis, à Argos (en Argolide), aurait été fondé par Pelasgos.

C'est à Ephore et Denys le Périégète (-290-…) que l'on doit l'idée que les Pélasges seraient originaires de Cyllène en Elide à l'ouest de l'Arcadie. (Orbis descriptio 358)


 

Les Pélasges d'Argos dans le Péloponnèse :


Dans les pièces d'Euripide (-485-406), Argos était une ville appartenant aux Pélasges.

Selon Aristote (-384-322), des Pélasges d'Argos sont partis s'installer à l'embouchure du Po.

Selon Strabon (-60+20) les traditions faisant venir les Pélasges d'Argos confondent l'Argos d'Argolide (Argos archéenne) dans le Péloponnèse et l'Argos pélasgique de Thessalie :

"Au préalable, examinons les différentes significations que le nom d'Argos a dans Homère, et lorsqu'il est employé seul et lorsque les épithètes d'Achaïque, de Iase, d'Hippien, de Pélasgique ou d'Hippobote l'accompagnent. Homère, en effet, appelle Argos non seulement la ville de ce nom (…) mais encore le Péloponnèse (…) car on sait qu'Agamemnon n'avait point sa résidence dans la ville d'Argos. On peut même dire qu'il nomme ainsi la Grèce entière, puisque, pour exprimer l'ensemble des peuples grecs, il emploie aussi souvent l'ethnique Argiens que les ethniques Danaens et Achéens. Seulement, pour empêcher qu'on ne se trompe à cette homonymie, il recourra à diverses épithètes, il dira par exemple Argos-Pélasgique pour désigner la Thessalie,
'Je nommerai maintenant tous les peuples venus d'Argos Pélasgique' (Iliade 1, 681)
et 'Argos-Achaïque' pour désigner le Péloponnèse,
'Si jamais nous revenons dans Argos Achaïque' (Iliade 9, 141),
'Sans doute Ménélas n'était pas alors dans Argos Achaïque'(Odyssée 3, 251)"
 (Strabon Geographica 8.6.9;5)

"Quant au texte même de ce passage dans lequel le poète énumère les peuples qui obéissaient à Achille, il prête à la controverse. Le nom d'Argos Pélasgique, notamment, qui suivant les uns, désigne une ancienne ville de la Thessalie, proche voisine de Larissa, et aujourd'hui détruite, ne saurait être, suivant les autres, un simple nom de ville, mais serait une dénomination générale s'appliquant à toute l'étendue des plaines thessaliennes et rappelant l'établissement de colons argiens amenés autrefois par Abas." (Strabon Geographica 9;5;6)

L'acropole de l'Argos d'Argolide (Argos archaïque / Argos archéenne) portait cependant le nom de « Larissa » selon Apollodore. Cela suggère que ce site fut auparavant occupé par les Pélasges car ce nom semble provenir de leur langue (comme pour La Larissa de Thessalie).



Les Pélasges d'Attique et de Lemnos :

 

Selon Hérodote (-480-425), les Athéniens seraient d'anciens Pélasges hellénisés :
"Il résulte de ces conjectures, si l'on peut s'en autoriser, que les Pélasges parlaient une langue barbare. Or, si tel était l'idiome de toute la nation, il s'ensuit que les Athéniens, Pélasges d'origine, oublièrent leur langue en devenant Hellènes, et qu'ils apprirent celle de ce dernier peuple ; car le langage des Crestoniates et des Placiens, qui est le même, n'a rien de commun avec celui d'aucuns de leurs voisins : preuve évidente que ces deux peuplades de Pélasges conservent encore de nos jours l'idiome qu'elles portèrent dans ces pays en venant s'y établir." (Hérodote 1;57)

Selon Hérodote (-480-425), qui cite Hécatée de Milet (-550-476), les Pélasges de l'Attique auraient été chassés à Lemnos :
"Les Athéniens chassèrent anciennement les Pélasges de l'Attique. S'ils eurent raison, ou s'ils commirent en cela une injustice, c'est ce que je n'entreprendrai point de décider. Je me contente de rapporter ce que l'on en dit. Hécatée, fils d'Hégésandre, raconte dans son Histoire que ce fut injustement. Les Athéniens, dit-il, voyant que le terrain qu'ils avaient cédé aux Pélasges au pied du mont Hymette, pour les récompenser d'avoir élevé le mur qui environne la citadelle, était bien cultivé, quoique auparavant il fût mauvais et de nulle valeur, ils les en chassèrent, sans autre prétexte que leur jalousie et le désir de s'en remettre en possession. Mais les Athéniens prétendent qu'ils le firent justement. Les Pélasges, disent-ils, faisaient du pied du mont Hymette, où ils demeuraient, des incursions sur leurs terres, et insultaient les jeunes filles des Athéniens qui allaient puiser de l'eau à la fontaine appelée Ennéacrounos : car il n'y avait point alors d'esclaves à Athènes, ni dans le reste de la Grèce. Toutes les fois, dis-je, que ces jeunes filles venaient à la fontaine, les Pélasges leur faisaient violence de la manière la plus insultante et la plus méprisante ; et, non contents de ces outrages, ils formèrent le projet de se rendre maîtres de l'État, et ils en furent pleinement convaincus. Les Athéniens ajoutent qu'ils firent paraître d'autant plus de générosité, qu'étant en droit de les faire mourir, puisqu'ils les avaient surpris machinant contre eux, ils ne voulurent pas le faire, et se contentèrent de leur ordonner de sortir du pays. Les Pélasges, forcés d'abandonner l'Attique, se dispersèrent en différents lieux, et une partie alla à Lemnos. Ce récit est celui des Athéniens ; le premier vient d'Hécatée." (Hérodote 6;137)

Selon Strabon (-60+20) Il y aurait bien eu des Pélasges en Attique :
"Enfin, s'il faut en croire les Atthidographes, les Pélasges seraient venus même en Attique, et, en voyant leurs habitudes errantes, en les voyant toujours prêts, comme des oiseaux de passage, à aller de contrée en contrée, les gens du pays auraient changé leur nom en celui de Pélasges." (Strabon 9;5;2;4)

On notera aussi que les Pélasges d'Attique étaient comparés à des "oiseaux de passage", hors , en grec, "Pelargos", désigne une cigogne ou un "oiseau rapide" ("argos" = " rapide" et "pel" = "oiseau").
Au pied de l'Accropole d'Athènes, un vieux mur passait pour avoir été construit par les Pélasges. Thucydide (Thucydide 2.17.1) et Aristophane (Les oiseaux 832) l' appelaient "Pelargikon / Pelargos"  ("Mur des cigognes" ou "Mur des Pélasges"). Il est difficile de dire si, à Athènes, le nom "Pélasge" est une déformation de "Pélargos" ou si c'est "Pélargos" qui est une déformation de "Pélasge".

Selon Strabon (-60+20), les anciens Pélasges d'Athènes venaient de Béotie :
"Pour en revenir à la Béotie, (…) il leur fallut évacuer Thèbes, mais ils ne tardèrent pas à y rentrer. Chassés de nouveau par les Thraces et les Pélasges, ils passèrent en Thessalie (…) Quand ils revinrent dans leurs foyers, (…) ils purent, avec ce surcroît de forces, rejeter les Barbares hors du pays. Les Pélasges se réfugièrent à Athènes et donnèrent leur nom à l'un des quartiers de la ville, le Pélasgicum (ils s'étaient établis apparemment au pied de l'Hymette)." (Strabon 9;2;3 + Ephore)
Mais s'il est vrai que des Pélasges avaient envahi la Béotie en compagnie des Thraces, c'est donc qu'ils arrivant du nord et non du Péloponnèse comme l'affirmait Denys d'Halicarnasse. Ils seraient donc venu de Thessalie, ou plus au nord encore, poussés par les Thraces.

A noter qu'à l'est de l'Attique, en Eubée, se trouvait la ville de "Pelasgía". Elle fut appelée "Larisa Cremaste" ou "Larisa Pelasgia". Hors il est bien connu que "Larissa" est un mot de la langue des Pélasges et non des Grecs.


 

Les Pélasges de Chalcidique :

Selon Thucydide (-471-391) les Pélasges de Chalcidique descendent de ceux qui, chassés d'Athènes, étaient partis s'installer à Lemnos :
"Brasidas, après la conquête d'Amphipolis, porta la guerre, avec ses alliés, dans la contrée qu'on appelle Acté. Elle commence au canal qu'avait fait creuser le roi ; l'Athos, montagne élevée, qui en fait partie, se termine à la mer Égée. La ville de Sané est comprise dans ce pays : c'est une colonie d'Andros, située près du canal, et tournée vers la mer qui regarde l'Eubée. Il contient encore d'autres villes, telles que Thyssus, Cléones, Acrothoos, Olophyxus et Dion, habitées par un mélange de nations barbares, qui parlent deux langues différentes : on y trouve quelques familles chalcidiennes, mais le plus grand nombre est composé de ces Pélasges qui, autrefois, sous le nom de Tyrrhéniens, habitèrent Lemnos et Athènes ; de Bisaltes, de Crestones et d'Édones. Ces peuples sont distribués en petites villes, et la plupart se donnèrent à Brasidas. Sané et Dion lui résistèrent, et il s'arrêta dans les campagnes qu'il ravagea." (Guerre du Péloponnèse 4;109)
Les Bisaltes, Crestones et Édones qui vivent prés de ces Pélasges sont probablement des parents des Macédoniens, appelés aussi Makédones.

Denys d'Halicarnasse (-60-08) a recopié Thucydide sur ce sujet :
"A leur sujet, Thucydide mentionne l'Acté de Thrace ainsi que des villes qui s'y trouvent, qui sont habitées par les hommes qui parlent deux langues. En ce qui concerne la nation des Pélasges voici ses mots : 'Il y a également un élément chalcidien chez eux, mais la plus grand partie est pélasgienne, appartenant aux Tyrrhéniens qui jadis habitèrent Lemnos et Athènes'." (Denys 25;3)

Selon Strabon (-60+20), au nord-ouest de la Chalcidique, en Macédoine supérieure, se trouvait la Pélagonie habitée par les Pélagons / Pélagones, probablement des Pélasges :
"En raison de la renommée et de l'ascendant des Thessaliens et des Macédoniens, ces Epirotes, qui les bordaient au plus près d'eux, devinrent, certains volontairement, d'autres par la force, incorporés parmi les Macédoniens et les Thessaliens. De cette manière, les Athamanes, les Aethices et les Talares ont été joints aux Thessaliens, et les Orestes, Pelagones et Elimiotes aux Macédoniens." (Strabon 9.5)


 

Les Pélasges de Propontide :


Selon Apollodore, les Argonautes auraient combattu contre les Doliens / Dolions / Doliones de Cyzique en Propontide (mer de Marmara). Ces derniers vivaient à coté les Pélasges Macriens (Apollodore 1;100;9;18).

Selon Conon 41 et le commentateur d'Apollonios de Rhodes 1;962 et 1;1024, les Dolions venaient de Thessalie et ils étaient ennemis des Pélasges Macriens (qui seront chassés par l'arrivée des Tyrrhènes) :
"Selon Denys de Chalcide, ces Macriens que l'on appelait aussi Macrons, étaient une colonie venue de l'ile d'Eubée qui portait autrefois le nom de Macris/ Macride." (commentatires sur Apollonios de Rhodes)

Selon Ephore (Histoire 9), les Dolions de Cyzique étaient des Pélasges chassés de la Magnésie (Thessalie orientale) par les Grecs Eoliens.

Hérodote rapporte que, plus à l'ouest, l'ile de Samothrace aurait également été habitée par les Pélasges :
"Les Pélasges, voisins plus tard des Athéniens, habitaient primitivement Samothrace, et les insulaires leur doivent leurs mystères." (Hérodote, L'Enquête, 2, 51)

 



Les Pélasges d'Ionie :

 

Selon Strabon (-60+20), les Pélasges auraient occupé également l'Ionie, en Anatolie occidentale :

"Cette histoire, en effet, nous apprend que, partis du Phricius, lequel est situé en Locride au-dessus des Thermopyles, les Eoliens abordèrent au lieu où est Cume aujourd'hui, et qu'ayant trouvé les Pélasges, bien que très maltraités par la guerre de Troie, maîtres encore de Larisse (c'est-à-dire d'une position distante de Cume de 70 stades à peine), ils élevèrent contre eux, à 30 stades de Larisse, le fort de Néon-Tichos, encore debout aujourd'hui. De là ils purent aisément s'emparer de Larisse, et, ayant fondé Cume (Cymé / Phricônis), ils y transportèrent le peu de Pélasges qui avaient survécu. En souvenir du Phricius de la Locride, Cume et Larisse elle-même reçurent le surnom de Phriconide. Mais Larisse est aujourd'hui déserte. Les mêmes historiens, pour prouver la grandeur de la nation pélasge, invoquent différentes circonstances, le témoignage, par exemple, de Ménécrate d'Elée, qui, dans son livre des Origines des villes, affirme que toute la côte d'Ionie depuis Mycale, ainsi que les îles qui la bordent, eurent les Pélasges pour premiers habitants ; puis la prétention des Lesbiens d'avoir combattu pendant la guerre de Troie sous les ordres de Pylaeus, ce chef qu'Homère qualifie de roi des Pelasges et qui aurait donné son nom à leur mont Pylaeus ; la conviction enfin où sont tous les habitants de Chio qu'ils descendent directement des Pélasges de la Thessalie. Malheureusement la nation des Pélasges était toujours errante, toujours prompte à se déplacer ; et il s'ensuivit qu'après avoir atteint un haut degré de puissance elle déclina très rapidement. Ajoutons que ce déclin de leur puissance coïncide justement avec l'époque du passage en Asie des Eoliens et des Ioniens." (Strabon 13;3;3) (cf.Thucydide 109)

"Il est arrivé en outre que la dénomination de Pélasges, attribué dans le principe à divers héros individuellement, s'est transportée avec le temps des héros aux pays mêmes témoins de leurs exploits. C'est ainsi notamment qu'on en est venu à qualifier Lesbos de Pélasgienne et qu'Homère a placé des Pélasges dans le voisinage immédiat des Ciliciens de la Troade :
'Hippothoüs conduisait les belliqueux Pélasges, les Pélasges de la riche et fertile Larisse'.
(…) Au dire d'Anticlide maintenant, Lemnos, Imbros et les îles voisines auraient eu les Pélasges pour premiers habitants, et, parmi ces Pélasges, Tyrrhen, fils d'Atys, aurait recruté une partie des compagnons qui le suivirent en Italie.
" (Strabon 9;5;2;4)

 


 

Les Philistins :

On pense que les Philistins, qui ont donné leur nom à la Palestine, pourraient avoir été des Pélasges.

Ils s'appelaient "Pulusatis", "Palaistus", "Palastus" ou "Pilistus" en assyrien et babylonien et "Pelishtims" ou "Pelesets" en hébreux.

Selon les textes égyptiens, ils semblent pouvoir être identifiés avec les Peleshets / Pulasatis venus lors de la grande invasion des "Peuples de la Mer" vers 1200 av.JC. Peut-être est-ce une coïncidence mais, en grec, le mot "Pélasge" pourrait être rapporté à la racine "pelagos" qui signifie "mer" (mais certains préfèrent le rapprocher de la racine "pelargos" qui signifie "cigogne" ou de la racine "Planaomai" qui signifie "errer").

Dans la Bible, le livre d'Amos 9;7 prétend que les Philistins sont venus de Caphtor, c'est à dire de la Crète (Crète = Keftiou en égyptien, Kaptar en mariote).

Hors, selon Homère, il y avait bien des Pélasges en Crète :
"La Crète est une terre qui s'élève au milieu de la sombre mer, belle et fertile, où habitent d'innombrables hommes et où il y a quatre-vingt-dix villes. On y parle des langages différents, et on y trouve des Achéeens, de nobles Etéo-Crétois indigènes, des Kydônes / Cydoniens, trois tribus de Doriens et les divins Pélasges. Sur eux tous domine la grande ville de Knôssos, où régna Minôs qui s'entretenait tous les neuf ans avec le grand Zeus." (Odyssée 19;175-177)

Strabon (-60+20) répétait ce que Homère avait raconté :
"Les Pélasges, c'est l'opinion presque universelle, formaient une race ou nation fort ancienne répandue par toute la Grèce, (…) Homère nous les montre déjà établis en Crète, puisqu'il fait dire à Ulysse dans son récit à Pénélope :
'Ici les peuples ne parlent point tous la même langue : mais on trouve mêlés ensemble l'Achéen, le noble Etéocrètois le Cydonien, la triple nation Dorienne et les Pélasges issus des dieux'." (Strabon 5;2;4)
"Or, de ces différents peuples, les Doriens, s'il faut en croire Staphylus, « avaient occupé tout le levant, les Cydones tout le couchant et les Etéocrètois tout le midi, avec la petite ville de Prasus où est le temple de Jupiter Dictéen, pour chef-lieu. Quant aux deux autres peuples, plus forts et plus puissants que les premiers, ils avaient pris possession des plaines. Il y a lieu de croire que les Etéocrètois et les Cydones étaient seuls autochthones, tandis que les autres formaient autant de populations advènes."
(Strabon 10;4;6)

Aparemment à cette époque les Doriens ne dominaient encore que l'est de l'ile.
Les crétois avaient été repoussé dans le sud.
Les Cydoniens étaient dans l'ouest.
Et le centre nord était occupé par les Achéens mélés de Pélasges.

Et selon Diodore IV.60, Tectamos, fils de Doros, petit-fils d'Hellen, et arrière-petit-fils de Deucalion suivit d'Eoliens et de Pélasges, vint débarquer en Crète et se fit roi de cette île.

Selon Plutarque (+46+125), les Pélasges (ou Grecs Myniens ?) de Lyctos, en Crète du centre-nord-est, étaient venus de Lemnos en se mettant sous la protection de Sparte.
On peut supposer que ces Pélasges étaient les ancètres des Philistins.

L'archéologie indique que les poteries employées par les Philistins étaient les mêmes que celles utilisées en Grèce et en Egée à l'époque de l'Helladique récent III C (-1190 à - 1100).
Et l'étude génétique des Philistins renvoit à la Grèce, à la Crète, à la Sardaigne et à la péninsule ibérique.

Le fait que le mot "Philistin / Palestinien / Peleset" s'écrive avec un « T » et non avec un « G » n'est pas gênant pour le rapprocher du nom "Pélasge" car il semble bien que ces deux formes existaient également en Grèce.
Ainsi, on trouve à la fois « Pelasgikon » et « Pelastikon » dans le dictionnaire de Hésychios (-5e s).
Ainsi, le fleuve Strymon (au nord-est de la Chacidique où vivaient des Pélasges), avait jadis porté le nom de «Palaistinos ».
Ainsi, les cultivateurs de l'Attique, où avaient vécu des Pélasges, portaient le nom de « Pelastais / Pelaistais ».
Ainsi, le mur pélagique de l'acropole d'Athènes s'appelait "Pelargikon" mais le peuple l'appelait "Pelastikon".
Ainsi, en Epire (en Acrocéraunie), où avaient vécu des Pélasges, on trouvait la ville de Palaisté.
On trouvait également des « Deae palaestinae » chez les Palaestinis de Palaeste en Epire du nord.
Il y avait aussi les Palestinae harenae entre l'Etna et Messine.

 


 

Les Tyrrhéniens / Etrusques :

Les Tyrrhéniens / Tyrrhènes / Tyrsènes / Etrusques correspondaient probablement aux Tereshs / Turshas faisant partie des « Peuples de la mer » qui avaient tenté d'envahir l'Egypte vers 1200 av.JC mais avaient été repoussés.
On peut penser qu'ils devaient leur nom à la ville de Tursa, ce qui signifie qu'ils vivaient en Carie (Anatolie du sud-ouest) avant l'arrivée des Cariens.

Selon Hérodote (-480-425) les Etrusques viendraient de Lydie en Anatolie :
"Sous le règne d'Atys, fils de Manès, toute la Lydie fut affligée d'une grande famine, que les Lydiens supportèrent quelque temps avec patience. Mais, voyant que le mal ne cessait point, ils y cherchèrent remède, et chacun en imagina à sa manière. Ce fut à cette occasion qu'ils inventèrent les dés, les osselets, la balle, et toutes les autres sortes de jeux, excepté celui des jetons, dont ils ne s'attribuent pas la découverte. Or, voici l'usage qu'ils firent de cette invention pour tromper la faim qui les pressait. On jouait alternativement pendant un jour entier, afin de se distraire du besoin de manger, et, le jour suivant, on mangeait au lieu de jouer. Ils menèrent cette vie pendant dix-huit ans ; mais enfin, le mal, au lieu de diminuer, prenant de nouvelles forces, le roi partagea tous les Lydiens en deux classes, et les fit tirer au sort, l'une pour rester, l'autre pour quitter le pays. Celle que le sort destinait à rester eut pour chef le roi même, et son fils Tyrrhénus se mit à la tête des émigrants.
Les Lydiens que le sort bannissait de leur patrie allèrent d'abord à Smyrne, où ils construisirent des vaisseaux, les chargèrent de tous les meubles et instruments utiles, et s'embarquèrent pour aller chercher des vivres et d'autres terres. Après avoir côtoyé différents pays, ils abordèrent en Ombrie, où ils se bâtirent des villes, qu'ils habitent encore à présent ; mais ils quittèrent le nom de Lydiens, et prirent celui de Tyrrhéniens, de Tyrrhénus, fils de leur roi, qui était le chef de la colonie."
(Hérodote 1;94)

Selon Hérodote (-480-425) il y avait des Tyrrhéniens (Etrusques) en dessous des Pélasges de Crestone de Thrace :
"Quelle langue parlaient alors les Pélasges, c'est un article sur lequel je ne puis rien affirmer. S'il est permis de fonder des conjectures sur quelques restes de ces Pélasges, qui existent encore aujourd'hui à Crestone, au-dessus des Tyrrhéniens et qui jadis, voisins des Doriens d'aujourd'hui, habitaient la terre appelée maintenant Thessaliotide ; si à ces Pélasges on ajoute ceux qui ont fondé Placie (Plakia) et Scylacé sur l'Hellespont, et qui ont demeuré autrefois avec les Athéniens, et les habitants d'autres villes pélasgiques dont le nom s'est changé ; il résulte de ces conjectures, si l'on peut s'en autoriser, que les Pélasges parlaient une langue barbare. Or, si tel était l'idiome de toute la nation, il s'ensuit que les Athéniens, Pélasges d'origine, oublièrent leur langue en devenant Hellènes, et qu'ils apprirent celle de ce dernier peuple ; car le langage des Crestoniates et des Placiens, qui est le même, n'a rien de commun avec celui d'aucuns de leurs voisins : preuve évidente que ces deux peuplades de Pélasges conservent encore de nos jours l'idiome qu'elles portèrent dans ces pays en venant s'y établir." (Hérodote 1;57)

Pour Denys d'Halicarnasse (-60-08) Hérodote ne voulait pas parler de Crestone en Thrace mais de Cortone en Etrurie (Toscane). Cela lui évitait de reconnaitre qu'il y avait des Tyrrhéniens / Etrusques dans le sud de la Thrace et pas seulement en Toscane en Italie.

Dans les pièces de Sophocle (-495-406), les Pélasges de Pélasgiotide, de l'Hellespont et de la presqu'île de l'Acté sont bien appelés "Tyrrhènes" (Tyrrhéniens / Etrusques).

Selon Thucidide (-471-391), les Etrusques / Tyrrhéniens sont bien identifiables aux Pélasges qui provenaient de l'Attique et de Lemnos :
"Brasidas, après la conquête d'Amphipolis, porta la guerre, avec ses alliés, dans la contrée qu'on appelle Acté. Elle commence au canal qu'avait fait creuser le roi ; l'Athos, montagne élevée, qui en fait partie, se termine à la mer Égée. La ville de Sané est comprise dans ce pays : c'est une colonie d'Andros, située près du canal, et tournée vers la mer qui regarde l'Eubée. Il contient encore d'autres villes, telles que Thyssus, Cléones, Acrothoos, Olophyxus et Dion, habitées par un mélange de nations barbares, qui parlent deux langues différentes : on y trouve quelques familles chalcidiennes, mais le plus grand nombre est composé de ces Pélasges qui, autrefois, sous le nom de Tyrrhéniens, habitèrent Lemnos et Athènes." (Thucidide 4, 109, 4 )
On notera d'ailleurs qu'une stèle retrouvée à Lemnos est écrite dans la mème langue que l'étrusque, ce qui démontre que ces derniers ont bien vécu sur cette ile avant que les Thraces Sinties ne s'y établissent (voir Strabon 7;47, et 12;3.20, l'Odyssée 8;294 et l'Iliade 1;594 et 18;394). Voir l'image de la stèle en haut de cette page.

Selon Diodore de Sicile (-90-30) les Etrusques pourraient être des Pélasges venus de Thessalie.
"Les Gaulois (…) envahirent le pays situé entre les Appenins et les Alpes et en chassèrent les Etrusques qui l'habitaient. Ces derniers, selon quelques auteurs, étaient des colons venus des douze cités de Toscane (Etrurie); mais d'autres les considèrent comme des Pélasges qui, avant la guerre de Troie, furent chassés de Thessalie par le déluge de Deucalion et vinrent se fixer en cet endroit." (Diodore14;113;2)

Mais selon Denys d'Halicarnasse (-60-08) les Tyrrhéniens / Etrusques venaient bien de Lydie :
"Mais les mythologistes qui rapportent que ces hommes étaient venus d'une terre étrangère disent que Tyrrhenos, qui était le chef de la colonie, donna son nom à la nation, et qu'il était Lydien de naissance, du pays appelé jadis Méonie, et qu'il émigra à  une période ancienne." (Denys 27;1)

Denys d'Halicarnasse (-60-08) n'est cependant pas vraiment clair en ce qui concerne l'identification ou pas des Tyrrhéniens / Etrusques avec les Pélasges :
"Les Pélasges étaient non seulement supérieurs à beaucoup de peuples dans la guerre, grâce à leur pratique au milieu des dangers en vivant parmi des nations guerrières, mais ils jouissaient également de la plus grande compétence dans l'art de la navigation, en raison de leur cohabitation avec les Tyrrhéniens; et la nécessité, qui suffit à rendre audacieux ceux qui n'ont pas de moyens d'existence, étaient leur guide et leur guide dans chaque entreprise dangereuse, de sorte que partout où ils sont allés ils étaient conquis sans difficulté.
Et ce même peuple s'appelait pour le reste du monde Tyrrhéniens et Pélasges, ce premier nom provenait du pays d'où ils étaient venus et le second en mémoire de leur origine antique. Je mentionne cela pour que personne, en entendant des poètes ou des historiens nommer les Pélasges aussi les Tyrrhéniens , ne puisse s'étonner de ce que le même peuple ait porté ces deux noms.
A leur sujet, Thucydide mentionne l'Acté de Thrace ainsi que des villes qui s'y trouvent, qui sont habitées par les hommes qui parlent deux langues. En ce qui concerne la nation des Pelasges voici ses mots: 'Il y a également un élément chalcidien chez eux, mais la plus grand partie est pélasgienne, appartenant aux Tyrrhéniens qui jadis habitèrent Lemnos et Athènes.'
Et Sophocle fait parler le chœur dans son drame Inachos en ces vers anapestiques : 'O Inachos qui coule sans cesse, enfant d'Océan, père de toutes les sources, toi que vénèrent avec force les champs d'Argos et les collines d'Héra et aussi les Tyrrhènes Pélasges'." 
(Denys 25;1-4)

Denys d'Halicarnasse se base aussi sur Hellanicos de Lesbos (-491-405) et Myrsilos pour tenter de s'y retrouver :
"Hellanicos de Lesbos indique que le Tyrrhéniens, qui s'appelaient auparavant Pélasges, reçurent leur nom actuel après s'être établis en Italie. Voici ce qu'il dit dans sa Phoronis: "Phrastor était le fils de Pelasgos, leur roi, et de Menippé, la fille de Pénée; son fils s'appelait Amyntor, le fils d'Amyntor était Teutamidès, et le fils de ce dernier était Nanas. Sous son règne les Pélasges furent chassés de leur pays par les Grecs, et après avoir abandonné leurs bateaux à l'embouchure spinétique dans le golfe ionien, ils prirent Crotone, une ville à l'intérieur des terres; et partant de là, ils colonisèrent le pays qu'on appelle maintenant Tyrrhénie.
Mais Myrsilos raconte exactement le contraire de ce que dit Hellanicos. Les Tyrrhéniens, dit-il, après avoir quitté leur propre pays, au cours de leurs vagabondages, furent appelés Pelarges ou "cigognes," à cause de leur ressemblance avec les oiseaux de ce nom, parce qu'ils parcouraient en bandes la Grèce et les terres barbares; et ce sont eux qui ont construit le mur autour du citadelle d'Athènes qu'on appelle le mur de pelargique.
Mais à mon avis tous ceux qui pensent que les Tyrrhéniens et le Pélasges sont une même nation se trompent. Ce n'est pas étonnant qu'ils aient pris le nom de l'autre, car la même chose est arrivée aussi à d'autres nations grecques et barbares (…) Et des nations d'Italie ont été confondues sous un même non comme souvent d'autres nations."
(Denys 28;3-4 et 29;1)

Denys d'Halicarnasse note les différences entre Pélasges et Tyrrhéniens / Etrusques :
"En effet 'ni les Crotoniates,' dit Herodote, 'ni les Plakiens ne comprennent la langue d'aucun de leurs voisins actuels, alors qu'ils se comprennent entre eux; et il est clair qu'ils gardent la langue qu'ils ont apportée avec eux dans ces régions.' Cependant, on peut trouver curieux que, bien que le Crotoniates parlent la même langue que les Plakiens, qui vécurent près de l'Hellespont, puisque tous les deux sont Pélasges d'origine, leur langue ne ressemble pas du tout à celle des Tyrrhéniens, leurs voisins les plus proches. Mais si la parenté doit être considérée comme cause pour laquelle deux nations parlent la même langue, il est naturel que le contraire soit la cause de différence linguistique. (…) en effet il n'est pas possible de croire que deux conséquences résultent de la même cause. S'il pouvait raisonnablement se produire, d'une part, que des hommes de la même nation qui se sont installés loin les uns des autres, en fréquentant leurs voisins, perdent leur langue commune, en revanche, il est tout à fait illogique que les hommes de même race et vivant dans le même pays ne se comprennent absolument pas linguistiquement.
C'est donc pour cette raison, que je suis persuadé que les Pélasges sont un peuple différent des Tyrrhéniens. Et je ne crois pas non plus que les Tyrrhéniens étaient des colons des Lydiens : ils n'emploient pas la même langue qu'eux. Mais on ne peut pas non plus alléguer que, bien qu'ils ne parlent plus une la même langue, ils maintiennent toujours quelques autres traits de leur mère-patrie. Ils n'adorent pas les mêmes dieux que les Lydiens et ne suivent pas les lois ou les coutumes semblables à celles des Lydiens, mais à tous les égards ils diffèrent plus des Lydiens que des Pélasges (…)
Les Romains cependant leur donnent d'autres noms : du pays qu'ils ont jadis habité et qui s'appelait Etrurie, ils les appellent Etrusques, et de leur connaissance des cérémonies relatives au culte divin, dans lequel ils l'emportaient sur d'autres, ils les appellent maintenant, d'une façon plutôt inexacte, Tuscis, mais jadis, avec la même exactitude que les Grecs, ils les appelaient Thyoscooïs. Pour eux, leur nom propre est le même que celui d'un de leurs chefs, Rasenna."
(Denys 29;3-4 et 30;1-3).

Pour Strabon (-60+20) aussi, les Etrusques / Tyrrhènes et les Pélasges étaient deux peuples distincts :
"Anciennement, en effet, Caeré se nommait Agylla : c'étaient, à ce qu'on assure, des Pélasges venus de Thessalie qui l'avaient fondée. Mais les Lydiens (j'entends ceux qui prirent le nom de Tyrrhènes) ayant mis le siège devant Agylla, un des leurs, dit-on, s'approcha du rempart et demanda qu'on lui dit le nom de la ville, et comme, au lieu d'obtenir la réponse à sa question, il avait été salué par un Thessalien du haut du rempart du mot Chaire (bonjour), les Tyrrhènes virent là un présage heureux et firent de ce mot un nom nouveau qu'ils donnèrent à la ville, quand ils l'eurent prise." (Strabon 5;2;3)

 



Les autres Pélasges d'Italie :

 

Selon Philistos (-430-356), les « Sicules-Ligures » d'Italie du nord auraient été chassés de leurs terres par les Ombriens et les Pélasges 80 ans avant la guerre deTroie. Il ne dit pas que ces Pélasges étaient des Etrusques.

Selon Aristote (-384-322), des Pélasges d'Argos sont partis s'installer vers l'embouchure du Po. Mais il ne dit pas que c'était les ancêtres des Etrusques.

Selon Denys d'Halicarnasse (-60-08) ces Pélasges semblent assez distincts des Tyrrhéniens / Etrusques :
"Les Pélasges furent chassés par les Grecs, et, après avoir laissé leurs vaisseaux devant le bras spinétique (du Po) dans le golfe ionien, ils s'emparèrent de la cité de Cortone à l'intérieur des terres; et partant de là, ils colonisèrent le pays qu'on appelle maintenant Tyrrhénie." (Denys 28;3)

"Et après avoir équipé un grand nombre de bateaux ils (les Pélasges chassés de Thessalie) traversèrent le golfe d'Ionie, en essayant d'atteindre les régions les plus proches de l'Italie. Mais pendant que le vent était au sud et alors qu'ils ignoraient ces régions, ils furent déportés loin de la mer et mouillèrent à une des bouches du Pô, appelée la bouche spinétique. Ils laissèrent dans cet endroit leurs bateaux et ceux des leurs qui pouvaient moins soutenir les difficultés, placèrent une garnison autour des bateaux, pour que, si leurs affaires ne marchaient pas, ils pourraient trouver une retraite sûre. 
(…) Mais plus tard, quand les barbares du voisinage leur firent la guerre, avec de grandes forces, ils abandonnèrent la ville; mais ces barbares dans la suite furent chassés par les Romains. Ainsi périt cette partie des Pélasges qui furent laissés à la bouche spinétique."
(Denys 18;3-5)

"Ensuite une partie des Pélasges qui habitaient ce qu'on appelle maintenant la Thessalie, furent obligés de quitter leur pays, s'installèrent chez les Aborigènes et ensemble ils firent la guerre aux Sikèles. Il est possible que les Aborigènes les aient reçus dans l'espoir de recevoir de l'aide, mais je crois c'était principalement à cause de leur parenté." (Denys 17;1)

"Et les Pélasges accompagnés des Aborigènes occupèrent beaucoup de villes, dont certaines étaient précédemment habitées par les Sikèles / Sicules et d'autres qu'ils construisirent eux-mêmes; parmi ces dernières il y a Caeré, alors appelée Agylla, et Pise, Saturnia, Alsium et quelques d'autres, qui au cours de temps passèrent aux mains des Tyrrhéniens." (Denys 20;5)

Selon Zozime et Denys d'Halicarnasse (-60-08), ce sont bien des Pélasges qui ont fondé Spina sur le bras spinétique (embouchure du Po), mais selon Strabon (-60+20) c'était des Grecs. Et selon les archéologues, ce sont des Grecs est des Etrusques qui occupaient conjointement cette ville :
"Dans l'intervalle de ces deux villes on rencontre Butrium, dépendance de Ravenne, et Spina, simple bourgade aujourd'hui, mais qui fut jadis une célèbre colonie grecque, comme l'attestent et le trésor des Spinites qui se voit à Delphes et tout ce qu'on raconte de la prépondérance exercée par la marine spinite en ces parages. On assure seulement que Spina s'élevait alors sur le rivage même de la mer, tandis qu'elle en est actuellement à une distance de 90 stades environ et qu'elle peut être rangée, par le fait, au nombre des villes de l'intérieur. Ajoutons, au sujet de Ravenne, qu'elle passe pour avoir été fonde par des Thessaliens (Pélasges ?); mais il paraît que ces Thessaliens ne purent tenir aux agressions et aux outrages des Tyrrhènes (Etrusques), ils admirent alors dans leurs murs les Ombriens, dont les descendants occupent la ville aujourd'hui encore, et s'empressèrent, eux, de regagner leur patrie." (Strabon 5;1;7)

Strabon a également décrit diverses possessions des Pélasges en Etrurie / Tyrrhénie. Cela indiquerait que, pour lui, cette région leurs aurait appartenu avant de passer aux Etrusques :
"Si maintenant nous longeons la côte entre Cossae et Ostia, nous voyons s'y succéder les petites places de Gravisci, de Pyrgi, d'Alsium et de Fregena. Il y a 300 stades de Cossae à Gravisci, et dans l'intervalle se trouve une localité appelée Regis-Villa, laquelle passe pour avoir servi de résidence à un ancien chef pélasge nommé Maleus, qui, après avoir régné un certain temps sur une colonie pélasgique établie en ce lieu, serait parti de là pour se rendre à Athènes. C'étaient aussi des Pélasges, on l'a vu, qui avaient fondé Agylla. Un peu moins de 180 stades séparent Gravisci de Pyrgi. Le port de Coeré n'est qu'à 30 stades en deçà de cette dernière ville et contient un temple d'Ilythie, de fondation pélasgique, temple naguère fort riche, mais qui fut pillé par Denys, tyran de Sicile, lors de son expédition contre Cyrnos. Enfin l'on compte 260 stades de distance entre Pyrgi et Ostie et c'est dans l'intervalle que sont situés Alsium et Fregena. - Ici s'arrêtera notre description du littoral de la Tyrrhénie." (Strabon 5;2;8)

Selon Pline (+23+79) ce sont bien des Pélasges qui ont construit Caeré / Agylla :
" … et Caeré même dans l'intérieur, à la distance de 4.000 pas, appelée Agylla par les Pélasges ses fondateurs." (Pline, Histoire naturelle 3;5/8;51)

Selon Pline, ces Pélasges ont bien été chassés d'Etrurie ensuite par les Etrusques / Tyrrhéniens :
"Vient ensuite, à partir de la Macra, la septième, qui renferme l'Etrurie, ayant, elle aussi, bien des fois changé de nom. Les Ombriens en ont été jadis chassés per les Pélasges, ceux-ci par les Lydiens, appelés Tyrrhéniens, du nom de leur roi, bientôt aptes appelés en grec Thuscis." (Pline, Histoire naturelle 3;5/8;51)

Selon Silius Italicus (+26+101) les Pélasges avaient également colonisé la région d'Ancône :
"La terre appartint aux Pélasges, sur qui régnait en souverain Aesis : il laissa son nom au fleuve (vers Ancône) et appela alors les habitants Asilis, d'après son nom (…)
Ce pays, comme nous l'apprend la renommée, l'ut auparavant possédé par les Pélasges ; et Aesis, leur roi, laissa son nom au fleuve et aux peuples nommés depuis Asilis."
(Punica 8;443-445)

 



Les Lélèges :

Les Lélèges sont un peuple ancien qui a vécu dans diverses parties de la Grèce, tout comme les Pélasges. Mais on ignore s'ils leurs étaient apparentés.

Ces Lélèges correspondraient peut-être aux Lulahis dont parle une inscription cunéiforme hittite, qui interdisait aux prêtres de leurs parler ainsi qu'aux marchands étrangers. On pense que ces Lulahis pouvaient habiter la Carie et la Lycie, dans le sud-ouest de l'Anatolie.

Selon l'Iliade21.86, on apprend que le roi des Lélèges s'appelle Altès, et qu'il habitait Pédasa (Pédase / Pédasos / Pidasa dans le sud de la Troade).

Strabon (-60+20) plaçait également les Lélèges à Pédasos :
"Nous avons ci-dessus parlé tout au long des Lélèges ; nous n'ajouterons qu'un mot au sujet d'une de leurs villes, Pédasos, qu'Homère nous donne pour la résidence du roi Altée
'D'Altée, qui règne sur les hardis Lélèges, et occupe sur le Satnioïs la citadelle élevée de Pédasos' (Iliade 21, 86).
On peut voir, aujourd'hui encore, l'emplacement de ladite ville, mais devenu complètement désert." 
(Strabon, Géographie 13;1;50)
"Mais, ici, sous ce nom de Troie, Achille apparemment désigne toute la partie du continent dévastée par ses armes : or, entre autres lieux, il avait dévasté tout ce qui fait face à Lesbos, et Thébé, et Lyrnesse, et Pédasos, l'une des villes des Léléges, voire même tout le pays d'Eurypyle, fils de Télèphe.
(…)
Un troisième Etat, celui des Léléges, dépendait également de la Troade, témoin le passage dans lequel, parlant d'Altée :
'D'Altée, qui commande aux valeureux Léléges'."
(Iliade 21, 86)." (Strabon, Géographie 13;1;7)

Strabon faisait des Lélèges les ancêtres des Cariens :
"On a beaucoup disserté au sujet des Cariens, voici l'opinion généralement adoptée. Ils figuraient au nombre des nations soumises au roi Minos, portaient alors le nom de Lélèges et habitaient les îles. Plus tard, ils passent sur le continent, s'y emparent, tant le long de la côte que dans l'intérieur, d'une étendue de pays considérable, et prennent la place des anciens habitants, Lélèges et Pélasges pour la plupart." (Strabon, Géographie 14;2;27)

Strabon, se référant à Phérécydes de Leros (vers 480 av. JC), séparait cependant les Lélèges des Cariens :
"De cette côte, une partie, suivant Phérécyde (la partie où se trouvent Milet, Myonte, Mycale et Ephèse), avait été primitivement occupée par les Cariens, tandis que le reste, jusqu'à Phocée, y compris Chios et Samos (autrement dit l'ancien royaume d'Ancée), appartenait aux Lélèges." (Strabon, Géographie 14;1;3)

Pour Strabon, les Lélèges étaient distincts des Cariens. Vivant en Anatolie occidentale, ils auraient colonisé une partie de la Grèce :
"Maintenant, quand on consulte Homère, on voit que tout ce canton avait appartenu aux Lélèges, et que les Lélèges, que certains auteurs identifient avec les Cariens, en sont très nettement séparés par le poète : témoin ce passage de l'Iliade :
'Sur le rivage même campent les Cariens, les Paeones (Péoniens) à l'arc recourbé, les Lélèges, les Caucones' (Iliade 10, 428), duquel il résulte clairement que les Lélèges formaient un peuple distinct des Cariens : ils habitaient entre les Etats d'Enée et le territoire attribué par Homère aux Ciliciens (?). Mais les incursions et dévastations d'Achille les forcèrent d'émigrer en Carie, où ils vinrent occuper tout le canton dépendant aujourd'hui d'Halicarnasse.
De la ville de Pédasus qu'ils abandonnèrent à cette occasion, il ne reste plus de vestiges aujourd'hui ; seulement ils donnèrent le nom de Pédasa à une ville de l'intérieur du canton d'Halicarnasse, et cette partie du canton a continué jusqu'à présent à s'appeler la Pédaside. Ils avaient même bâti, dit-on, huit villes nouvelles, et s'étaient multipliés, au point de se répandre en Carie et de s'y emparer de toutes les terres jusqu'à Myndos et jusqu'à Bargylia, voire d'empiéter sensiblement sur les limites de la Pisidie. Mais plus tard, s'étant laissé entraîner par les Cariens dans des expéditions lointaines, ils se dispersèrent par toute la Grèce, si bien que leur race finit par disparaître complètement."
(Strabon, Géographie 13;1;58-59)

Pour Strabon, les Cariens des Cyclades et de l'Anatolie du sud-ouest étaient apparentés aux Lélèges :
"Les Cariens, Lélèges d'origine, s'il faut en croire certains auteurs, abandonnèrent à leur tour les îles qui avaient été leurs demeures primitives, et passèrent sur le continent pour s'y établir en compagnie de colons crétois." (Strabon, Géographie 12;8; 5)

Strabon décrivait aussi des colons Lélèges en Béotie :
"Pour en revenir à la Béotie, ses premiers habitants étaient justement des Barbares : c'étaient les Aones, les Temmices, race errante venue en dernier lieu de Sunium, les Lélèges aussi et les Hyantes."  (Strabon 9;2;3)

Strabon placait les Lélèges prés des Cariens (en Anatolie du sud-ouest), à Pédasos (au sud de Troie), en Acarnanie, en Locride et en Béotie, c'est à dire entre le Péloponnèse et la Thessalie du sud :
"Nous avons déjà parlé tout au long des Pélasges ; pour ce qui est des Lélèges, nous dirons que, si certains auteurs les identifient hardiment avec les Cariens, il en est d'autres qui se bornent à croire qu'ils ont habité les mêmes pays et pris part aux mêmes expéditions, et que c'est là ce qui explique l'existence, dans le territoire de Milet, de localités appelées encore villes des Lélèges, et sur plus d'un point de la Carie de tombeaux de Lélèges et de forts abandonnés dits Lélégées. Le fait est que toute l'Ionie actuelle fut anciennement habitée par les Cariens et par les Lélèges à la fois, et que les Ioniens durent les expulser les uns et les autres pour prendre possession du pays ; plus anciennement encore, à la suite de la prise de Troie, les Lélèges s'étaient vu chasser de Pedasos et des bords du Satnioeis, positions qu'ils occupaient aux environs du mont Ida. Que les Lélèges, maintenant, aient été des barbares, le seul fait de leur association avec les Cariens suffirait à l'indiquer. Mais on voit, en outre, par les Républiques ou Constitutions d'Aristote, qu'ils avaient mené longtemps une vie errante, soit en compagnie de ce même peuple, soit seuls, et celà dès la plus haute antiquité. Ainsi, dans le livre intitulé République des Acarnaniens, Aristote nous dit qu'à l'origine une partie de l'Acarnanie fut occupée par les Curètes et que l'autre partie, la partie occidentale, le fut par les Lélèges d'abord, par les Téléboens ensuite ; dans le livre intitulé République des Aetoliens, il donne le nom de Lélèges aux Locriens actuels et assure que les Lélèges ont possédé également la Béotie. II le dit encore en traitant de la République des Opontiens et des Mégariens. (…) Ajoutons qu'on pourrait attribuer une semblable origine aux Caucones, puisqu'eux aussi ne se retrouvent plus maintenant nulle part, et qu'il est notoire cependant qu'ils avaient fondé naguère des établissements en différents pays."  (Strabon, Géographie 7;7;2)

Pseudo-Scymnos (v. 571) mentionnait des Lélèges en Eubée et Denys d'Halicarnasse (1;17) en Locride.

Il est possible que, en Grèce, les villes portant les noms de Pedasus (en Messénie) et Larymna (en Béotie) aient été fondées par les Lélèges.

Selon l'archéologie, il semble qu'à l'époque où les Grecs arrivaient en Grèce, le centre de celle-ci aurait subi une invasion venue des cotes centrales de l'Anatolie (culture de Kastri et Liman-tepe, 2500-2200 av.JC). Aparement ce peuple pourrait être celui des Lélèges. Et leur pays d'origine était appelé "Asuwa" en Hittite ("Asia" en latin).

Hors, en Grèce, Crète et Phrygie on trouve des mots étranges, non explicables par le grec, se terminant par "-nthos" et " -assos". Ils correspondent à des mots semblables avec la terminaison "-ndos / -nda / -assa" en Anatolie.
Ces terminaisons doivent provenir d'Anatolie car elles peuvent être expliquées par la langue des Luwites et des hittites.

En ce qui concerne le nom de la montagne "parnassos" (un mot en "-assos") il ne s'explique pas par le Grec. Mais il ressemble à "parnasha" qui désigne aussi une montagne chez les Hittites. Ce mot semble dériver du mot "parna" qui signifie "maison" en hittite.

Autres noms grecs non explicables par le grec : Argissa et Gurtoné (Gyrtone en Thessalie, Gortus / Gortyne en Crète). Ils pourraient être expliqués par le hittite "hargi = "blanc" et "gurtash = forteresse".

Donc la présence de ces éléments pourrait démontrer qu'un peuple apparenté aux Hittites et Luwites a précédé les Grecs en Grèce. Cela pourrait être les Lélèges.

 


Les Dryopes et Caucones :

Selon Strabon (-60+20), d'autres peuples légendaires étaient associés aux Pélasges et Lélèges : Les Dryopes et Caucones. Peut-être leurs étaient-ils apparentés :
"Ce furent des Dryopes, des Caucones, des Pélasges, des Lélèges et d'autres nations barbares qui occupèrent le pays (le Péloponnèse) au delà, comme en deçà de l'isthme." (Strabon 7;7;1) 

Selon Hérodote (-480-425) on trouvait ces barbares Dryopes ("Hommes des bois") dans le Péloponnèse :
"Les Dryopes possèdent Hermione (en Argolide) et Asinè (en Argolide et Messénie), vers Cardamyle de Laconie." (Hérodote 8;73)

Selon Hérodote,ces Dryopes du Péloponnèse seraient issus de ceux vivant au sud de la Thessalie et qui auraient été chassés par les Doriens :
"Quant aux Hermionéens, ils sont Dryopes ; ils furent autrefois chassés, par Hercule et par les Maliens, du pays appelé aujourd'hui Doride." (Hérodote 8;43)

Strabon a repris ce qu'Hérodote disait sur les Dryopes du Péloponnèse :
"Il paraît certain que les Dryopes ont eu jadis un établissement à Hermione aussi bien qu'à Asiné, mais s'agit-il, comme le pense Aristote, des compagnons de l'arcadien Dryops transportés là des rives du Sperchius, ou des populations expulsées par Hercule de la Doride et des environs du Parnasse, c'est ce qu'on ne saurait décider."  (Strabon 8;6;13)

Le Scholiaste d'apollonius de Rhodes raconte également que les Dryopes vivaient au sud de la Thessalie et qu'ils en ont été chassés par Héraclès (Hercule), fondateur de la monarchie chez les Doriens :
"Phérécyde dit dans son livre 2 que le fleuve Pénée s'unit à Polydora fille de Danaos. De leur union naquit Dryops dont, les Dryopes tirent leur nom. Ils habitent sur le fleuve Spercheios (au sud de la Thessalie)." (Scholiaste d'apollonios de Rhodes 1;1213)
"Héraclès (…) déporta tout le peuple des Dryopes (dans le Péloponnèse) à cause de leurs brigandages. " (Scholiaste d'apollonios de Rhodes 1212;19a)

Diodore de Sicile (-90-30) a également décrit l'expulsion des Dryopes par Hercule :
"Le bruit s'étant répandu que Phylas, roi des Dryopes, avait profané le temple de Delphes, Hercule entreprit une expédition à la tête des Maliens, tua le roi des Dryopes, chassa le reste de la population, et donna le pays aux Maliens. (…) Quant aux Dryopes expulsés, les uns se retirèrent en Eubée, et y fondèrent la ville de Carystos ; les autres abordèrent dans l'île de Chypre, et s'y fixèrent en se mêlant aux indigènes. Le reste des Dryopes se réfugia chez Eurysthée, qui les secourut en haine d'Hercule ; avec l'aide de ce roi, ils bâtirent trois villes dans le Péloponnèse, Asine (en Argolide et en Messénie), Hermione (en Argolide) et Eion." (Diodore de Sicile 4;37)

Pausanias (+115+180) en a parlé également :
"Les Asinéens habitaient anciennement le Parnasse, dans le voisinage de Lycorité. Ils avaient pris de leur fondateur le nom de Dryopes, qu'ils conservèrent même dans le Péloponnèse. A la troisième génération après Dryopes, sous le règne de Phylas ils furent vaincus par Hercule qui les conduisit à Delphes, et en fit offrande à Apollon ; emmenés dans le Péloponnèse d'après un oracle rendu à Hercule, ils s'établirent d'abord à Asiné près d'Hermione ; chassés de là par les Argiens, ils obtinrent des Lacédémoniens un canton de la Messénie, qui depuis leur fut laissé par les Messéniens rentrés dans le Péloponnèse.
Les Asinéens ne conviennent pas de tout cela : ils avouent bien qu'Hercule les ayant vaincus, prit leur ville sur le Parnasse, mais ils ne furent, disent-ils, ni faits esclaves, ni conduits à Apollon ; ils abandonnèrent leur ville lorsqu'ils virent leurs murs au pouvoir d'Hercule, et se réfugièrent sur les sommets du Parnasse ; ayant ensuite passé par mer dans le Péloponnèse, ils se mirent sous la protection d'Eurysthée qui, par haine pour Hercule, leur donna Asiné dans l'Argolide.
De tous les Dryopes, les seuls qui se glorifient encore aujourd'hui de ce nom, sont les Asinéens : les Eubéens de Stryra le dédaignent : Dryopes d'origine, il est vrai, mais n'ayant pas combattu contre Hercule, parce que leurs habitations étaient éloignées de la ville, ils font comme les Delphiens qui ne veulent pas s'appeler Phocéens. Les Asinéens, au contraire, aiment beaucoup à s'entendre appeler Dryopes, et les plus vénérés de leurs temples ont été évidemment érigés en mémoire de ceux qu'ils avaient sur le Parnasse ; car ils sont consacrés, l'un à Apollon, et l'autre à Dryopes dont la statue est très ancienne. Ils y célèbrent tous les ans des mystères, et ils disent que Dryopes était fils d'Apollon."

(Description de la Grèce . 4.34.9-11)

Strabon parlait aussi d'une émigration de Dryopes en Troade :
"Telle était la division de la Troade au temps d'Homère ; mais plus tard différents événements survinrent, qui changèrent complétement l'état politique du pays. Les Phrygiens envahirent le territoire de Cyzique jusqu'au Practius, et les Thraces le territoire d'Abydos, succédant les uns et les autres à des envahisseurs plus anciens, aux Bébryces, aux Dryopes." (Strabon 13;1;8)

Les Dryopes avaient également donné leur nom à Dryopis / Dryopida sur l'ile de Kythnos dans les Cyclades

Dicaearchus (-350-285) donnait aussi le nom de Dryopis au pays autour d' Ambracie, au sud de l'Epire. Mais il devait confondre avec les Dolopes de Dolopie.

Strabon cite également les Deuriopes / Derriopes / Deretinis, qui vivaient prés des Pélagons, dans le sud de la Péonie et la Macédoine du nord :
"Anciennement on eût rencontré chez tous ces peuples de véritables cités : la Pélagonie, par exemple, en possédait trois à elle seule, d'où lui est venu ce surnom de tripolis, sans compter Azoros qui lui appartenait également. Les Deuriopes avaient toutes les leurs sur l'Erigon, entre autres Bryanium, Alcomènes et Stymbara." (Strabon 7;7;9)

Un autre peuple est parfois associé aux Pélasges par les Grecs : Les Caucones / Cauconiates.
Pour Homère, les Caucones faisaient partie des alliés de Troie :

"Sur le rivage même campent les Cariens, des Péoniens, des Lélèges, des Caucones et des Pélasges." (Iliade 10, 428)

Mais ils sont appelés également Cicones / Kikones. » (Iliade 2; 816-877)

Selon Homère, Ulysse aurait combattu les Cicones et Thrace :
"En partant de Troie, le vent qui nous portait nous mis sous l'Ismaros, au pays des Cicones. Là, je pillai la ville et tuai les guerriers et lorsque sous les murs on partagea les femmes et le tas de richesses, je fis si bien les lots que personne en partant n'eut pour moi de reproches." (Odyssée 9)

Pour Strabon, ces Caucones étaient un peuple dispersé :
"Et, en effet, l'étymologie du nom de Lélèges semble indiquer que ce peuple se serait formé originairement du rassemblement et du mélange d'éléments divers, ce qui explique comment il a pu disparaître ensuite complètement. Ajoutons qu'on pourrait attribuer une semblable origine aux Caucones, puisqu'eux aussi ne se retrouvent plus maintenant nulle part, et qu'il est notoire cependant qu'ils avaient fondé naguère des établissements en différents pays." (Strabon 7;7;2)

Strabon plaçait des Caucones sur la cote nord de l'Anatolie :
"Quant aux Caucones que l'histoire nous montre établis sur la côte de l'Euxin (Mer noire) à la suite des Mariandynes et s'étendant là jusqu'au fleuve Parthénius, avec la ville de Tiéum pour chef-lieu, s'il est des auteurs qui leur attribuent une origine scythique, il en est d'autres qui ne voient en eux qu'une colonie macédonienne, d'autres aussi qui les déclarent Pélasges. Nous-même dans certain passage des livres qui précèdent, nous avons eu occasion de parler tout au long des Caucones. Ajoutons pourtant ici un dernier détail, c'est que, pour introduire dans le Diacosme ou dénombrement des vaisseaux troyens, et après le vers : 'Et Cromna, et Aegiale et les hautes Erythines' (Iliade 2, 855),
les deux vers que voici :
'Sous la conduite du valeureux fils de Polyclès, on voyait ensuite s'avancer les Caucones, habitants des brillantes demeures que baigne le Parthénius',
Callisthène se fondait sur cette double circonstance que le pays compris entre Héraclée et le territoire des Mariandynes, d'une part, et les frontières des Leucosyriens (ou, comme on les appelle aujourd'hui, des Cappadociens), d'autre part, renfermait, au temps d'Homère, côte à côte la nation des Caucones et celle des Hénètes, la première groupée autour de Tiéum et s'étendant jusqu'au Parthénius, l'autre lui faisant suite par delà le Parthénius et autour de Cytorum ; et qu'aujourd'hui encore on rencontre sur les bords du Parthénius certaines populations portant le nom de Cauconites."
(Strabon 12;3;5)

Strabon plaçait également des Caucones dans le sud de l'Elide, dans l'ouest du Péloponnèse :
"Au sujet des Caucones, comme l'histoire mentionne un peuple de ce nom en Triphylie sur la frontière de Messénie, que Dymé en outre est qualifiée quelquefois de Cauconide et qu'il existe dans le territoire de Dymé, entre cette ville et Tritée, un cours d'eau appelé le Caucon, on s'est demandé s'il n'y aurait pas eu deux Cauconies distinctes, celle de la Triphylie et celle des environs de Dymé, d'Elis et du Caucon (…)
Il est intéressant de rechercher ainsi l'origine de l'épithète de Cauconide donnée quelquefois à Dymé et du nom de Caucon que porte une des rivières des environs, c'est qu'autrement on est embarrassé de savoir quels peuvent être les Caucones chez qui Minerve annonce qu'elle se rend pour réclamer le montant d'une ancienne créance. Qu'on entende en effet ces paroles des Caucones de Lépréum en Triphylie, je n'y vois plus, pour ma part, aucun sens raisonnable.
(…)
Diverses traditions ont cours au sujet des Caucones, et cela se conçoit d'un peuple qui passe pour être originaire d'Arcadie, ainsi que les Pélasges, et pour avoir mené longtemps, comme ceux-ci, une vie de courses et d'aventures, Homère les compte au nombre des peuples venus au secours de Troie ; mais d'où venaient-ils alors ? Il ne le dit point. Peut-être était-ce de la Paphlagonie, où l'on connaît encore un peuple du nom de Cauconiates, voisin et limitrophe des Mariandyniens, autre nation Paphlagonienne. Nous parlerons plus au long des Cauconiates, quand nous en serons arrivé à la Paphlagonie dans notre description de la terre habitée. Pour le moment, nous nous bornerons à ajouter quelques mots d'éclaircissement au sujet des Caucones de la Triphylie. Suivant certains auteurs, toute l'Elide actuelle, depuis la Messénie jusqu'à Dymé, aurait porté le nom de Cauconie. Antimaque, notamment, comprend les populations de l'Elide sous la dénomination générale soit d'Epéens, soit de Caucones ; mais d'autres nient que les Caucones aient jamais occupé ce pays en entier, et ils nous les montrent partagés en deux corps de nation, dont l'un était établi en Triphylie, sur la frontière de Messénie, tandis que l'autre habitait du côté de Dymé, dans la Bupraside et la Coelé-Elide : c'est celui dont Aristote a eu plus particulièrement connaissance. Or, cette seconde opinion a l'avantage de s'accorder mieux avec ce que dit Homère des Caucones, et de résoudre, qui plus est, la question posée plus haut. Donnons, en effet, Pylos de Triphylie pour résidence à Nestor, tout le pays au S. et à l'E. de Pylos jusqu'à la frontière de la Messénie et de la Laconie lui obéit, et, comme ce sont les Caucones précisément qui l'habitent, il s'ensuit que, pour aller de Pylos à Lacédémone, il faut de toute nécessité passer par chez les Caucones. Mais comme, d'autre part, le temple de Neptune Samien et ce port voisin du temple où Homère fait débarquer Télémaque se trouvent situés au N. et à l'O. de Pylos, si ces Caucones sont les seuls qu'il y ait en Elide, le récit du poète n'offre plus aucune vraisemblance."
(Strabon, Geographie 8;3;11-17)

On remarquera que les Caucones / Kikones portaient un nom en "-one" tout comme de nombreux peuples à l'est de la Macédoine : Crestones, Mygdones, Edones, Sithones
Même les Macédoniens pouvaient être appelés "Macednes" ou "Macédones". Les Péoniens étaient aussi des "Péones" et les Pélasges de cette régions s'appelaient "Pélagones".
Il est possible que plusieurs de ces tribus aient fait partie d'un ancien groupe linguistique proche du grec et antérieur à l'arrivée des Thraces. Les Bryges (ancêtres des Phrygiens) en auraient fait partie, et peut-être aussi les Dardanes, qui sont passés par Samothrace pour aller régner sur les Teucres de Troie.
Ce serait alors des Indo-européens et pas des Pélasges.